Légalisation de la polygamie en Côte d’Ivoire : une grave atteinte à la dignité de la femme pour Boga Sako

Déclaration de la FIDHOP de Boka Sako relative à une éventuelle légalisation de la polygamie en Côte d’Ivoire.

𝟭- 𝗗𝗘 𝗟𝗔 𝗝𝗨𝗦𝗧𝗜𝗙𝗜𝗖𝗔𝗧𝗜𝗢𝗡 𝗗𝗘 𝗟𝗔 𝗣𝗥𝗢𝗣𝗢𝗦𝗜𝗧𝗜𝗢𝗡 𝗗𝗘 𝗟𝗢𝗜

Au cours d’une conférence de presse tenue à Abidjan, le jeudi 7 Juillet dernier, le Député de Koumassi, Yacouba Sangaré, auteur de la proposition de loi, qui était entouré de trois de ses collègues, a martelé :
« Il est temps de mettre fin à l’hypocrisie et de briser le tabou de la polygamie, qui est pourtant une pratique réelle et courante dans nos sociétés africaines. »

Justifiant ainsi sa proposition de loi qui «institue une polygamie optionnelle, laissée au libre choix de chaque citoyen et de chaque citoyenne. »
Car pour cet élu du peuple (et ses collègues), depuis l’adoption en 1964 du Code civil ayant légalisé le mariage monogamique et malgré une vaste campagne de promotion de la famille nucléaire, « le nombre de polygames se compte dans toutes les couches de notre société. Cela prouve que cette loi est inadaptée aux réalités africaines. »

Ce qui expliquerait que des pays tels que le Gabon, le Cameroun, l’Afrique du Sud, le Sénégal, la Mali, le Congo, la RCA, le Kenya, etc., se soient dotés de lois consacrant la polygamie.

𝟮- 𝗗𝗘 𝗟𝗔 𝗟𝗘𝗚𝗘𝗥𝗘𝗧𝗘 𝗗𝗘𝗦 𝗔𝗥𝗚𝗨𝗠𝗘𝗡𝗧𝗦 𝗔𝗩𝗔𝗡𝗖𝗘𝗦

La FIDHOP (la Fondation Ivoirienne pour l’observation et la surveillance des Droits de l’Homme et de la vie politique), à travers sa Cellule juridique, note que les arguments avancés par le Député Yacouba Sangaré sont d’une légèreté criante, comparés aux atteintes graves que cette proposition porte à la Dignité de la Femme !
La FIDHOP résume en effet ces arguments en deux points : l’inadaptation de la monogamie en société africaine, donc en Côte d’Ivoire ; et la liberté donnée au citoyen de choisir entre la monogamie et la polygamie.

𝗟’𝗜𝗻𝗮𝗱𝗮𝗽𝘁𝗮𝘁𝗶𝗼𝗻 𝗱𝗲 𝗹𝗮 𝗺𝗼𝗻𝗼𝗴𝗮𝗺𝗶𝗲 𝗲𝗻 𝘀𝗼𝗰𝗶𝗲́𝘁𝗲́ 𝗮𝗳𝗿𝗶𝗰𝗮𝗶𝗻𝗲 ?

Invoquer l’inadaptation de la monogamie en Afrique, signifie que l’auteur d’une telle proposition n’a pas conscience que la société dans laquelle il a été élu a considérablement évolué : nous sommes au XXIème Siècle et les sociétés africaines ne sont plus primitives, ni traditionnelles, mais modernes !
Aussi dans notre monde moderne, qui est désormais globalisé, des principes universellement admis s’imposent-ils à chaque peuple et à chaque culture.

Ainsi, la Femme, qui avait toujours été reléguée au rang d’inférieure à l’homme dans la plupart des sociétés humaines, est désormais égale à l’homme, tel que le proclame la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme adoptée le 10 Décembre 1948, sous l’égide des Nations Unies, en son Article premier :
« 𝗧𝗼𝘂𝘀 𝗹𝗲𝘀 𝗲̂𝘁𝗿𝗲𝘀 𝗵𝘂𝗺𝗮𝗶𝗻𝘀 𝗻𝗮𝗶𝘀𝘀𝗲𝗻𝘁 𝗹𝗶𝗯𝗿𝗲𝘀 𝗲𝘁 𝗘𝗚𝗔𝗨𝗫 𝗲𝗻 𝗗𝗶𝗴𝗻𝗶𝘁𝗲́ 𝗲𝘁 𝗲𝗻 𝗗𝗿𝗼𝗶𝘁𝘀. »

Dès lors, la Femme, qu’elle soit Africaine, Européenne, Américaine ou Asiatique, ne devrait plus être regardée sous le prisme d’une tradition ou d’une culture ou d’une religion ; mais en tant qu’une personne humaine, de même dignité que l’homme et jouissant des mêmes droits que lui !

𝗟𝗮 𝗟𝗶𝗯𝗲𝗿𝘁𝗲́ 𝗱𝗼𝗻𝗻𝗲́𝗲 𝗮𝘂 𝗖𝗶𝘁𝗼𝘆𝗲𝗻 𝗱𝗲 𝗰𝗵𝗼𝗶𝘀𝗶𝗿 ?

Cette liberté, au lieu d’être perçue comme une possibilité ou une option, est plutôt dangereuse ! Parce qu’elle créerait un précédent grave, en ouvrant la porte à d’autres fantasmes ou folies, notamment chez les êtres masculins.

Ainsi, si la loi peut donner à l’homme le droit d’épouser plus d’une femme, s’il le veut, sous prétexte que c’est une réalité dans la société ivoirienne, alors on pourrait s’attendre aussi à ce qu’un jour un autre député propose l’usage du fouet par le mari polygame, puisque ceci était aussi une caractéristique de nos sociétés traditionnelles.
Bien plus ! Si on légalise la polygamie optionnelle, pourquoi ne devrait-on pas légiférer également, de façon optionnelle, sur les cas des lesbiennes, des gays, des bisexuels et transsexuels (LGBT), donnant ainsi la liberté à chacune et à chacun de choisir le mode de sexualité qui lui est convenable ?

Parce que ces pratiques sont aussi des réalités de notre société africaine d’aujourd’hui, que nous nous refusons d’admettre avec nos yeux de censeurs culturels ou religieux.

𝟯- 𝗗𝗘 𝗟𝗔 𝗗𝗜𝗚𝗡𝗜𝗧𝗘 𝗘𝗧 𝗗𝗘𝗦 𝗗𝗥𝗢𝗜𝗧𝗦 𝗗𝗘 𝗟𝗔 𝗙𝗘𝗠𝗠𝗘 𝗕𝗔𝗙𝗙𝗢𝗨𝗘𝗦 !

Pourquoi vouloir légaliser une polygamie, qui est souffrances et discrimination pour la femme ?
Si la polygamie peut être profitable pour le mari, à n’en point douter elle constitue des souffrances pour la femme, ainsi que pour les enfants. Tant sur les plans psychologique et moral, qu’au plan physique.

C’est justement au regard de toutes ces pratiques contre la gent féminine – parmi lesquelles la polygamie et ses conséquences sur la femme – qu’il a été adopté à New York, le 18 Décembre 1979, par l’Assemblée Générale de l’ONU, « la Convention sur l’élimination de toutes formes de discrimination à l’égard des femmes ». Qui engendrera plusieurs autres instruments internationaux pertinents.

Et la Côte d’Ivoire a librement ratifié cet important texte révolutionnaire, par le Décret n°95-672 du 6 Septembre 1999 portant ratification de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes.

Ainsi, dans la Constitution ivoirienne du 8 Novembre 2016, le Peuple souverain de Côte d’Ivoire a proclamé en bien de dispositions l’égalité en dignité et en droit de l’homme et de la femme, et de protéger les femmes contre toutes discriminations basées sur leur sexe.

𝗖’𝗲𝘀𝘁 𝗽𝗼𝘂𝗿𝗾𝘂𝗼𝗶 𝗹𝗮 𝗙𝗜𝗗𝗛𝗢𝗣 𝗰𝗼𝗻𝗱𝗮𝗺𝗻𝗲 𝗹𝗮 𝗽𝗿𝗼𝗽𝗼𝘀𝗶𝘁𝗶𝗼𝗻 𝗱𝗲 𝗹𝗼𝗶 !

Considérant qu’une loi portant polygamie optionnelle constituerait un grave recul de la Côte d’Ivoire en matière de protection et de promotion des Droits de l’Homme, notamment des Droit de la Femme ;

Vu qu’une telle loi sur la polygamie consacrerait des discriminations à l’égard des femmes ivoiriennes et une violation flagrante de la Convention sur l’élimination de toutes formes de discrimination à l’égard des femmes, et des textes subséquents auxquels la Côte d’Ivoire est partie ;

Vu que cette proposition du député de Koumassi porte gravement atteinte à la Dignité et aux Droits de la Femme ivoirienne ;

La FIDHOP condamne et réfute cette proposition de loi portant polygamie optionnelle en Côte d’Ivoire !

La FIDHOP demande à tous les Honorables Députés de la Nation de déclarer ce texte non recevable.

La FIDHOP suggère au Président de la République, garant de la Constitution, de s’en remettre au Peuple souverain, au cas où le parlement voterait pareille loi, par l’organisation d’un référendum.

Fait à Abidjan, le 12 Juillet 2022
𝗗𝗿 𝗕𝗢𝗚𝗔 𝗦𝗔𝗞𝗢 𝗚𝗘𝗥𝗩𝗔𝗜𝗦
𝗣𝗿𝗲́𝘀𝗶𝗱𝗲𝗻𝘁-𝗙𝗼𝗻𝗱𝗮𝘁𝗲𝘂𝗿 𝗱𝗲 𝗹𝗮 𝗙𝗜𝗗𝗛𝗢𝗣 𝗘𝗻𝘀𝗲𝗶𝗴𝗻𝗮𝗻𝘁-𝗖𝗵𝗲𝗿𝗰𝗵𝗲𝘂𝗿 𝗮̀ 𝗹’𝗨𝗻𝗶𝘃𝗲𝗿𝘀𝗶𝘁𝗲́

Written by Dr Boga Sako

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