29 juin 2007, le Fokker 100 présidentiel est pris pour cible. Une attaque qui visait Guillaume Soro dans un contexte de sortie de crise.
Là-dessus, il n'y a quasiment pas de doute : c'est bel et bien Guillaume Soro qui était visé dans l'attaque du Fokker 100 présidentiel, ce 29 juin 2007. Nommé il y a à peine trois mois pour conduire le processus de sortie de crise, le Premier Ministre de Laurent Gbagbo se rendait ce vendredi-là à Bouaké, pour relancer les audiences foraines, point de départ de l'identification des Ivoiriens en vue de l'élection présidentielle.
La liste de ceux qui avaient tout intérêt à voir disparaître le Secrétaire Général des Forces Nouvelles, en ces temps-là, était bien connue. Mais là n'est pas la problématique que pose cette réflexion-ci. Que se serait-il passé si les ennemis de la paix avaient réussi leur coup en éliminant le Premier ministre que le chef de l'Etat d'alors avait dû nommer au terme de l'Accord Politique de Ouagadougou ? « Si les assaillants avaient réussi leur coup, sans doute que le pays serait encore aujourd'hui plongé dans le chaos parce que, le schéma qui était en place, était tel que la guerre aurait repris », confie Ambroise Kouadio, enseignant volontaire dans le nord du pays, au moment où avait eu lieu cet attentat.
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Aujourd'hui affecté dans un établissement public du Sud-Ouest ivoirien après avoir été intégré à la Fonction publique, l'enseignant d'Histoire-Géographie en veut pour preuve ce qui s'est passé au Rwanda et au Burundi, après que les deux présidents de ces pays voisins ont péri dans l'attentat de leur avion le 6 avril 1994. « Ces deux pays ont été confrontés à l'un des monstrueux génocides de ces dernières années », éclaire Ambroise Kouadio. C'est d'ailleurs ce parallèle qu'a tenté de faire le président de l'Amicale des victimes de cet attentat, dans un entretien qu'il a accordé à un quotidien ivoirien en 2015. « Après l'attentat contre l'avion du Président Juvenal Habiarimana, il me semble qu'un attentat comme celui du 29 juin 2007 était le deuxième du genre en Afrique sinon le troisième s'il est avéré que l'avion du Président Mozambicain Samora Matchel ait été la cible d'un attentat.
Dans tous les cas, ce type d'actes est très rare et cet attentat a terriblement affecté la Côte d'Ivoire. Cette attaque se déroulait dans un contexte de sortie de crise où la violence devait disparaitre à jamais de notre pays. Le Premier Ministre partait à Bouaké pour s'adresser aux magistrats dans un territoire autrefois déclaré ‘'zone de guerre'', territoire dont la jonction avec le sud devait achever la réunification de la Côte d'Ivoire frappée par plusieurs années de crise », avait-il alors expliqué dans cet entretien.
« La tentation pour les forces loyales au Président Gbagbo de foncer sur Bouaké pour en finir avec les Forces Nouvelles devait certainement être grande. Inversement, les Forces Nouvelles, suspectant le régime en place d'avoir fait le coup, aurait peut-être renforcé ses positions. Ou, tout le moins, ils se seraient braqués et, le dialogue qui avait permis de signer l'Accord Politique de Ouagadougou, serait ainsi mort de sa belle mort. Dans ces conditions-là, pensez-vous qu'on serait allé aux élections en 2010 ? Je ne crois pas.
On serait jusqu'au jour d'aujourd'hui en plein dans un chaos indescriptible. C'est Dieu qui a sauvé la Côte d'Ivoire », se convainc un ancien correspondant de presse basé à l'époque à Bouaké. « Même là encore, on a eu de la chance que le Premier Ministre de l'époque était résolu à aller à la paix, à sortir de la belligérance, à mettre fin à la crise. Sinon, il aurait pu se convaincre que c'est le camp Ouattara dont certains membres l'on nommément accusé d'avoir trahi la lutte qui a fait le coup. Et là, il se rangeait du côté du Président Laurent Gbagbo pour combattre les gens de l'opposition de l'époque.
Ou alors, il se persuadait que c'est le chef de l'Etat Laurent Gbagbo qui venait ainsi de la rater. Là aussi, il mettait en branle ses hommes et se barricadait à Bouaké pour reprendre les hostilités. Dans tous les cas, s'il n'avait pas pris la sage décision de n'accuser personne et de ne rien faire qui puisse envenimer la situation, on serait dans une me…de incroyable jusqu'au jour d'aujourd'hui », analyse à froid cet ancien correspondant de presse. « C'est Dieu qui a voulu que je ne meure pas dans cet attentat », conclue Guillaume Soro.
C'est en juillet 2018 au Canada qu'il a tiré cette conclusion, quand des Ivoiriens vivant dans ce pays d'Amérique du Nord où il était en mission, lui ont demandé ce qui le motivait à être si engagé désormais en faveur de la paix et de la réconciliation.