Sanctions de la CEDEAO contre le Mali: Venance Konan recadre l’abbé Abekan

Venance Konan, journaliste ivoirien et ancien DG de Fraternité Matin
Venance Konan, journaliste ivoirien et ancien DG de Fraternité Matin © Crédit photo DR

Venance Konan apporte une réponse à l'abbé Abekan suite à sa sortie contre les sanctions contre Poutine et celles de la CEDEAO contre le Mali.

Depuis quelque temps un texte intitulé « Vous avez dit solidarité ? » signé de l'abbé Norbert-Eric Abekan, secrétaire exécutif national de la commission épiscopale justice, paix et environnement circule sur la toile. Que dit-il ? Je vous le livre en intégralité : « Là-bas, j'ai vu les pays de l'Europe, unis tels les cinq doigts de la main. Soutenant l'Ukraine en danger. J'ai vu qu'ils étaient blancs et noirs ensemble fuyant la mort. Mais seuls les blancs ont eu droit à monter dans le train du salut. Et les Noirs ? Les Noirs, d'accord ! Mais les Blancs d'abord ! Les Noirs peuvent crever sous les bombes qui tonnent dans l'Ukraine. Vous avez dit solidarité ?

Ici j'ai vu les pays de la , unis tels les cinq doigts de la main délaissant un pays frère, le Mali. Le Mali croupissant et gémissant sous les bombes de l'embargo. Ah, mon Dieu ! Vous avez dit Solidarité ? A quand le réveil de l'Afrique ? L'Afrique de la solidarité vraie et active loin des discours de propagande et des slogans creux. Oui, ils étaient Noirs et Blancs ensemble fuyant la mort. Mais seuls les Blancs ont eu droit à monter dans le train du salut.

Et les Noirs ? Mais que les Noirs crèvent sous les bombes de l'indifférence et du mépris. Les Noirs étaient des chairs à canon ou mieux, les Noirs, les muscles à faire tourner leurs usines. Vous avez dit solidarité ? »

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En d'autres temps ce gentil poème nous aurait laissé indifférent, mais compte tenu de la qualité et de l'audience de son auteur, je me permets de vous livrer les sentiments qu'il m'inspire. Si j'ai bien compris l'abbé Abékan, il nous dit que les Blancs, eux, sont solidaires entre eux, et, dans le cas actuel, contre nous Noirs, alors que nous, Noirs, ne le sommes pas, comme nous le démontrons au Mali. Je voudrais expliquer à l'abbé que la guerre qui déchire l'Europe en ce moment et monopolise toute l'actualité n'oppose pas un peuple blanc à un autre peuple d'une autre couleur, mais bien deux pays de Blancs, deux pays voisins. Les bombes sont tirées par les Russes sur un peuple, qui, pour une grande partie, parle aussi le russe. Donc en matière de solidarité, on ne peut pas dire que les Blancs sont plus solidaires que nous. Pour le moment ce sont eux qui s'entretuent.

Nous, Noirs, avons-nous manqué de solidarité envers le Mali ? Je n'accuserai pas l'abbé de mauvaise foi, mais peut-être de méconnaissance d'une situation. Au Mali, des djihadistes d'un autre âge, parmi lesquels on trouve majoritairement des Maliens, sont en train de massacrer les populations civiles. L'Afrique, contrairement à ce qu'écrit l'abbé s'est mobilisée pour le Mali. L'abbé sait-il le nombre de soldats tchadiens tombés au Mali ?

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Sait-il que des soldats ivoiriens sont aussi morts au Mali en luttant contre le terrorisme dans le cadre de la force internationale ? Sait-il qu'il y a quelques jours des soldats égyptiens sont morts au Mali dans le même cadre ? De quel manque de solidarité parle l'abbé ? Il parle des sanctions contre le Mali ? Expliquons au bon abbé que lorsque les militaires ont renversé le pouvoir élu, la CEDEAO s'était montrée disposée à les aider. Elle leur a donné un temps pour qu'ils proposent un calendrier réaliste de retour à l'ordre constitutionnel, étant entendu que le coup d'Etat crée juste une situation qui ne peut qu'être provisoire.

Le Mali est membre de la CEDEAO et en connaît les règles. Les militaires ont proposé de rester cinq ans au pouvoir, c'est-à-dire le temps d'un mandat, avant de songer à organiser des élections. Qui les a élus ? L'abbé est-il d'accord pour que des gens sortis de nulle part s'emparent du pouvoir par la force de leurs armes et s'y éternisent ? L'Afrique avait connu cela par le passé et nous savons ce que cela nous a coûté. Plus personne ne veut de militaires qui prennent le pouvoir par la force et s'y maintiennent. Alors, la CEDEAO a pris des sanctions contre le Mali pour que la junte donne un calendrier de retour à l'ordre constitutionnel plus réaliste. C'est tout.

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Nous, Africains, avons cette tendance à nous « noircir » plus que nous ne le sommes, c'est-à-dire à nous attribuer toujours le mauvais rôle. C'est ainsi que nous nous sommes convaincus que nous sommes mauvais par essence, que nos religions sont démoniaques, que notre culture est inférieure à celle des autres, que nos cheveux ne sont pas beaux, que notre couleur est vilaine, et que les autres sont nécessairement plus solidaires que nous.

Arrêtons cela et regardons-nous positivement si nous voulons évoluer. Pour ce qui est du Mali, ils sont nombreux, les Africains qui sont en train de verser leur sang pour ce pays. Maintenant, faut-il laisser des militaires dont la compétence à diriger un pays reste encore à démontrer s'accaparer le pouvoir dans un pays de la CEDEAO et les regarder faire sans réagir ? Les militaires sont au pouvoir au Mali depuis plus d'un an ?

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Quels résultats ont-ils obtenu sur le plan de la sécurité pour qu'on les laisse faire comme ils veulent ? L'abbé dira-t-il que les sanctions prises par les Occidentaux contre la Russie pour contraindre Poutine à arrêter sa guerre en Ukraine sont destinées à bombarder le peuple russe par méchanceté ?

Written by Venance Konan

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