International Crisis Group se penche sur la présidentielle ivoirienne 2020, qui suscite de nouvelles violences à un mois de l'élection.
Dans un contexte où de nombreuses personnalités ivoiriennes comprennent de plus en plus difficilement que les partenaires occidentaux arbitrent leurs désaccords 60 ans après les indépendances, la diplomatie africaine est aujourd'hui la mieux placée pour soutenir ces efforts de dialogue. Le format de la mission conjointe entre la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest, l'Union africaine (UA) et les Nations unies qui devait séjourner à Abidjan du 21 au 25 septembre a été modifié, à la demande des autorités ivoiriennes. Finalement, seules les Nations unies se sont rendues en Côte d'Ivoire.
Il serait bon que les autorités ivoiriennes reconsidèrent leur position et acceptent, au plus vite, un accompagnement régional et continental sous la forme d'une délégation réunissant ces trois institutions. D'autres acteurs africains, dirigeants de pays voisins, chefs d'Etats ayant volontairement quitté le pouvoir ou responsables d'institutions internationales comme l'Organisation internationale de la Francophonie pourraient, elles aussi, intervenir. Leur objectif serait de convaincre les protagonistes de la crise ivoirienne de s'entendre sur un report concerté de l'élection et l'organisation d'un dialogue national.
Si rien ne change et que le scrutin se tient malgré tout dans les conditions de défiance actuelles, le vainqueur souffrirait presque inévitablement d'un déficit de légitimité aux yeux de ses opposants et d'une partie de la population. Il serait, dans tous les cas, un président mal élu, issu d'un scrutin qui sera peut-être boycotté par certains ou, pour le moins, dont les règles seront rejetées par la quasi-totalité de ses adversaires.
Le vainqueur pourra difficilement se présenter comme le président de tous les Ivoiriens et héritera d'un pays extrêmement difficile à gouverner. Les effets du tour de vis sécuritaire qu'il pourrait être tenté de mettre en place pour asseoir son pouvoir et l'exclusion de plusieurs courants et figures majeurs de la vie politique risquent, à un moment ou à un autre, de provoquer des violences politiques et intercommunautaires. Dans un contexte régional et économique tendu, il devra, en outre, gérer les conséquences d'une nouvelle crise sur des forces de sécurité dont l'unité reste fragile et réactive aux tensions politiques.
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Le report de l'élection, même de courte durée, la construction d'un dialogue et l'éventuel transfert de pouvoir à une nouvelle génération de responsables politiques constituent des objectifs certes ambitieux, mais à la mesure de l'enjeu. La probabilité que cette élection accouche, en l'état, d'une crise grave est élevée. Il incombe à l'ensemble des acteurs politiques ivoiriens, épaulés par des personnalités et des institutions africaines, de faire tout leur possible pour l'éviter.