« Fonds spéciaux » : vers une jurisprudence Guillaume Soro ?

Selon Tiemoko Assale, l'affaire de détournement dont est accusé Soro est l'occasion pour la justice ivoirienne de cadrer l'utilisation des fonds spéciaux.

Au cours de son adresse du 31 décembre, l'ancien président de l'Assemblée nationale, , a déclaré avoir « régulièrement » acquis sa résidence privée de Marcory, en 2008, du temps où il était le Premier ministre de Côte d'Ivoire, en puisant dans les fonds de souveraineté de la Primature, c'est-à-dire que la maison a été acquise avec de l'argent public.

Cette déclaration de l'ancien président du parlement était une réponse à la justice ivoirienne qui le poursuit pour détournement de fonds publics, justement dans le cadre de l'acquisition de cette maison, adjugée à 1,5 milliard.

Depuis le déclenchement de cette affaire, les , comme à leur habitude, ont préféré s'étendre en caricature et en dérision. Alors qu'il s'agit là, de l'un des problèmes les plus sérieux que notre jeune république devrait traiter, si elle veut que ses citoyens aient confiance dans le fonctionnement des institutions.

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Sans rentrer dans le fond du dossier judiciaire, vu que Soro Guillaume bénéficie de la présomption d'innocence et qu'en aucune manière on ne peut le traiter comme un coupable, tant qu'une cour de justice, en dernier ressort, n'en aura pas décidé ainsi, il y a de nombreuses questions qu'on devrait tous se poser : à partir du moment où les présidents d'institutions, certains hauts responsables de la République bénéficient d'un salaire conséquent, à quel niveau de liberté doivent-ils s'établir dans l'utilisation des fonds spéciaux mis à la disposition des institutions qu'ils dirigent ? À quelles destinations, ces fonds doivent être affectés ? Les fonds spéciaux peuvent-ils servir à l'acquisition de biens privés pour les dirigeants des institutions ? Peuvent-ils être utilisés pour constituer la fortune des dirigeants ?

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Devant l'absence de cadre juridique permettant de répondre clairement à ces questions, l'affaire de la maison de Guillaume Soro apparaît du coup, comme l'occasion offerte à la Côte d'Ivoire, pour traiter définitivement ce sujet sensible. La décision que rendra la justice ivoirienne, dans un sens ou dans un autre, si un procès s'ouvre dans ce cadre, sera certainement une jurisprudence.

En 2002, un décret pris par le président Gbagbo, a permis aux présidents d'institution, d'utiliser jusqu'à hauteur de minimum 5% et maximum 10 %, les budgets de leur institution, sous l'appellation de « fonds spéciaux ». Il s'agit du décret N° 2002-349 du 17 juillet 2002 « déterminant les conditions matérielles et financières d'exercice des fonctions de président de la République, de premier ministre, de président ou chef d'institution nationale et d'anciens membres du gouvernement ou personnalité ayant rang de ministre … »

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Depuis, comme le journal « l'éléphant déchaîné » l'a révélé dans sa parution N° 656 du 8 octobre 2019, les grands serviteurs de l'Etat, se sont servis chaque année, dans ces » fonds spéciaux », en riant, dans un environnement de misère généralisée.

Guillaume Soro, à son corps défendant, va rentrer dans l'histoire et permettre, à travers une décision de justice, à la Côte d'Ivoire, de mieux comprendre cette affaire ou d'en finir définitivement, avec ce scandale de l'utilisation de fonds publics par des « serviteurs » de l'Etat, dont toute la fortune provient de l'argent public appelé « budget de souveraineté ».

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On attendra donc la décision de la justice ivoirienne, pour demander ou non, des comptes aux autres.
Car, ailleurs, des ministres ont démissionné, pour avoir utilisé, dans une fonction antérieure, de l'argent public, pour s'offrir un dîner de prince dans un restaurant.
Ici, on préfère noyer des problèmes de fond, sous des calculs politiciens.

Written by Assalé Tiemoko

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