Réglementation des VTC : « quel est le véritable projet du gouvernement ivoirien ? Pour qui joue-t-il ? »

An Africab company leaves the company's headquarters in Abidjan on November 14, 2016. - In bustling Abidjan, a homegrown company has tapped into the global taxi app revolution that has spawned Uber and other online transport networks. While Uber has already jumped into several African markets from South Africa to Egypt, Africab seeks to provide Ivory Coast's emerging middle class with a locally-owned high-tech and reliable travel option. (Photo by Sia KAMBOU / AFP)

Nazaire Kadia, politique ivoirien, se prononce sur la loi relative à la réglementation des VTC, objet de commentaire depuis quelques jours.

La cherté de la vie en Côte d’Ivoire, du fait de l’augmentation du prix de certaines denrées de premières nécessités, a conduit le gouvernement ivoirien à prendre des mesures à l’effet de stabiliser ce prix, et donner ainsi une bouffée d’oxygène aux populations. Si cette action du gouvernement est à saluer, quoi que n’ayant pas pu ramener les prix à leurs niveaux initiaux, on comprend difficilement d’autres mesures prises qui ne peuvent qu’accentuer la paupérisation déjà galopante.

Les différents gouvernements ivoiriens, ont mis un point d’honneur à faire de l’Ivoirien un véritable entrepreneur, (du moins dans les discours), à l’effet d’investir certains secteurs d’activités où ils sont absents. On peut à juste titre saluer cette vision, d’autant plus que ni la fonction publique, ni le secteur privé ne peuvent résorber le flot de diplômés qui sort chaque année, des universités et des grandes écoles. Ainsi des jeunes Ivoiriens, avec des moyens de bord se sont lancés dans certaines activités, mais se retrouvent du jour au lendemain freinés par des mesures incompréhensibles que prend le gouvernement, et les exemples sont légion.

On se rappelle que plusieurs personnes, jeunes en majorité, ont investi le secteur de l’importation et de la vente des véhicules d’occasion. Le secteur semblait florissant et porteur, et de nombreux emplois furent ainsi créés. Mais contre toute attente, sous le prétexte de lutter contre la pollution, une loi fut votée interdisant l’importation de véhicules de plus de cinq ans. Cette mesure inexplicable, a entrainé la fermeture de nombreuses entreprises et partant, a mis de nombreux jeunes au chômage. Les grands concessionnaires, se sont frotté les mains, n’ayant plus de concurrents en face.

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Il eut dans un passé récent, la période faste des entreprises de livraison de marchandises à moto.
Des Ivoiriens s’y sont lancés en y apportant des innovations, et tout semblait marcher à merveille. Mais comme dans la situation susmentionnée, sous le fallacieux prétexte de réglementer le secteur, l’Etat a instauré des taxes exorbitantes que de nombreuses jeunes entreprises ne pouvaient supporter. Seules les grandes, comme la Poste, ont tiré les marrons du feu. Ici aussi, à leur corps défendant, de nombreux entrepreneurs se sont retrouvés sans travail, grossissant la grande masse des chômeurs et des sans-emplois.
Le secteur de la pêche, rentrera bientôt lui aussi dans la danse. En effet, l’Etat à travers le ministère en charge de la pêche, vient de prendre une mesure unilatérale qui vise à revoir à la hausse le prix des licences de pêche.

Les prix vont du simple au double voire, au triple. Les tentatives de l’Union des Armateurs Pêche Fraiche (UAPF) pour une concertation avec l’autorité de tutelle, se sont heurtées à un mur. Les anciennes licences courent jusqu’au 31 mai 2022. Et passée cette date, il va sans dire que des armateurs mettront la clé sous le paillasson, en mettant des ouvriers au chômage.

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Mais bien pire, il est à craindre une augmentation du prix du poisson sur le marché.
La dernière décision qui fait du bruit actuellement, est celle relative au mode de transport VTC (voiture de tourisme avec chauffeur, ou voiture de transport avec chauffeur). Des ivoiriens qui se sont lancés dans cette activité, vont être encore freinés par une mesure que vient de prendre le gouvernement.

Les voitures les plus usitées dans ce secteur sont de faible puissance, 60 chevaux et d’un coût abordable. Désormais, il est fait obligation à ceux qui veulent continuer dans ce mode de transport, d’avoir des véhicules de puissance élevée, 114 chevaux et bien entendu, plus cher.

Que vont devenir ces entrepreneurs qui ont investi leur économie dans ce secteur, et dont certains n’ont pas encore amorti les prêts contractés auprès des banques ?
A quoi répond cette mesure ?
Les consommateurs se sont-ils plaints de la qualité des véhicules utilisés ?
Au demeurant, à quoi servirait une voiture puissante dans une ville où la circulation n’est jamais fluide et l’embouteillage, le quotidien de tous et dans tous les quartiers ?

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C’est vraiment le lieu de s’interroger sur ces différentes mesures du gouvernement.
Pourquoi s’échine-t-il à chasser les petits entrepreneurs des secteurs, qui ont investi ou souvent innové, au profit de grosses structures ou même des multinationales ?
On ne peut pas d’une part demander aux jeunes de créer des entreprises et partant des emplois, et d’autre part mettre en place une réglementation pour les éjecter du système.

Quel est le véritable projet du gouvernement ? Pour qui joue-t-il ?
Tout porte à croire, que le gouvernement ne sent à l’aise que lorsque lui parviennent, les pleurs, les gémissements et les complaintes du peuple qui croule sous le poids de la misère.

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L’étau de la pauvreté qui étreint le peuple, étouffe doublement des entrepreneurs qui malgré eux mettent la clé sous le paillasson.
Ainsi va la Côte d’Ivoire, et Dieu reconnaitra les siens !
Mais s’il y a eu un matin en Eburnie, il y aura assurément un soir et l’ivraie sera séparée du vrai.

Nazaire Kadia

Written by Christian Binaté

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