Deux policiers ivoiriens écopent de 18 et 12 mois de prison ferme pour leur implication dans la mort du Sénégalais Dimba Sow lors d’une opération non autorisée en janvier 2025.
Le Tribunal militaire d’Abidjan a condamné deux policiers à des peines d’emprisonnement ferme pour leur responsabilité dans la mort de Dimba Sow, ressortissant sénégalais de 57 ans, survenue le 20 janvier 2025. Les sergents B.R.Y.S et B.N.R.K, jugés le 17 avril, ont écopé respectivement de 18 et 12 mois de prison ferme, assortis chacun d’une amende de 300 000 FCFA à verser à l’État ivoirien.
L’affaire, qui aurait pu prendre une dimension diplomatique entre la Côte d’Ivoire et le Sénégal, met en lumière une cascade de manquements aux procédures policières. Le dossier, minutieusement instruit depuis l’interpellation des deux agents le 4 février, révèle comment une initiative personnelle, menée en dehors de tout cadre légal, a dégénéré en drame. Les deux policiers ont finalement reconnu l’intégralité des faits qui leur étaient reprochés.
Une opération improvisée et illégale
Les circonstances de cette intervention fatale, telles que détaillées lors du procès, illustrent une suite de décisions individuelles prises en violation flagrante des règles de la police nationale. Le sergent B.R.Y.S, qui venait de terminer son service à la police secours de Cocody, avait insisté pour accompagner l’équipe suivante malgré le refus catégorique de sa hiérarchie, invoquant des difficultés financières.
Plus tard dans la soirée, vers 23 heures, son collègue B.N.R.K, censé être en service, a quitté son poste sous le prétexte d’aller aux toilettes. Les deux hommes se sont retrouvés à trois kilomètres de là et ont décidé, de leur propre initiative, de « démanteler » un supposé réseau de prostitution. Cette décision, prise sans information préalable et sans validation hiérarchique, constitue une violation caractérisée des protocoles d’intervention.
Au cours de cette opération sans mandat ni autorisation, ils ont interrogé un vigile qui leur a pourtant indiqué qu’aucune prostituée ne résidait dans l’immeuble depuis plus d’un mois. Ignorant cette information, ils ont forcé la porte d’un appartement et y ont trouvé Dimba Sow, récemment installé. Confondant la victime avec un proxénète présumé, ils l’ont contrainte à sortir de son domicile après lui avoir confisqué son téléphone alors qu’il tentait d’appeler à l’aide.
L’abandon et ses conséquences légales
L’intervention d’un voisin, M. G.K, rentrant chez lui vers 2 heures du matin, a partiellement modifié le cours des événements. Malgré les menaces des policiers qui ont brandi une arme, il a tenté de les convaincre que Dimba Sow n’était pas impliqué dans un quelconque réseau. Les agents ont alors renoncé à leur arrestation improvisée, mais ont refusé de restituer le téléphone confisqué.
C’est à ce moment critique que la victime, cherchant probablement à récupérer ses effets personnels, a été prise d’un malaise. La réaction des deux policiers a alors aggravé leur cas : B.R.Y.S a immédiatement quitté les lieux sans porter assistance, tandis que B.N.R.K, apparemment pris de remords, a tenté une assistance minimale en plaçant la victime en position latérale de sécurité et en demandant aux riverains d’appeler les secours, avant de quitter également la scène pour retourner discrètement à son poste.
Les charges retenues contre les deux agents reflètent la gravité de ces actions. Le sergent B.R.Y.S a été reconnu coupable d’abus d’autorité, de voie de fait, d’omission de porter secours, d’homicide involontaire et de violation de consigne. Son collègue B.N.R.K a été condamné pour abandon de poste, abus d’autorité, voie de fait, homicide involontaire et violation de consigne.
La gravité de cette affaire tient autant aux faits eux-mêmes qu’à ce qu’ils révèlent sur certaines pratiques policières. L’initiative personnelle des deux agents, leur mépris des consignes et de la chaîne hiérarchique, ainsi que leur comportement face à un citoyen étranger soulèvent des questions fondamentales sur la formation et le respect de la déontologie au sein des forces de l’ordre.
À l’issue du procès, le tribunal et les avocats des accusés ont présenté leurs condoléances à la famille du défunt et au peuple sénégalais, un geste qui témoigne de la conscience des implications potentielles de cette affaire sur les relations entre les deux pays. Cette condamnation pourrait marquer un précédent dans le traitement judiciaire des bavures policières en Côte d’Ivoire.
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