Fin du F CFA: « il s’agit en réalité d’un sabotage, de la poudre aux yeux »

Réaction du Pr. Illy Ousseni, Enseignant-chercheur à l'Université Ouaga II relative à la fin du Franc FCA, annoncé à Abidjan le samedi 21 décembre 2019.

Ce qui vient de se passer à ressemble plus à un sabotage du projet de la monnaie unique de la qu'à une véritable réforme du CFA :

1) Quinze pays (CEDEAO) se mettent d'accord pour créer une monnaie unique qu'ils ont décidé d'appeler Eco et avec un chronogramme de mise en œuvre bien établi (même s'il n'est pas toujours respecté) ;

2) Tout à coup, 8 d'entre eux (, encore faut-il qu'il soit démontré qu'il s'agit vraiment des 8, puisque l'annonce a été faite par le président Ouattara seul, en compagnie du ) décident, de façon unilatérale, de rebaptiser leur monnaie controversée du même nom (Eco).

LIRE AUSSI: VIDÉO : Quand A'salfo fait danser Brigitte Macron

La question légitime que l'on est en droit de se poser est de savoir, cet « Eco » (qui vient d'être lancé à Abidjan), est-il celui projeté par la CEDEAO ou s'agit-il d'un autre (nouvelle monnaie UEMOA) ?

Ce télescopage (voulu à dessein ?) dénature complètement le projet de la CEDEAO, s'il ne le compromet pas tout simplement. En lieu et place d'un processus inclusif et endogène comme voulu au départ, on se retrouve avec un « Eco » décidé par l'UEMOA (ou plus exactement par la Côte d'Ivoire et la ) auquel on demande maintenant aux autres pays de la CEDEAO d'adhérer ; toute chose qui me semble inimaginable pour certains pays comme le , que je vois mal adhérer à une monnaie dont les termes ont été fixés par la Côte d'Ivoire et la France. On est donc parti pour une division des pays de la CEDEAO entre d'une part, ceux qui vont accepter cette nouvelle donne et d'autre part, ceux qui vont la rejeter, mettant ainsi un terme au processus de l'Eco (le vrai).

LIRE AUSSI: Sans le Nigeria, « l'ECO, apparaît comme un marché de dupes »

Concernant les réformes qui ont été annoncées à Abidjan, il ne s'agit en réalité que de la poudre aux yeux. On nous dit que le compte d'opération au Trésor français sera fermé, que la BCEAO pourra désormais placer ses devises où bon lui semble, et que les derniers représentants français dans les instances de la BCEAO se retireront, etc. Certes, il s'agit là de progrès, mais cela ne change rien dans le fond quant à la mainmise de la France, ce d'autant plus que cette dernière demeure le garant (comme c'était le cas sous le CFA) de la « nouvelle » monnaie.

En décidant de recourir à la France comme garant de la stabilité et de la convertibilité de l' « Eco UEMOA », cela traduit deux choses (qui ont d'ailleurs toujours prévalu sous le FCFA) :

LIRE AUSSI: « Non, le franc CFA n'est pas mort. Macron et Ouattara se sont débarrassés de ses atours les plus polémiques »

Premièrement, l'incapacité de nos dirigeants à assurer encore, 60 ans après les indépendances, la stabilité et la convertibilité d'une monnaie (même étant réunis à 8 !). Cela est simplement honteux. Même les plus petits pays africains arrivent à gérer leur monnaie en toute indépendance et en toute responsabilité, sans avoir besoin du secours de leurs maîtres d'hier.

Deuxièmement, comme le mot « altruisme » n'existe pas dans le vocabulaire des relations internationales, il est hors de question que la France prenne la responsabilité d'assurer la garantie de notre monnaie (toute chose qui a un coût pour elle) sans aucune contrepartie (qu'elle soit économique ou politique). Le chemin reste donc encore long.

Written by YECLO.com

Tiémoko Assalé : « ECO ou CFA, ce qui compte, c’est l’écho du travail »

VIDÉO : Soro dans son vol privé en direction d’Abidjan