La nouvelle Charte de la Refondation du Niger consacre Abdourahamane Tiani comme Président et établit une transition de 60 mois ajustable selon l'évolution régionale au Sahel.
Constitution transitoire nigérienne : le CNSP formalise son architecture institutionnelle. Le général Abdourahamane Tiani a promulgué la Charte de la Refondation, texte fondamental qui redéfinit l'organisation politique du Niger pour les cinq prochaines années. Ce document, issu des Assises nationales de février 2025, institutionnalise le pouvoir pris par la junte militaire en juillet 2023.
Le Secrétaire général du gouvernement, Maman Roufai Laouali, chargé de la lecture publique du texte, a souligné que cette Charte « a valeur constitutionnelle » et « constitue désormais la loi fondamentale devant régir les pouvoirs publics pendant la période de la Refondation ». Elle établit formellement le général Tiani comme « Président de la République, Chef de l'État », confirmant juridiquement une situation de fait établie depuis le renversement de Mohamed Bazoum.
Une transition quinquennale ajustable
La durée prévue pour cette période transitoire se distingue par son ampleur. La Charte instaure un délai de 60 mois, plaçant ainsi le Niger parmi les pays sahéliens ayant adopté les calendriers de transition les plus étendus après un changement de régime non-constitutionnel.
Le texte précise toutefois que cette durée demeure modulable « en fonction de la situation sécuritaire du Cahier des charges de la Refondation et de l'Agenda de la Confédération des États du Sahel ». Cette formulation établit un lien direct entre le processus de transition nigérien et les développements régionaux, notamment l'évolution de l'alliance formée avec le Mali et le Burkina Faso, pays également dirigés par des juntes militaires.
Contrôle renforcé sur les forces étrangères
La Charte définit un cadre strict concernant la présence militaire étrangère sur le sol nigérien, sujet particulièrement sensible depuis l'expulsion des forces françaises en 2023. Le texte institue deux mécanismes d'autorisation distincts selon les circonstances.
Dans le cadre normal, toute installation de forces étrangères devra obtenir l'approbation populaire « par voie de référendum » après consultation du « peuple souverain ». Une procédure dérogatoire est néanmoins prévue pour les situations exceptionnelles : « en cas d'urgence avérée », le Président de la République pourra accorder une autorisation par décret après consultation du Conseil consultatif de la Refondation.
Cette autorisation d'urgence reste encadrée dans le temps, sa durée ne pouvant « excéder le temps nécessaire pour stabiliser la situation ». Cette disposition semble concilier la souveraineté affichée du pays avec la possibilité de coopérations militaires ponctuelles, notamment dans le cadre de la lutte contre le terrorisme.
Socle idéologique de la transition
La Charte énumère un ensemble de valeurs présentées comme le fondement moral et politique du régime transitoire. Le texte met en avant « le patriotisme, la discipline et le civisme, l'inclusion, la solidarité, la fraternité et l'esprit de consensus, le sens de la responsabilité, de l'intégrité et de l'honneur, le sens et le respect du bien public ».
Sont également mentionnés « la tolérance, le dialogue et le pardon, la vérité, la justice, la réconciliation, la propriété, la dignité et le dialogue, le travail, l'endurance et le courage ». Cette liste extensive dessine les contours d'un projet politique présenté comme restaurateur des valeurs nationales.
Cette formalisation constitutionnelle s'inscrit dans une dynamique régionale plus large de recomposition politique au Sahel. Comme ses homologues malien et burkinabè, le pouvoir militaire nigérien cherche à consolider son assise institutionnelle tout en affirmant une rupture avec l'ordre constitutionnel antérieur, perçu comme inadapté aux défis sécuritaires et politiques de la région.
La promulgation de cette Charte marque une étape significative dans la normalisation du pouvoir issu du coup d'État de 2023, installant désormais le Niger dans une période transitoire de longue durée, potentiellement jusqu'en 2030.
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