Logements sociaux : Koné Katinan du PPA-CI répond au gouvernement RHDP, « la propagande ne peut cacher l’échec »

Le programme présidentiel de logements sociaux et économiques à Songon tel qu’annoncé ne se déroule pas comme prévu révèle le PPA-CI.

𝟮. 𝗟𝗼𝗴𝗲𝗺𝗲𝗻𝘁𝘀 𝘀𝗼𝗰𝗶𝗮𝘂𝘅 𝗲𝘁 𝗲́𝗰𝗼𝗻𝗼𝗺𝗶𝗾𝘂𝗲𝘀 : 𝗹𝗮 𝗽𝗿𝗼𝗽𝗮𝗴𝗮𝗻𝗱𝗲 𝗻𝗲 𝗽𝗲𝘂𝘁 𝗰𝗮𝗰𝗵𝗲𝗿 𝗹’𝗲́𝗰𝗵𝗲𝗰

Le PPA-CI profite de l’occasion pour passer en revue et évaluer tous les engagements pris par le Gouvernement dans le domaine du logement social et économique dans le cadre du programme présidentiel élaboré et publié en 2013 avec comme illustration le programme de SONGON KASSEMBLE. En effet :

– Le 11 mars 2013, le Ministre de la Construction, du logement et de l’assainissement a procédé au lancement de la pré- commercialisation et la pré- souscription des logements sociaux en Côte d’Ivoire. Ce programme concerne la construction de 60.000 logements sociaux de 2013 à 2015 avec 10.000 à l’intérieur du pays et 50.000 dans l’agglomération d’Abidjan. Il fait partie selon le Ministre « des plus grandes priorités du programme du Gouvernement du Président de la République ». Les frais de dossiers de pré- souscription s’élèvent à 30.000 F non remboursables en cas de désistement. Le prix du logement social arrêté varie de 4.869.270 F à 10.000.540 F et celui du logement économique de 10.000.540 F à 15.000.155 F.

– Le 15 mars 2013, lors d’une visite du 1er Ministre KABLAN DUKAN à SONGON KASSEMBLE dans la commune de SONGON, il a procédé au lancement d’un projet de construction de 75.000 logements sociaux et économiques mis en œuvre au profit des populations les plus démunies. Ce projet a été confié à 25 promoteurs à charge de construire chacun 3.000 logements sur le site de 439 ha à SONGON KASSEMBLE.

Pour le 1er Ministre : « Ce chantier constitue à la fois un pilier de l’atteinte des objectifs de l’émergence économique et un indicateur de la bonne santé économique du pays avec l’objectif de soulager les populations confrontées à un déficit de 400.000 logements par an ». Il a annoncé pour ce qui est de la facilitation de l’accès au site « que les études sont en cours pour la construction d’une autoroute ABIDJAN-DABOU permettant de relier la capitale économique plus rapidement ».

LIRE AUSSI: Blé Goudé à Guiberoua sur la tombe de son père ce samedi 3 décembre 2022

– Ce jour-là, le Ministre de la Construction, du logement et de l’assainissement a révélé « qu’une ligne de bateau- bus desservira SONGON. Ainsi, les habitants de la toute nouvelle cité pourront se rendre directement au Plateau ».

Ces engagements annoncés à grands renforts de publicité par le Ministre et le 1er Ministre devant toute la nation et qui ont amené de très nombreux Ivoiriennes et Ivoiriens résidants en Côte d’Ivoire et à l’étranger à payer en toute confiance et quiétude les 30.000 F de pré-souscription et de pré- commercialisation non remboursables méritent que le PPA-CI s’y intéresse. Ce, d’autant plus qu’il s’agit d’un programme présidentiel qui a mobilisé l’argent des contribuables Ivoiriens.

Ceux-ci doivent donc savoir : Comment s’est déroulé ce projet immobilier du programme présidentiel ? A- t- il pu être mené à son terme ? Combien de logements sociaux et économiques ont- ils été effectivement construits selon les délais indiqués (de 2013 à 2015) et à quels prix ? Les promoteurs qui ont été retenus dans ce projet immobilier du programme présidentiel ont-ils exclusivement proposé des logements sociaux et économiques ?

La réponse à ces questions, résulte des constats au nombre de deux, faits en visitant en septembre et octobre 2022 le chantier du projet à SONGON KASSEMBLE.

LIRE AUSSI: Congés anticipés Noël: sensibilisation à Minignan contre ce phénomène

𝟭/ 𝗖𝗼𝗻𝘀𝘁𝗮𝘁 𝘀𝘂𝗿 𝗹𝗮 𝗰𝗼𝗻𝘁𝗿𝗮𝗱𝗶𝗰𝘁𝗶𝗼𝗻 𝗱𝗲𝘀 𝗰𝗵𝗶𝗳𝗳𝗿𝗲𝘀 𝗱𝗲𝘀 𝗹𝗼𝗴𝗲𝗺𝗲𝗻𝘁𝘀 𝗮̀ 𝗰𝗼𝗻𝘀𝘁𝗿𝘂𝗶𝗿𝗲.

En moins de cinq jours, entre le 11 mars 2013 et le 15 mars 2013, le 1er Ministre a contredit son Ministre en annonçant un projet de 75 000 logements sur le seul site de 439 ha de SONGON KASSEMBLE au lieu de 50 000 dans toute l’agglomération d’Abidjan, soit 25 000 logements de plus sans expliquer pourquoi. Qui croire ?

2/ Constats sur la réalisation du projet

Ils sont au nombre de cinq :

1) Le détournement de la vocation première du projet : Toute la communication du 1er Ministre et du Ministre avaient porté sur un projet de construction de 75.000 logements sociaux et économiques mis en œuvre au profit des populations les plus démunies. Le prix du logement social arrêté variait de 4.869.270 F à 10.000.540 F et celui du logement économique de 10.000.540 F à 15.000.155 F. Malheureusement pour les Ivoiriennes et les Ivoiriens, lorsque l’on se rend sur le chantier, on constate avec beaucoup de stupéfaction que les prix des logements proposés par les promoteurs retenus varient entre 20.000.000 F et 70.000.000 F. Il n’y a pas de logements entre 5.000.000 et 10.000.000 F et pourtant sur le site WEB du ministère de la Construction et de l’Urbanisme, ces prix y sont affichés pour les logements sociaux et économiques. Quelles populations démunies peuvent- elles s’acquitter d’une telle fortune pour se loger ? Contrairement à ce qu’ont affirmé le 1er Ministre et le Ministre, le logement social et économique ne fait pas partie des plus grandes priorités du programme du Gouvernement du Président de la République. C’est donc un leurre. La population Ivoirienne doit rester vigilante.

2) Le projet du programme présidentiel proposé ne concerne exclusivement que des logements proposés en vente, ignorant le locatif. Même la France qui est la source d’inspiration de ce régime, continue de proposer aux populations les plus démunies du locatif dans les HLM (Habitat à loyer Modéré). A ce rythme, si le locatif n’est pas pris en compte par le Gouvernement pour contrebalancer la main- mise du secteur privé sur les loyers, la hausse vertigineuse de ceux- ci, observée en Côte d’Ivoire depuis 2011, ne sera jamais enrayée et les populations les plus démunies continueront de vivre dans les bidonvilles. Les jeunes travailleurs logeront toujours avec leurs compagnes chez leurs parents faute de salaires ne pouvant supporter des loyers de 100 000 F pour un studio, 200 000 F pour un deux pièces et 300 000F pour un trois pièces dans la commune de Cocody et ailleurs.

3) Les problèmes fonciers non résolus avant le début du projet : Au cours de sa conférence de presse du 11 mars 2013, le Ministre a indiqué que les frais de purge des terrains alloués par les parents détenteurs de droits coutumiers pour la réalisation du programme présidentiel seront payés de façon échelonnée par le Ministère de la Construction sur la base d’une convention type qu’il a proposée. Le non- respect du calendrier de paiement de cette purge des droits coutumiers a occasionné des blocages dans la réalisation des travaux du fait des mécontentements des détenteurs des droits coutumiers.

4) Le nombre de logements construits à ce jour : 9 ans après le lancement du projet par le 1er Ministre le 15 mars 2013, l’on estime à environ 3 500 le nombre de logements (plein- pieds, duplex et R+4 et 5) construits et en construction dont plus de la moitié des construits sont inachevés (pas de portes et de fenêtres) et à l’abandon. Ce qui représente à peine 5% du programme initialement annoncé. Cela parait très dérisoire au regard de toute la propagande médiatique qui a entouré la mise en œuvre de ce projet immobilier du programme présidentiel.

LIRE AUSSI : Orpaillage illégal Côte d’Ivoire: le projet de loi renforçant le code minier adopté

A titre de comparaison, la SICOGI a construit 1 610 logements économiques exonérées de TVA entre 2001 et 2009 dans divers quartiers d’Abidjan et même à l’intérieur du pays à SAN PEDRO dans le contexte que l’on connait. Ces opérations d’un coût de 18 milliards de FCFA ont été réalisées grâce aux efforts de recouvrement des créances de la SICOGI sur la vente de ses anciennes opérations décidées par le Gouvernement en 1996 et la confiance r établie entre la SICOGI et ses clients. Cette confiance a facilité le recouvrement des arriérés auprès des clients.

Autre élément de comparaison qui met à nue la propagande du gouvernement sur son programme de construction des logements sociaux se rapporte au nombre de logements projeté à SONGON. En effet, des projets antérieurs réalisés sous le Président GBAGBO par la SICOGI (seule survivante des structures parapubliques et publiques de production de logements, suite au désengagement de l’Etat du secteur de l’habitat sur injonction des bailleurs de fonds en 1980) et comportant aussi des logements plein- pieds, des duplex et des R+2, R+4, R+5 sur un espace de 50 ha à ABOBO PK 18, l’on était en train, malgré la crise militaro- politique d’y construire 2 680 logements avec toutes les commodités (3 lieux de cultes, 10 écoles primaires publiques, 1 lycée, 1 centre de santé, des espaces verts, 1 marché et 1 super- marché). Sur cette base, le site de SONGON estimé à 439 ha, soit seulement 8 fois celui d’ABOBO, il serait illusoire de prétendre construire 75 000 logements. Le nombre de logements susceptibles d’y être réalisé ne peut excéder 25 000.

Pour rappel, le projet de ABOBO PK18 a été réalisé en deux phases :

. Phase 1 (490 logements) financé sur fonds propres, débuté en juin 2007 et livré en juin 2010.

. Phase 2 (2 190 logements) financé par EXIMBANK CHINE qui a accordé un prêt d’un montant de 27,4 milliards F CFA à un taux d’intérêt concessionnel de 2% sur 20 ans, un différé de 5 ans et une commission d’engagement de 1%. Débuté en octobre 2010 et prévu d’être livré en 2015. Ces conditions exceptionnelles de financement ont permis à la SICOGI d’être le seul promoteur à proposer à ses clients la location- vente sur 15 ans.

La gabegie et la mauvaise gestion du projet par la nouvelle Direction générale de la SICOGI installée en juin 2011 (incapacité à faire face aux premières échéances du prêt) ont contraint EXIMBANK à arrêter le financement et à se désengager du projet en 2017.

Ainsi, 12 ans après son début en 2010, ce beau projet n’est toujours pas terminé. Quel gâchis !

Un autre point d’interrogation du projet de SONGON KASSEMBLE se rapporte aussi à l’opacité qui entoure la gestion fiscale qui l’entoure.

LIRE AUSSI: Orpaillage clandestin dans la forêt classée de Cavally : 3 orpailleurs clandestins condamnés à 1 an de prison ferme

Pour rendre le coût des maisons de bas standing accessibles aux personnes réputés en être bénéficiaires (logements sociaux et logements économiques) une exonération de tva est accordée aux matériaux de construction. C’est une initiative de l’administration du Président Laurent GBAGBO qui se perpétue d’ailleurs. Sous l’administration du Président Laurent GBAGBO, pour bénéficier de cette exonération, le programme de construction devrait fournir des maisons ne dépassant pas 19 millions CFA l’unité. Au-delà, le programme tombait dans la catégorie des programmes haut standing. Or, à SONGON KASSEMBLE, dans même programme, comme nous l’avons relevé plus haut, des maisons haut standing se mélangent aux maisons dites économiques ou sociales. Dans ces conditions comment se gère l’exonération. Il y a là manifestement une source de fraude sur la TVA. Au lieu de corriger cela, le gouvernement décide de taxer les matériaux de construction. Nous sommes déjà revenus sur l’absurdité de cette taxe parafiscale dans notre précédent numéro de la Tribune du PPA-CI.

5) Les VRD (Voirie et Réseaux Divers) :

La mise en place d’un programme de logements, parce qu’elle crée une vie communautaire, exige un minimum de commodités fournies par des investissements de base.

Mettre à la disposition de la population 75 000 logements sur un site, signifie la création d’une ville d’environ 420 000 habitants si l’on s’en tient aux résultats du RGPH 2021 qui estime en moyenne la taille d’un ménage à 5,2 personnes ; soit l’équivalent de la population de la ville de Daloa (421 879 habitants)

Les équipements de base, pour soutenir un tel établissement humain. En plus ils doivent répondre aux 17 exigences des Objectifs de Développement Durable pour lesquels la Côte d’Ivoire s’est engagée.

Les composantes essentielles de la voirie et des réseaux divers (VRD), en rapport avec ces ODD, sont constituées principalement des activités de création de voies de communication, de fourniture d’eau potable, d’électricité, de drainage des eaux pluviales et d’évacuation des eaux usées. A celles-là, il faut y ajouter la construction d’écoles pour la prise en charge scolaire des enfants (ODD4) ou encore d’assurer l’accès aux soins de santé (ODD3).

A l’analyse de ces composantes, l’on peut affirmer que les VRD constituent un pilier important et même un préalable pour espérer approcher l’atteinte d’une bonne partie des ODD.

La construction de 75000 logements sociaux et économiques programmés sur une superficie de 439 ha à SONGON KASSEMBRE, soit une ville d’environ 420000 habitants ; le préalable aurait été l’amenée des infrastructures de base devant permettre de viabiliser le site.

Par exemple, la fourniture de l’eau potable pour cet établissement humain suppose la mobilisation des infrastructures équivalentes à celles en cours sur Bouaké pour faire face à la pénurie d’eau soit 2500 m3/h pour la production. Pour la protection des ressources en eau de surface contre la pollution générée par les eaux usées, la construction d’une station d’épuration (STEP) de capacité 900 000 équivalent habitants (EH) s’impose.

Il en sera de même pour l’électricité où les besoins s’élèveraient à 123 700 MWh par an.

Or, le constat est amer dans le programme de SONGON KASSEMBLE.

A titre d’exemples :

. Concernant l’eau potable, c’est l’ONEP (Office National de l’Eau Potable) par le biais de camions citernes ou les Tri- cycles qui approvisionnent les premiers ménages installés ;

. Pour le transport, ce sont les tri- cycles qui assurent les déplacements des habitants de l’opération immobilière voulant rallier le centre- ville de SONGON. Le transport lagunaire par bateau- bus devant relier SONGON au Plateau, promis par le Ministre n’est toujours pas opérationnel, même si le PM l’annonce dans sa conférence comme c’est maintenant que cette ligne était prévue.

. Au niveau de la fourniture électrique, l’on note que de nombreux ménages sont abonnés à l’énergie solaire pour compenser le déficit d’installation électrique publique. Les habitants des cités non électrifiées subissent quotidiennement les agressions des malfrats ;

. S’agissant des infrastructures scolaires, la norme en Côte d’Ivoire est la construction aux frais du promoteur immobilier d’une école primaire publique de 6 classes pour 250 logements proposés et 1 classe supplémentaire pour chaque tranche de 50 logements supplémentaires. Si l’on tient compte de cette règle, les 25 promoteurs immobiliers à qui le 1er Ministre a attribué la construction de 3 000 logements chacun sur le site de 439 ha devraient construire à leurs frais 300 écoles primaires publiques. Pour les logements déjà construits et en construction estimés à 3 500, les promoteurs auraient dû construire déjà 14 écoles primaires publiques à mettre à la disposition des acquéreurs. Il n’en est rien. Seules deux écoles primaires privées existent dans toute l’opération ;

. Au niveau des VRD, l’option d’un aménagement global permet la maitrise des terrassements, des pentes d’écoulement, des érosions de sols, des seuils d’entrées dans les habitations et la formation de zones de stagnation des eaux. Or les principales voies d’accès à l’opération sont revêtues avec des canalisations de drainages des eaux pluviales pendant que les ruelles des cités ne le sont pas. Ce qui favorise l’érosion et l’apport de terre contribuant au disfonctionnement des ouvrages.

𝗖𝗼𝗻𝗰𝗹𝘂𝘀𝗶𝗼𝗻 :

Le programme présidentiel de logements sociaux et économiques à SONGON tel qu’annoncé ne se déroule pas comme prévu :

– Il est inaccessible aux populations démunies auxquelles il était initialement destiné ;

– Le nombre de logements annoncé a été surestimé pour faire de la propagande ;

– Il ne peut donner les résultats escomptés car les préalables nécessaires à l’épanouissement de l’être humain ne sont pas respectés ;

– Le déficit de 400 000 logements par an en Côte d’Ivoire censé être comblé à terme par ce programme ne le sera jamais.

De ce point de vue, la conférence du PM sonne comme un aveu d’échec. Et nous sommes d’accord avec lui que le régime RHDP effectivement échoué comme dans beaucoup d’autres domaines, notamment, celui de la santé des Ivoiriens.

Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé lors du procès à la CPI

Gbagbo se réjouit du retour au pays du Blé Goudé

Le PPA se prononce sur le système de santé ivoirien: « propagande autour d’un système sanitaire mourant »