Charles Blé Goudé, co-accusé de Laurent Gbagbo à la CPI, a reçu le 30 mai 2022, à la Haye son passeport ordinaire. Ferro Bally se prononce.
Le destin a un formidable sens de l'humour que le cas de Charles Blé Goudé illustre à merveille.
Hier, le pouvoir l'a présenté comme un trophée de guerre. Arrêté le 17 janvier 2013 au Ghana et extradé en Côte d'Ivoire, il a été placé en résidence …protégée.
Car dépeint comme un grand criminel, accusé notamment d'être l'auteur présumé de l'article 125. Et si la CPI l'a acquitté, le 31 mars 2021, de tous les chefs d'accusation (crimes de guerre et crimes contre l'humanité), la justice ivoirienne, elle, a évolué dans la logique de « Gouvernement 20 ans », titre d'un single de Tiken Jah Fzkoly.
Blé Goudé, jugé pour « actes de torture, homicide volontaire et viol », a été condamné, le 30 décembre 2019 et par contumace, à 20 ans de prison, 10 ans de privation de droits civiques et 200 millions de FCFA à verser aux victimes, au titre des dommages et intérêts.
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Aujourd'hui, le soi-disant criminel est devenu le laurier de la victoire. Alassane Ouattara, le maître de l'horloge et de la communication politique, a choisi le temps pour transformer sa cuisante défaite judiciaire à La Haye en succès politique.
D'une part, il a mis volontairement plus d'un an pour faire délivrer, le 30 mai 2022, un document, le passeport, qui s'obtient logiquement en 72 heures. Le droit est ainsi devenu un privilège.
D'autre part, à en juger par les sorties musclées d'un côté comme de l'autre, le régime a manoeuvré pour semer la zizanie et installer la méfiance entre les camps des deux anciens co-détenus de La Haye (Laurent Gbagbo et Blé Goudé), afin de briser l'unité. Et c'est, en partie, réussi.
Et dans l'atmosphère politique ainsi créée et entretenue, c'est à qui mieux mieux, des Ong aux hommes politiques, pour tresser des lauriers au chef de l'État. Qui apparaît alors comme le vainqueur de l'heureux dénouement. Car, à l'instar de l'optimiste, Ouattara a transformé la difficulté en opportunité.
