Gbagbo et Ouattara : deux hommes en politique dont l’un est l’antithèse de l’autre

Traoré Mamadou, ex-député du FPI, fait une analyse de la politique que mènent Laurent Gbagbo et Alassane Ouattara.

Cet après-midi du 27 juillet 2021,cet après-midi là, pour tous ceux qui croyaient à la naissance d'un jour nouveau sur une Côte d'Ivoire plongée dans des tourments depuis des décennies, la visite effectuée par l'ex-Président à son « frère » le président devait inévitablement marqué un nouveau départ pour le pays.

Tout le monde y avait cru sauf quelques incrédules qu'on pouvait compter sur les doigts d'une seule main, tellement l'instant était solennel et le décor féerique. Pourquoi ne pas croire aux bonnes intentions de réconciliation d'un Laurent Gbagbo revenu d'un séjour carcéral de 10 ans aux Pays-Bas et en Belgique qui se déplace personnellement pour aller rencontrer pour la première fois l'homme qui avait mis son pouvoir à mal jusqu'à son renversement brutal? Cette visite n'était-elle pas faite pour montrer une disposition à la paix malgré les injustices dont il fut l'objet de la part d'un système bien huilé qui de l'extérieur avait tout planifié en Côte d'Ivoire jusqu'au coup d'État militaire de l'armée française?

LIRE AUSSI: Classement FIFA février 2022 Afrique : voici le Top 10 après la CAN 2021

Il était donc impossible de ne pas croire aux bonnes intentions de Laurent Gbagbo, car que gagnait-il à part un apaisement du climat social? À l'inverse en ce qui concerne Alassane Ouattara, nous pouvons dire sans nous tromper 7 mois après cette rencontre mémorable qu'il n'était pas animé par les mêmes intentions que son visiteur de ce 27 juillet 2021.

En effet, Alassane Ouattara voyait plutôt un signe d'allégeance tacite de son honorable visiteur du jour, un signe de reconnaissance officielle de son 3e mandat présidentiel anticonstitutionnel qui avait besoin d'un homme du gabarit de Laurent Gbagbo pour se rétablir aux yeux du monde extérieur en se faisant au besoin appeler « Monsieur le Président » pour être sûr qu'il en était vraiment un. Nous en voulons pour preuve la joie extrême qui se lisait sur le visage d'Alassane Dramane Ouattara ce jour-là lorsque Laurent Gbagbo l'appela « Monsieur le Président ».

Nous en voulons pour preuves l'aréopage de ministres, de Directeurs, d'Officiers de l'armée nationale et de politiciens au pouvoir qui ce jour-là avait investi l'esplanade et les couloirs du palais présidentiel du Plateau. Tous voulaient bénéficier de cette reconnaissance qui leur faisait cruellement défaut. Nous en voulons pour preuves que toutes les requêtes de Laurent Gbagbo adressées à Alassane Ouattara sont restées sans suite et que par ailleurs les griots du pouvoir enfoncèrent le clou plus tard en affirmant que la réconciliation n'excluait pas la justice.

LIRE AUSSI: France et Russie : quand les finances suscitent la collaboration Macron-Poutine

Entendez par là, la justice des vainqueurs sinon une véritable justice ne fait jamais 2 poids 2 mesures à propos des belligérants d'un même conflit. Le régime voulait tout simplement saisir cette occasion pour rebondir. Et c'était tout ? Rappelons que de la requête formulée publiquement par Laurent Gbagbo concernant les prisonniers politiques civils et les militaires qui étaient sous ses ordres durant la guerre, le pouvoir n'en fit rien si bien que Laurent Gbagbo se trouve toujours obligé de rappeler chaque mois qu'il est important de les libérer pour ramener la paix.

Car logiquement, des soldats qui obéissent aux ordres ne peuvent pas être maintenus en prison pendant que celui qui leur avait donné les ordres de défendre la République et les populations est acquitté par la justice internationale qui l'avait jugé durant 10 ans et finalement déclaré non coupable de crimes. Cette rencontre du 27 juillet était un coup d'épée dans l'eau pour celui qui voulait l'utiliser comme une clé pour ouvrir les portes de la prison et aller à la paix, car elle n'a réellement profité qu'à celui qui voulait s'en saisir pour se faire un brin de toilette pour se débarrasser des souillures après une élection désastreuse pour s'octroyer un mandat que la loi interdit.

Inutile donc de s'en offusquer si cela est considéré à juste titre par Laurent Gbagbo dans son discours du 5 février 2022 à Mama (son village natal) comme un coup d'État civil aussi condamnable qu'un coup d'État militaire. Nous pouvons affirmer aujourd'hui que la rencontre du 27 juillet n'a rien apporté de concret à la Côte d'Ivoire malgré les espoirs qu'elle avait fait naître pour la réconciliation et pour la paix pour un nouveau départ puisqu'il va falloir tout renégocier avec le pouvoir dans un hypocrite dialogue aux lendemains incertains comme cela a fini par être une habitude bien ancrée dans les mœurs depuis des années au bord de la Lagune Ébrié.

LIRE AUSSI: Congés anticipés: après leur passage à Bimbresso, les élèves délogeurs devenus gardiens du respect du calendrier scolaire

On fait semblant de s'ouvrir au dialogue en attendant la comptabilité funeste lors des élections suivantes. Ainsi va la Côte d'Ivoire, le pays des élections mortelles.

En conclusion, disons que les Présidents Laurent Gbagbo et Alassane Ouattara sont en politique deux hommes dont l'un est l'antithèse de l'autre, exactement comme le jour est l'antithèse de la nuit ou comme l'hivernage avec ses grosses averses est l'antithèse de la saison sèche avec ses rayons de soleil incandescents. On a longuement critiqué Laurent Gbagbo. On s'était même lourdement armé contre lui, mais on n'a pas pu faire mieux que lui. Là-dessus, il n'y a ni doute ni débat !

Written by Traoré Mamadou

Création d’entreprise en ligne en Côte d’Ivoire: le Casier judiciaire obligatoire, voici la procédure

Odette Lorougnon: « un Gbagbo gênant du jeu politique ivoirien »