« Le pays où tout le monde veut être milliardaire, » un regard de Venance Konan sur la société ivoirienne d'aujourd'hui menée par les pasteurs escrocs, les influenceurs…
Ces réflexions ci-dessous sont de mon ami Koulibali Lassina, entrepreneur à Korhogo, qui m'a aimablement autorisé à les reproduire. « Le douanier veut devenir milliardaire. Le policier sur la route veut devenir milliardaire. L'agent des eaux et forêts chargé de la surveillance de la faune et de la flore veut devenir milliardaire. L'agent du fisc, l'agent des finances veulent devenir milliardaires. Les politiciens veulent devenir milliardaires car dans la conscience populaire tous les ministres sont multi-milliardaires. Les fonctionnaires, pour la plupart veulent tous devenir milliardaires car ils ont vu de rares collègues le devenir par des pratiques douteuses.
Les adolescents et les jeunes aussi sont très pressés. Ils disent que les études sont longues et ennuyeuses comme le pensent leurs stars de la chanson. Ils deviennent donc des dealers, des arnaqueurs sur internet ou font des rituels diaboliques bizarres et ahurissants pour devenir milliardaires. Les jeunes filles ont vu la miss et ses dauphines recevoir des cadeaux, voitures, bijoux et honneurs. Alors les jeunes filles se disent que la beauté devrait leur permettre d'atteindre leur « paradis. » Certaines influenceuses ont dit aux jeunes filles qu'avec la seule beauté ou peut tout obtenir…alors les jeunes filles ont commencé à gérer des organes de la virilité pour devenir milliardaires.
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Les journalistes veulent devenir milliardaires, alors ils écrivent des articles dithyrambiques pour les plus offrants. Les professeurs d'université veulent devenir milliardaires. Alors ils sont dans la flatterie pour intégrer les cabinets ministériels. Les fils du pays partis en occident donnent l'illusion d'être devenus milliardaires en publiant de belles photos. Les jeunes restés au pays qui n'ont aucun réseau pour devenir milliardaires se disent donc qu'il faut traverser la Méditerranée pour devenir rapidement milliardaires.
Il paraît que l'or rend riche. Le pays se transforme donc en un vaste chantier d'orpaillage. On creuse, on pollue l'eau, on coupe les arbres un peu partout, car il faut devenir rapidement milliardaires. Bientôt certains creuseront même dans leur propre salon pour dénicher la grosse pépite. Des escrocs se transforment en religieux ; des bouffons de cyber-activistes qui changent de camp selon la consistance de l'enveloppe, des chanteurs vociférateurs au Q.I. que n'envierait pas un porc, passent pour être les nouveaux leaders, les nouveaux baromètres « intellectuels ». Tout le monde veut sa part de milliards. »
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Je ne sais pas de quel pays parle mon ami Koulibali Lassina, peut-être de la Guinée où tout se compte en milliard, mais ça ressemble furieusement au pays mien qui est justement voisin de la Guinée. Je ne sais pas trop si nous réalisons les conséquences de cette course effrénée à l'enrichissement en vitesse sur nos vies individuelles, sur notre pays. Réalisons-nous que nous avons détruit notre pays, et que nous n'en avons pas un autre pour le remplacer ?
Un peu partout sur le globe, l'homme détruit tout pour de l'or. L'or qui ne se mange pas, qui n'a de valeur que celle que l'homme lui a donnée. J'ai entendu à la radio que les forêts amazoniennes sont en train de partir de plus en plus en fumée parce qu'on y compte les incendies en milliers chaque année. Toutes les forêts sont en train d'être détruites partout dans le monde. Nous en connaissons tous les conséquences mais cela ne nous dissuade pas. Chez nous, ce sont les terres, les rivières et les fleuves que nous détruisons pour trouver de l'or. Après avoir déjà saccagé nos forêts. Parce que nous voulons tous devenir milliardaires.
Aujourd'hui ce sont les orpailleurs, les pasteurs escrocs, les cyber-activistes tout aussi escrocs, les influenceurs et influenceuses aux Q.I. que n'envierait pas un porc comme le dit Lassina, ou qui ne réfléchissent qu'avec leurs fesses parfois disproportionnées qui mènent notre société. C'est notre nouvelle intelligentsia. C'est leurs compagnies que recherchent nos princes. Ce sont eux qui les inspirent.
Honnêtement, j'ai peur pour notre cité, aussi développée sera-t-elle, si nous ne changeons pas de logiciel, si nous n'inculquons pas d'autres valeurs à côté de la recherche de la richesse qui en soit, n'est pas une mauvaise chose. Ce qui devrait changer, est la manière de chercher à acquérir cette richesse.
