Max Henri Diai, le départ de l'ancien bras droit de Danièle Boni-Claverie vers le parti au pouvoir illustre les difficultés de l'opposition à maintenir ses cadres.
Le récent changement de camp de Max Henri Diai, ancien bras droit de Danièle Boni-Claverie et membre influent de l'URD (Union Républicaine pour la Démocratie), vers le RHDP (Rassemblement des Houphouëtistes pour la Démocratie et la Paix) constitue un tournant significatif dans la scène politique ivoirienne à quelques mois des élections présidentielles d'octobre 2025. Ce ralliement est symptomatique non seulement de la fragilité de l'URD, mais aussi de l'incapacité chronique de l'opposition ivoirienne à formuler une stratégie commune et crédible face à un RHDP plus fort que jamais.
À vrai dire, ce ralliement au RHDP doit être un véritable signal d'alerte pour l'opposition ivoirienne, et il serait dangereux de ne pas en mesurer la portée. On parle ici d'un homme qui, pendant des années, a incarné la fidélité et la conviction, refusant les nombreuses sollicitations de la ministre Anne Ouloto pour rejoindre le camp présidentiel. Et pourtant, aujourd'hui, il franchit le pas. Ce n'est pas un simple basculement, c'est une décision qui illustre à quel point l'opposition ivoirienne vacille, incapable de retenir ses propres cadres à quelques mois d'une élection présidentielle cruciale.
Soyons lucides : ce choix, rationnel et stratégique, s'inscrit dans une logique politique implacable. La politique, au fond, n'est pas qu'une affaire de principes, c'est aussi un engagement pour des résultats concrets. Et Max Henri Diai, qui a été un acteur actif de l'opposition ivoirienne pendant des années, semble avoir compris qu'il était peut-être plus efficace de travailler de l'intérieur du système. Peut-on réellement lui reprocher de vouloir servir ses concitoyens à travers une plateforme plus structurée et plus puissante ?
De l'autre côté, ce départ est une véritable aubaine pour le RHDP. À travers Max Henri Diai, c'est toute une région qui voit son paysage politique redessiné. Le parti au pouvoir, qui est déjà une machine politique bien huilée, ajoute une corde à son arc. Ce mouvement renforce sa présence locale et accentue sa dynamique de rassemblement. L'enjeu est clair : conserver le pouvoir d'État jusqu'en 2030, voire au-delà. Chaque ralliement stratégique comme celui-ci rapproche le RHDP de cet objectif.
Mais pour l'opposition, ce départ est un coup dur, une claque qui doit inciter à une profonde introspection. Pourquoi des figures clés comme Max Henri Diai quittent-elles le navire ? Qu'est-ce qui pousse ces hommes et femmes, pourtant fidèles et engagés, à regarder vers d'autres horizons ? À moins de dix mois de la présidentielle, l'opposition ivoirienne continue de donner l'image d'un bateau sans capitaine, sans cap clair, sans stratégie unifiée. Ce départ doit servir de leçon. D'autres cadres suivront-ils le même chemin ? Tout porte à croire que, sans une restructuration en profondeur, l'hémorragie est loin d'être stoppée.
Ce cas soulève aussi une question essentielle : qu'est-ce qui manque à l'opposition ivoirienne pour se hisser au niveau d'un RHDP structuré, organisé, et capable d'absorber ses adversaires ? Les divergences internes, les querelles d'ego, le manque de leadership fédérateur… tout cela concourt à fragiliser un camp déjà affaibli par des années d'errements. Pendant ce temps, le RHDP avance, un pas après l'autre, en rassemblant des forces vives, en consolidant ses bases, et en préparant sereinement les échéances de 2025.
Le départ de Max Henri Diai n'est pas une trahison, c'est un choix stratégique. Il incarne cette idée que la politique est avant tout un moyen, non une fin en soi. Oui, il est critiqué, et il le sera encore. Mais soyons honnêtes : qui peut vraiment lui jeter la pierre ? Son choix est celui de la rationalité. Il a passé des années à défendre une opposition qui, aujourd'hui, semble incapable de tenir ses promesses, incapable de proposer une alternative crédible au pouvoir en place.
Et pourtant, ce ralliement est aussi une leçon pour le camp présidentiel. Il rappelle que la politique est un jeu d'équilibres subtils. Si le RHDP parvient à attirer des cadres influents comme Max Henri Diai, c'est grâce à sa capacité à incarner une certaine stabilité et une vision claire. Mais cette dynamique ne peut pas reposer uniquement sur le ralliement de figures emblématiques. Le RHDP doit aussi continuer à séduire l'électorat de base, à démontrer que sa vision est en phase avec les aspirations profondes des Ivoiriens.
En somme, ce ralliement est révélateur d'une dynamique politique où chaque camp doit tirer des leçons. Pour l'opposition, il est temps de se ressaisir, de se poser les bonnes questions et, surtout, de trouver une stratégie commune. Pour le RHDP, c'est une victoire indéniable, mais pas une garantie absolue. L'avenir reste ouvert, et à moins de dix mois de l'échéance électorale, rien n'est encore joué. Ce qui est sûr, c'est que Max Henri vient de redistribuer les cartes, et la Côte d'Ivoire politique ne sera plus tout à fait la même.
Ahouman Gaël Lakpa Analyste Sociopolitique, Consultant Télé et Écrivain Ivoirien.
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