Enlèvements d’enfants et crimes rituels : Voici les commanditaires, les auteurs et leurs mobiles

Le meurtre du petit Bouba a soulevé une vague d'indignation dans le pays

Enlèvements d'enfants et crimes rituels : Voici les commanditaires, les auteurs et leurs mobiles. Les résultats d'une enquête de Mamadi Korczak Kourouma.

La spirale de fascination pour les valeurs matérielles, les enjeux du pouvoir et autres enjeux de positionnement social, économique et politique, qui sont en réalité le ferment d'une corruption qui a des allures de gangrène, laquelle est fortement entretenue par une certaine élite intellectuelle, financière et politico-affairiste mais aussi par une jeunesse de plus en plus partisane du moindre effort, donc trop pressée d'empocher tout l'or du monde, sans absolument tenir compte des règles de préséance, sont à n'en point se tromper, la seule véritable cause qui entraîne les enfants, les albinos, les handicapés et les adultes dans la sphère mortifère de ces « hommes-démons » que l'on peut classer aisément en ces quelques catégories.

Féticheurs, devins, marabouts…

Les sorciers (féticheurs, devins, marabouts, prêtres animistes…) sont les premiers commanditaires de ces crimes de sang. Ils sont censés communiquer et communier avec l'invisible, détenir des pouvoirs occultes de toute nature capable de faire et défaire le monde. Ils ont pour unique référence le « diable ». Or, qui parle de diable fait forcement allusion au sang, à la destruction et à tout ce qui est contraire aux préceptes bibliques et coraniques qui, eux, sont d'inspiration divine. Ils ont certes la capacité de faire et défaire le monde en leur manière, mais éphémèrement.

Etienne Sagnon, l'assassin présumé du petit Bouba a dit avoir agi sur ordre d'un marabout toujours en cavale
Etienne Sagnon, l'assassin présumé du petit Bouba a dit avoir agi sur ordre d'un marabout toujours en cavale

Avant de mettre en marche leurs pouvoirs sataniques, ils font impérativement signer des pactes de sang à leurs clients. Et le respect de ce pacte qui en appelle forcement au sang est souvent un couteau à double tranchant car, quand bien même le client peut être satisfait, il n'en demeure pas moins que les conséquences souvent catastrophiques et lointaines peuvent nuire à la progéniture ou à la descendance de ce dernier c'est-à-dire à celui qui le pratique. C'est le revers de médaille. Ce qui est un autre débat à part entière.

On pourrait en dire plus sur ce point précis car nos recherches sur le phénomène depuis une dizaine d'années nous le permettent…

Politiciens, hommes d'affaires…

Les détenteurs de pouvoirs et leurs acolytes (au niveau social, politique et économique). Ne dit-on pas souvent que les périodes pré-électorales sont synonymes de psychoses généralisées au sein des populations africaines ? Inutile de m'attarder longuement sur le présent point car l'imaginaire populaire en sait largement. Les détenteurs de pouvoir social (Rois et chefs traditionnels, chefs de quartier, famille, individus…) et de pouvoir économique (Société/Entreprise, chef d'entreprise, famille, oligarchies financières, individus…) ne sont pas en marge de la spirale…

La jeunesse

Cette jeunesse est la dernière catégorie de personnes qui vient clore la marche des adeptes ou clients des rituels de sang. C'est une génération de jeunes qui se sont distingués particulièrement dans les années 2000-2010 avec le concept du « travaillement ». D'aucuns les appellent « la génération du bruit » parce qu'on les croit incapables de réfléchir positivement et que rien ne peut correctement pénétrer durablement leurs cerveaux si ce n'est de la musique DJ, d'autres la « génération Douk-Saga », «  » etc.

Férus de maquis et d'alcool, de boîtes de nuit, de belles femmes, de vêtements cossus et claquants, de véhicules cylindrés ou mondains…le tout avec un désir permanent et effréné de paraître mais malheureusement très peu travailleurs car détestent bosser dur et honnêtement pour gagner sa vie, Ils sont âgées généralement entre 15 et 26 ans maximum. Ces jeunes ne jurent que par l'argent, l'argent rapide et en quantité infinie. Ils ne se soucient point des bonnes manières, des bonnes pratiques de courage, d'honnêteté, de persévérances et des créneaux de réussite dignes.

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Trop pressés pour tout amasser, vite et sans interruption, ces jeunes qui se croient plus malins et intelligents que leurs amis, leurs aînés et même que leurs propres parents, ont trouvé dans la cybercriminalité (L'escroquerie sur internet) un refuge unique et digne. Retrouvables partout à ciel ouvert dans les communes, quartiers, secteurs, rues et familles d'Abidjan ainsi qu'à l'intérieur du pays, cette génération de jeunes cybercriminels désignés dans l'argot ivoirien par le terme de « » a connu son âge d'or sous l'ancien régime (2000-2010) où toutes les faveurs, hommages et honneurs leur avaient été rendus à tous les niveaux de l'échelle sociale et quelque fois de l'Etat à travers même des hauts dignitaires.

Cependant, avec l'avènement du nouveau régime en avril 2011 qui a aussitôt créé des services spécialisés dans la lutte anti-cybercriminalité avec des moyens importants alloués, les brouteurs ont commencé à être traqués, mis aux arrêts, jugés et emprisonnés. Cette volonté politique de l'Etat visant à endiguer et à éradiquer le phénomène de « broutage» sans exclusive par la mise en place de mécanismes et de moyens efficaces de lutte, a fortement comprimé les actions d'escroquerie de ces jeunes-là.

Traqués à tout bout de champs avec la réduction drastique de leur marge de manœuvres, ils n'ont plus eu d'autre choix que de se rabattre sur les forces occultes pour contourner un certain nombre de choses défavorables à leur plein épanouissement et se donner toutes les chances de réussir chacune de leurs opérations.

Permettez que je m'attarde sur cette dernière catégorie dont je maîtrise mieux le modus operandi et le modus vivendi, pour avoir été directeur de centre d'accueil et de prise en charge durant une dizaine d'années, donc dans une proximité totale avec les enfants, les adolescents et les jeunes.

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