Selon le journaliste Ferro Bally, la convocation du député Brédoumy illustre un recul démocratique en Côte d'Ivoire et un affaiblissement inquiétant des protections constitutionnelles.
« Violation des procédures » et plongée « chaque jour davantage dans l'autoritarisme ». Les mots du journaliste ivoirien Ferro Bally résonnent comme un réquisitoire contre ce qu'il considère comme une érosion progressive de l'État de droit en Côte d'Ivoire. Sa réaction, suite à la convocation du député Brédoumy Kouassi Soumaïla Traoré par la préfecture de police d'Abidjan le 29 avril 2025, pose frontalement la question du respect des institutions démocratiques.
Dans son analyse, Ferro Bally ne se contente pas de critiquer la procédure de convocation elle-même, mais s'inquiète plus profondément de l'absence de solidarité au sein de la classe politique et de la position adoptée par le président de l'Assemblée nationale. Ces éléments constituent, selon lui, des signes alarmants d'une dérive autoritaire qui s'installe progressivement dans le paysage politique ivoirien, sous couvert de respect de la légalité.
Une solidarité parlementaire inexistante
Dans sa critique, Ferro Bally souligne l'isolement du député Brédoumy face à cette convocation. « Il n'a bénéficié d'aucun soutien ni d'aucun mouvement de solidarité de ses pairs », note le journaliste, pointant ainsi un manque de cohésion institutionnelle qui devrait pourtant caractériser un parlement fonctionnel. Cette absence de front commun pour défendre les prérogatives parlementaires constitue, selon lui, un recul inquiétant de la culture démocratique.
Plus surprenant encore aux yeux du journaliste, la position de Doho Simon, président du groupe parlementaire du PDCI-RDA, qui s'est félicité de l'annulation de la convocation en remerciant les autorités. « Heureux de l'annulation de la convocation de Brédoumy, ce dernier s'est fendu d'un communiqué pour remercier chaleureusement le général Diomandé Vagondo, ministre de l'Intérieur, et le président de l'Assemblée nationale, alors que le député Brédoumy n'a été rétabli que dans ses droits », souligne Ferro Bally.
Cette réaction est interprétée comme une forme de soumission face à une autorité qui aurait simplement renoncé à violer la Constitution, plutôt que comme l'affirmation d'un principe fondamental. En remerciant les autorités exécutives pour le respect d'un droit constitutionnel, le groupe parlementaire aurait, selon cette analyse, affaibli sa propre position institutionnelle.
L'ambiguïté du président de l'Assemblée
La position d'Adama Bictogo, président de l'Assemblée nationale, cristallise particulièrement les critiques de Ferro Bally. Plutôt que de défendre l'immunité parlementaire, Bictogo aurait choisi de « corseter » les députés en rappelant que « tout parlementaire est tenu de répondre à toute convocation émanant des autorités compétentes ».
Cette déclaration est qualifiée par le journaliste de tentative « maladroite » de revendiquer « le principe de la séparation des pouvoirs ». Pour Ferro Bally, il y a là une contradiction fondamentale : en incitant les députés à se soumettre aux convocations de l'exécutif sans questionnement, le président de l'Assemblée nationale « consacre ainsi la violation des procédures » et « bat en brèche l'immunité des parlementaires ».
Le journaliste rappelle l'article 92 de la Constitution ivoirienne qui dispose clairement qu'« aucun membre du Parlement ne peut, pendant la durée des sessions, être poursuivi ou arrêté en matière criminelle ou correctionnelle qu'avec l'autorisation de la Chambre dont il est membre, sauf le cas de flagrant délit ». Ce texte, pilier de l'indépendance du pouvoir législatif, semble selon lui relégué au second plan au profit d'une soumission à l'exécutif.
Cette affaire s'inscrit dans un contexte politique tendu, notamment autour de la radiation des listes électorales de Tidjane Thiam, président du PDCI-RDA. La convocation du porte-parole du parti à quelques jours des manifestations prévues pour le 2 mai prend ainsi une dimension particulière, que Ferro Bally interprète comme un signal inquiétant pour l'avenir démocratique du pays.
« Mais la loi n'est plus la loi et Brédoumy, comme un citoyen lambda, peut être convoqué en toute impunité. Sans susciter une levée de boucliers », conclut le journaliste, résumant ainsi sa préoccupation face à ce qu'il perçoit comme un affaiblissement progressif des garde-fous constitutionnels en Côte d'Ivoire.
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