Incivisme en Côte d’Ivoire : Le conflit politique et la crise économique sont vraiment la cause ? (FES)

Emeutes suite à l'assassinat d'une élève dans la ville de M'Bahiakro en mars 2018
Emeutes suite à l'assassinat d'une élève dans la ville de M'Bahiakro en mars 2018

Y a-t-il une raison qui puisse explique l’incivisme en Côte d’Ivoire qui devient de plus en plus fort. « Est-ce dû au conflit politique ? Est-ce à cause de la crise économique ? », s’interroge un cadre ivoirien de la Friedrich-Ebert-Stiftung. A lire.

Vous vous arrêtez ou vous passez quand même ? Car vous avez un rendez-vous très important et les autres conducteurs ne le savent pas. Pour les autres le feu est vert, mais ils peuvent attendre pour vous. Êtes-vous plus important que vos concitoyens qui ont la priorité ?

Il y a un embouteillage au carrefour et il est tard. Vous avez beaucoup travaillé aujourd’hui. Allez-vous vous mettre dans la file ou vous y frayer un chemin par la gauche ? Car vous avez là-encore une bonne raison, et les autres, qui ont respecté la queue, peuvent bien attendre. Êtes-vous plus important que vos concitoyens qui prennent leur mal en patience ?

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Vous entendez une ambulance derrière vous, vous êtes encore dans un embouteillage, Abidjan peut nous fatiguer. Vous attendez depuis longtemps pour avancer. Allez-vous faire place à l’ambulance ou l’ignorer? Si vos yeux ne croisent pas celui du chauffeur, c’est comme si vous n’aviez pas vu son véhicule. Dans ce cas, on ne peut vous reprocher d’avoir commis une erreur. Êtes-vous plus important que vos concitoyens qui sont en train de mourir dans l’ambulance ?

Incivisme en Côte d’Ivoire : le conflit ?

Tous ces exemples sont inspirés de la réalité des routes en Côte d’Ivoire. Ils sont à observer au quotidien, à Abidjan et dans les autres villes du pays. Et il y en a d’autres. On pourrait également évoquer le traitement des femmes de ménage (ou « serveuses » ou « petites filles »), de la ponctualité ou alors des « pourboires », que les plus faibles de la société doivent parfois payer pour obtenir des documents ou pour ne pas être arrêtés par les forces de sécurité. Mais nous allons nous arrêter ici.

« Aujourd’hui, notre pays ne projette plus cette image. Est-ce dû au conflit politique ? Est-ce à cause de la crise économique ? Peut-être. La solidarité est pourtant à la base de la culture ivoirienne »

Ce comportement qui ne s’observe pas forcément dans tous les autres pays africains (pour éviter l’argument « Mais chez nous en Afrique… ») montre une mauvaise image de notre cher pays, qui était une référence en Afrique. Au-delà de cela, ces exemples exposent quelque chose de grave pour notre société : le manque de civisme, le manque de respect et le manque de solidarité.

A Bloléquin en février 2018, des individus ont décidé de se faire justice et ont attaqué des symboles de l'Etat
A Bloléquin en février 2018, des individus ont décidé de se faire justice et ont attaqué des symboles de l’Etat

A une époque pas si lointaine, la Côte d’Ivoire était connue pour son hospitalité et sa solidarité envers ses concitoyens et les étrangers. Aujourd’hui, notre pays ne projette plus cette image. Est-ce dû au conflit politique ? Est-ce à cause de la crise économique ? Peut-être. La solidarité est pourtant à la base de la culture ivoirienne. Sommes-nous en train d’oublier les valeurs de notre propre culture ?

Dans une démocratie, surtout sociale, tout le monde est égal face à la loi. Vous n’êtes pas plus important que vos concitoyens. Peu importe votre argent, votre position dans la société ou votre origine. La loi ne connaît pas de préférences dans une démocratie sociale. Ce principe est crucial dans un Etat de droit, pas pour sanctionner et contrôler, mais pour permettre à toutes et à tous d’avoir les mêmes chances de vivre leur vie comme ils veulent.

« Changement et petits pas »

Demain vous pourriez être dans cette ambulance. Ce soir vous pourriez attendre dans cette file alors que votre épouse est en train de donner naissance. Quelqu’un vous dépasse et vous perdez encore un peu plus de temps. Lundi, après un bon week-end avec la famille, vous pourriez être dans un accident grave parce que quelqu’un est passé au feu rouge et vous a coupé la priorité.

Chers sociaux-démocrates, avec votre propre comportement, vous pouvez changer beaucoup ; vous pouvez tout changer. En faisant preuve de plus de civisme, de gentillesse et de solidarité. Chaque changement de la société a commencé par de petits pas. Faites le premier!

NDLR : Cet article fait partie d’une série d’analyses politiques qui sont publiées régulièrement par le bureau de la Friedrich-Ebert-Stiftung Côte d’Ivoire

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