C'est un vrai scandale : l'Etat de Côte d'Ivoire a accepté de se porter garant dans un prêt de 179 milliards FCFA, au profit de l'entreprise burkinabé Ebomaf. Le décret a été signé par le président de la République lui-même, Alassane Ouattara et l'annonce a été faite en conseil des ministres. Jusque-là, rares sont les entreprises ivoiriennes qui ont bénéficié d'un tel avantage. Scandale Ebomaf Côte d'Ivoire.
L'annonce est passée, ce mercredi 18 juillet 2018, à l'issue du conseil des ministres sans que la plupart de ceux qui prennent le temps de lire en intégralité ce communiqué, s'en aperçoivent. C'était le premier compte-rendu de conseil des ministres, lu par le nouveau porte-parole du gouvernement, Sidi Tiémoko Touré.
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« Le Conseil a adopté un décret portant garantie de la République de Côte d'Ivoire pour un montant de 274 millions d'euros, soit 179.73 milliards FCFA, relative au prêt consenti par la Banque africaine d'Import-Export (Afreximbank), en qualité de prêteur et agent pour le compte des prêteurs, au profit de l'entreprise Ebomaf, en vue de la construction de 224 kilomètres d'infrastructures routières ».
« le communiqué n'a pas précisé s'il s'agissait de routes à réhabiliter, à construire ou même si ce projet devrait être réalisé en Côte d'Ivoire »
Le communiqué n'en dit pas plus. Mais ce que ce communiqué ne dit pas, nous l'avons trouvé pour vous. En réalité, l'affaire goupillée par le ministre des Affaires étrangères Marcel Amon-Tanoh et supervisée personnellement par le premier ministre Amadou Gon Coulibaly est un vrai cadeau accordé à Ebomaf.
Scandale Ebomaf Côte d'Ivoire
Mais Ebomaf n'est pas n'importe quelle entreprise. Ebomaf est une entreprise burkinabé, appartenant à l'homme d'affaires Mahamadou Bonkoungou. Le richissime patron burkinabé est proche du vice-président Daniel Kablan Duncan à qui il a été présenté en 2015. En 2016, grâce à Duncan, il recevait son premier « cadeau » : des travaux de réhabilitation de 200 km de route, dans le nord du pays, pour 87 milliards FCFA.
En 2016, le procédé était quasiment similaire. L'Etat de Côte d'Ivoire a donné un mandat pour une levée de fonds à la Société générale de banques en Côte d'Ivoire (SGBCI), en vue de financer le projet en faveur d'Ebomaf. Du côté de Duncan, l'on indique que l'homme d'affaires burkinabé lui a été imposé par le palais, alors qu'il était premier ministre.
Une chose est certaine, dans ses voeux de fin d'année 2015, Bonkoungou s'est montré ravi d'avoir pu rafler plusieurs contrats en Côte d'Ivoire. « Nous avons une fois de plus accompli de belles et grandes réussites ayant davantage conforté la position de Ebomaf dans la région ouest-africaine. La confiance des partenaires, la fidélité des collaborateurs et le dévouement des employés ont favorisé la conquête d'autres horizons. En plus de nouveaux marchés et contrats conclus au cours de l'année dernière, notre brillante entrée dans le BTP ivoirien avec l'attribution d'importants travaux de construction de routes modernes a été remarquable de toutes parts », avait-il déclaré.
Une chose à faire remarquer : le communiqué n'a pas précisé s'il s'agissait de routes à réhabiliter, à construire ou même si ce projet devrait être réalisé en Côte d'Ivoire. En effet, en juin 2018, alors que le président libérien Georges Weah, ami de l'homme d'affaires burkinabé avait fait un détour par Abidjan, Ebomaf a raflé un marché de 234 milliards FCFA, pour la construction de 260 km de route, à travers le pays. Un rapport avec ce prêt garanti par l'Etat de Côte d'Ivoire ? Rien n'est moins sûr.
Emmanuel Gautier
Des mercenaires burkinabé pro-Ouattara menacent à Ouaga (Observateur Paalga)