Moussa Dadis Camara, condamné à 20 ans de prison pour le massacre du stade de Conakry, a été gracié par le président Doumbouya ce 28 mars 2025.
Moussa Dadis Camara retrouve sa liberté après moins de neuf mois d'incarcération. Le président guinéen de transition, le général Mamadi Doumbouya, a signé vendredi 28 mars 2025 un décret de grâce présidentielle en faveur de l'ancien chef d'État. Cette décision efface la condamnation à 20 ans de prison prononcée en juillet 2024 pour son rôle dans le massacre du 28 septembre 2009.
Le décret, lu à la télévision nationale guinéenne, invoque des raisons de santé pour justifier cette mesure de clémence. Cette annonce intervient dans un contexte politique sensible alors que la Guinée se trouve toujours dans une période de transition politique après le coup d'État de septembre 2021.
Un verdict historique annulé
Le tribunal criminel de Dixinn avait rendu le 31 juillet 2024 un verdict sans précédent dans l'histoire judiciaire guinéenne. Pour la première fois, un ancien chef d'État était reconnu coupable de crimes contre l'humanité et condamné à une lourde peine. La justice avait établi la responsabilité de Dadis Camara dans les violences perpétrées au stade de Conakry.
Ce jour-là, les forces de sécurité avaient ouvert le feu sur des manifestants pacifiques rassemblés pour protester contre la candidature de Dadis Camara à l'élection présidentielle. Selon les organisations de défense des droits humains, au moins 156 personnes avaient perdu la vie, des centaines d'autres avaient été blessées, et de nombreuses femmes avaient subi des violences sexuelles.
Le texte présidentiel et son application
« Pour des raisons de santé, une grâce présidentielle est accordée à Moussa Dadis Camara », indique le décret signé par le général Doumbouya. Le texte précise que le ministre de la Justice est chargé de son application immédiate et qu'il « abroge toutes dispositions antérieures contraires ».
Cette formulation laisse entendre que la grâce est totale et sans conditions, effaçant l'ensemble de la peine prononcée contre l'ancien président. Selon des sources proches du dossier, Dadis Camara pourrait quitter sa cellule de la maison centrale de Conakry dès les prochaines heures.
Le procès du massacre du 28 septembre, ouvert en septembre 2022, avait duré près de deux ans et représentait une étape importante dans la lutte contre l'impunité en Guinée. Pendant de longs mois, les victimes avaient témoigné des atrocités commises ce jour-là, apportant des éléments décisifs pour la condamnation de Dadis Camara et de plusieurs autres accusés.
La décision du tribunal avait été saluée par les organisations de défense des droits humains comme un pas vers la justice pour les victimes. Avec cette grâce présidentielle, ce processus judiciaire se trouve interrompu moins d'un an après son aboutissement.
Des implications politiques à long terme
Cette grâce présidentielle soulève des questions sur les orientations politiques du régime de transition guinéen. Si le gouvernement présente cette mesure comme un geste de réconciliation nationale, certains observateurs y voient un signal préoccupant concernant la lutte contre l'impunité.
Pour les familles des victimes du massacre du 28 septembre, cette décision représente un revers douloureux après des années de combat pour la vérité et la justice. Les associations de défense des droits humains s'inquiètent des conséquences de cette grâce sur les autres procédures judiciaires en cours dans le pays.
La communauté internationale, qui avait salué le procès comme une avancée significative pour la justice en Afrique de l'Ouest, observe avec attention les conséquences de cette décision sur l'évolution politique de la Guinée et sur son engagement à respecter l'État de droit dans la période de transition actuelle.
A LIRE AUSSI
- Procès massacre de 2009 à Conakry: Dadis Camara reste en prison
- Massacre du 28 septembre en Guinée: Dadis Camara devant les juges
- Procès Conakry: Dadis Camara de retour en Guinée pour répondre devant le tribunal de sa responsabilité massacre du 28 septembre 2009
- Procès du massacre de 2009 en Guinée: Dadis Camara face au procureur, « je n'ai pas donné d'ordre »
- Guinée : Moussa Dadis Camara condamné à de lourdes peines de prison