Covid-19 en Côte d’Ivoire : pourquoi Ouattara confie la gestion des fonds à des cabinets internationaux ?

Le Chef de l'Etat, Alassane Ouattara a annoncé le 7 mai 2020, le recrutement de cabinets internationaux pour suivre la gestion des fonds du COVID19.

La nouvelle transparence dans la gestion des fonds alloués au titre du COVID19, ce que j'en pense…

Dans son allocution à la nation du jeudi dernier, le Chef de l'Etat a annoncé avoir pris deux décisions importantes :

– la centralisation de la gestion des dons au ministère de l'économie et des finances, et,
– le recrutement de plusieurs cabinets de renommée internationale pour suivre la gestion des fonds du COVID19.

D'entrée de jeu, je voudrais saluer ces deux décisions qui de mon point de vue vont dans le sens de la transparence souhaitée par nos compatriotes dans la gestion des affaires et des deniers publics.

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Cela dit, j'aurais été fort aise si, avant toute chose, le Chef de l'Etat avait exigé qu'un audit soit fait sur les 190 milliards déjà décaissés sur les 650 milliards prévus. Mieux, j'aurais applaudi des 10 doigts et des 10 orteils s'il avait demandé que soit publiée la liste exhaustive des entreprises qui en ont été les heureuses bénéficiaires. Hélas ! 1 000 fois hélas, cela n'a pas été fait.

Ne boudons pas pour autant notre plaisir et notre satisfaction que des cabinets de renommée internationale aient été introduits dans le contrôle de la gestion des fonds concernés. C'est déjà ça de gagné.

Cependant, il n'est pas illégitime que nous nous posions des questions sur les raisons pour lesquelles, plus d'un mois après leur mise en place, le Chef de l'Etat ait décidé de confier le suivi et le contrôle des opérations à des cabinets internationaux plutôt qu'à ses collaborateurs où à l'Inspection Générale d'Etat (IGE) notamment, comme il nous y a habitué. Il ne peut y avoir que deux raisons essentielles :

– un constat de détournement massif de ces fonds fait par le Chef de l'Etat, et/ou,
– une exigence des bailleurs fonds alertés sur des constats de surfacturation ou de clientélisme.

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L'un dans l'autre, cette décision du Chef de l'Etat n'est pas fortuite, elle résulte d'un constat d'une succession de faits « indécents » de mauvaise gouvernance dans la gestion fonds concernés. Ces mesures tombent donc à pic. Sont-elles pour autant opportunes et pertinentes ? Je n'en suis pas si sûr.

En effet, dans l'optique de transparence, il me semble que la priorité devrait être accordée à

– la consolidation des fonds. C'est ce que le Chef de l'Etat a décidé en ce qui concerne la gestion des dons.
– l'expertise locale de la Direction Générale des Impôts (DGI) et de l'Association Professionnelle des Banques et Établissements Financiers (APBEF).

En ce qui concerne la création de 4 fonds distincts et autonomes dans le cadre de la gestion des fonds du COVID19, il faut dire que cela est inefficace et budgétivore. Par ailleurs, la multiplicité des intervenants complexifie le suivi de l'utilisation desdits fonds.

Lors de son allocution précitée, le Chef de l'Etat avait déclaré ceci : “par ailleurs, dans le but d'une gestion transparente et efficace des dons, j'ai décidé de la centralisation de l'ensemble des contributions. À ce titre, le Ministère de l'Economie et des Finances a été désigné pour assurer la traçabilité des dons reçus et rendre compte au Gouvernement de leur utilisation”.

Le soucis d'efficacité et de transparence souhaité par le président de la république devrait également s'appliquer à la gestion des fonds d'appui aux entreprises concernées en procédant, ici aussi, à leur consolidation.

En ce qui concerne l'expertise des cabinets de renommée internationale, si elle n'est pas à exclure, il faut également garder à l'esprit que leur intervention n'est pas gratuite, elle est même très coûteuse.

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L'objectif qui a prévalu la mise en place des fonds d'appui c'est d'apporter un soutien aux entreprises fortement impactées par les effets collatéraux du COVID19 sur leur chiffre d'affaires. Dès lors, qui, mieux que la DGI et les 23 banques et autres établissements financiers qui opèrent dans notre pays, peut :

– établir une liste fiable des PME déclarées aux impôts que la DGI, et,
– certifier la sincérité des flux financiers des entreprises dans les livres de ses membres, avant et pendant la période du COVID19, que l'APBEF.

Si nous partons du fait qu'être détenteur d'un registre du commerce ne fait pas de celui qui le détient un entrepreneur en activité alors il ne fait aucun doute que le croisement des données de ces deux structures, DGI et APBEF, devrait permettre de gérer avec efficacité et transparence cet important dossier pour la relance économique post crise COVID19 dans notre pays.

De toute façon, les experts des cabinets de renommée internationale qui seront mis en mission sur ces dossiers seront leurs filiales dans notre pays. Donc essentiellement nos compatriotes. Il n'y a donc aucune raison objective de ne pas faire confiance à la DGI et à l'APBEF qui, dans ce dossier, devraient pouvoir travailler ensemble afin de permettre à l'Etat d'atteindre ses objectifs de célérité et de transparence et aux entreprises réellement touchées de bénéficier des fonds.

Jean Bonin
Juriste
Citoyen ivoirien

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Written by Jean Bonin

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