Nous vous proposons le discours d'Aboudramane Sangaré, qui s'est prononcé sur les récentes élections locales boycottées par lui et ses partisans.
La Côte d'Ivoire a vécu, à l'occasion des élections municipales et régionales couplées du 13 octobre dernier, une autre page sombre de son histoire. Au sortir de ces scrutins au forceps, malgré les appels incessants des forces vives de la Nation et de la communauté internationale en vue d'une réforme consensuelle du cadre institutionnel et juridique des élections en Côte d'Ivoire, le bilan est lourd et de nature à brouiller l'espoir des Ivoiriens de voir enfin se mettre en place un système électoral crédible et rassurant.
De ce lourd bilan, on déplore au moins cinq (05) morts, notamment dans les communes de Séguéla, Lakota et Abobo, des centaines de blessés et des dégâts matériels importants dans la plupart des circonscriptions électorales aussi bien à Abidjan qu'à l'intérieur du pays.
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Sur le plan de l'organisation, ces scrutins couplés ont été émaillés de plusieurs anomalies dont des manipulations inconsidérées de résultats, le manque d'ancre indélébile dans plusieurs bureaux de vote, un déficit inexplicable de stickers sur les bulletins de vote, des procès verbaux falsifiés, des bourrages d'urnes, des convoyages irréguliers de votants, des intimidations de toute sorte et des achats de consciences des électeurs et autres scrutateurs y compris la corruption des agents des CEI locales.
Le Front Populaire Ivoirien qui a vécu avec peine et tristesse ces tragiques événements, s'incline, avec respect, devant la mémoire de ces innocentes personnes, injustement arrachées à l'affection de leurs parents et exprime toute sa compassion et sa solidarité aux familles éplorées.
Le Front Populaire Ivoirien souhaite un prompt rétablissement aux nombreux blessés, déplore les dégâts matériels et condamne, avec force, l'indifférence méprisante et coupable des tenants du pouvoir face à cette situation qui humilie et déshonore la Côte d'Ivoire.
C'est pour prévenir une issue tragique à des élections où le drame le dispute au désespoir et qui auraient pu éviter à des Ivoiriens de verser encore des larmes d'amertume, que le Front Populaire Ivoirien, après le reniement de la parole donnée du 05 septembre 2018, n'a eu de cesse d'appeler le Chef de l'Etat et son gouvernement à se ressaisir, à faire preuve de responsabilité en reportant les élections du 13 octobre 2018 et à ouvrir, sans attendre, des discussions avec l'ensemble de la classe politique et la société civile sur la réforme de notre système électoral, conformément à la décision de la Cour Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples.
« le pouvoir a fait le choix, encore une fois, de la manipulation et du braquage éhonté des élections locales »
Mais contre tout bon sens et dans une démarche solitaire et dénuée de toute responsabilité, en lieu et place de la raison et de la légitimité démocratique, le pouvoir a fait le choix, encore une fois, de la manipulation et du braquage éhonté des élections locales, en violation de ses engagements internationaux.
Ne pouvant s'associer à ces voies de faits dont les conséquences prévisibles endeuillent à nouveau le peuple ivoirien et expose le pays tout entier à des périls certains, le Front Populaire Ivoirien, dans son adresse du 10 octobre 2018, a demandé, en toute légitimité et avec responsabilité, à tous ses militants et sympathisants partout sur l'ensemble du territoire, à tous les démocrates et à l'ensemble des ivoiriens, de s'abstenir de prendre part à ces élections-piège du 13 octobre 2018.
Le Front Populaire Ivoirien, parti d'élection, conformément à son devoir de cohérence, en réclamant, depuis toujours, une CEI conforme aux normes démocratiques, ne fait que mettre en avant les intérêts des Ivoiriens ainsi que leurs droits à choisir librement leurs dirigeants à travers des élections transparentes, impartiales, inclusives et crédibles.
« le Front Populaire Ivoirien de féliciter et de remercier ses militants, ses sympathisants et à l'ensemble du peuple de Côte d'Ivoire pour avoir respecté et suivi son mot d'ordre de boycott »
Encore une fois, les nombreuses pertes en vie humaine, les irrégularités au-delà de la raison constatées au cours de ces scrutins locaux et les innombrables dégâts matériels qu'ils ont occasionnés fondent la démarche du FPI, de ses militants et des démocrates ivoiriens qui se sont tenus, avec lucidité, loin de cette mascarade.
C'est le lieu pour le Front Populaire Ivoirien de féliciter et de remercier ses militants, ses sympathisants et à l'ensemble du peuple de Côte d'Ivoire pour avoir respecté et suivi son mot d'ordre de boycott de ces élections dont l'organisation, volontairement bâclée, ne grandit pas leurs organisateurs qui ont démontré ainsi à la face du monde leur volonté de confisquer le pouvoir par tous les moyens.
« Le Front Populaire Ivoirien reste convaincu que c'est au travers d'élections organisées dans un cadre consensuel, apaisé et véritablement démocratique que le prochain chef de l'exécutif ivoirien qui en sortira pourra œuvrer à la cohésion sociale »
Face à cette option suicidaire d'exclusion prise par le régime actuel et la volonté clairement affichée du Chef de l'Etat de confisquer le pouvoir au profit de son clan, le Front Populaire Ivoirien, tout en exprimant à nouveau son indignation et sa tristesse pour la Côte d'Ivoire, réitère son appel au rassemblement qu'il a lancé en direction du peuple de Côte d'Ivoire dans toute sa diversité, à l'ensemble des forces sociales et politiques, en vue de la bataille commune et salvatrice pour la réforme effective et, sans attendre, du cadre institutionnel et juridique des élections en Côte d'Ivoire.
Le Front Populaire Ivoirien reste convaincu que c'est au travers d'élections organisées dans un cadre consensuel, apaisé et véritablement démocratique que le prochain chef de l'exécutif ivoirien qui en sortira pourra œuvrer à la cohésion sociale, à la réconciliation des Ivoiriens et au développement durable de la Côte d'Ivoire.
Fait à Abidjan, le 18 octobre 2018
Pour le FPI, le Président par intérim
Aboudramane Sangaré