« Woubi » en danger à Abidjan : le cri d’alarme des LGBTIQ ivoiriens

Homosexualité
Homosexualité © Crédit Photo DR

Dans les rues d’Abidjan, le mot « woubi » résonne comme un appel à la haine. La communauté LGBTIQ en Côte d’Ivoire appelle dans une déclaration aide.

« J’ai peur de sortir de chez moi. » Aïcha, 23 ans, transgenre, vit recluse dans son petit appartement d’Adjamé depuis des semaines. Sur son smartphone, les messages de haine s’accumulent. « Sale woubi, on va te tuer », peut-on lire entre autres menaces. Aïcha n’est pas un cas isolé. À travers toute la Côte d’Ivoire, la communauté LGBTIQ vit dans la crainte.

Le 5 septembre 2024, dix organisations de défense des droits humains ont lancé un cri d’alarme. Leur déclaration commune dresse un tableau sombre : discours haineux en ligne, agressions dans la rue, discriminations quotidiennes. Le paradoxe est frappant. Sur le papier, la Côte d’Ivoire dispose d’un arsenal juridique protecteur. L’article 2 de la Constitution garantit l’égalité de tous les citoyens. Le code pénal punit la discrimination. Pourtant, la réalité est tout autre.

« C’est comme si ces lois n’existaient pas pour nous », confie Marc, militant au sein de l’association All Inside Côte d’Ivoire. « Quand on va porter plainte, on nous rit au nez. Parfois, ce sont même les policiers qui nous insultent. » Cette impunité alimente un cercle vicieux de violence.

Sur les réseaux sociaux, la haine se propage à vitesse grand V. Des vidéos appelant à « nettoyer » le pays des « woubi » cumulent des millions de vues. « C’est devenu un phénomène de mode », déplore Sylvie, psychologue spécialisée dans l’accompagnement des personnes LGBTIQ. « Certains influenceurs ont compris qu’ils pouvaient gagner en popularité en nous prenant pour cible. »

Face à cette vague de violence, les autorités semblent dépassées. Ou indifférentes ? « Nous avons interpellé le gouvernement à maintes reprises », explique Kouamé, porte-parole du collectif à l’origine de la déclaration. « Mais les réponses se font attendre. Pendant ce temps, des vies sont en danger. »

L’appel des organisations LGBTIQ ne se limite pas aux autorités. Il s’adresse à l’ensemble de la société ivoirienne. « Aujourd’hui, c’est nous. Demain, qui sera la prochaine cible ? », s’interroge Kouamé. Une question qui résonne comme un avertissement dans un pays encore marqué par les cicatrices de conflits passés.

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Au-delà des frontières ivoiriennes, cette situation inquiète. Amnesty International a récemment pointé du doigt « l’inaction coupable » des autorités face aux violences anti-LGBTIQ. L’organisation appelle à des mesures urgentes pour protéger cette communauté vulnérable.

Malgré ce climat hostile, des lueurs d’espoir persistent. Des initiatives citoyennes émergent pour promouvoir l’acceptation et le dialogue. Dans certains quartiers d’Abidjan, des « cafés de la diversité » voient le jour. L’idée ? Créer des espaces de rencontre et d’échange entre personnes LGBTIQ et le reste de la population.

« C’est en se parlant qu’on brise les préjugés », affirme Mariam, bénévole dans l’un de ces cafés. « Quand les gens réalisent que nous sommes juste des êtres humains comme eux, avec nos joies et nos peines, quelque chose change dans leur regard. »

Le chemin vers l’acceptation reste long. Mais pour Aïcha, Marc, et tous les « woubi » de Côte d’Ivoire, l’espoir demeure. « Nous ne demandons pas de privilèges », conclut Kouamé. « Juste le droit de vivre en paix, comme n’importe quel citoyen de ce pays. » Un appel à l’humanité qui, espèrent-ils, finira par être entendu.

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Written by Mohammed Ouattara

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