La CAP-Côte d'Ivoire (opposition ivoirienne) s'oppose à toute radiation de Tidjane Thiam des listes électorales et réclame la réintégration de Laurent Gbagbo, Guillaume Soro et Charles Blé Goudé dans le jeu politique avant la présidentielle d'octobre.
Exclusion de candidats potentiels et quatrième mandat présidentiel. Ces deux points figurent parmi les principales préoccupations exprimées par la Coalition pour l'Alternance Pacifique en Côte d'Ivoire (CAP-CI) lors d'une conférence de presse tenue lundi à Abidjan. Sa porte-parole, Simone Ehivet Gbagbo, a dénoncé ce qu'elle considère comme « l'élimination, par des artifices juridiques peu dignes d'un état de droit, de certaines personnalités fortes, susceptibles de se porter candidats en 2025 ».
La coalition s'inquiète particulièrement de ce qu'elle perçoit comme une tentative d'écarter Tidjane Thiam, président du PDCI-RDA et figure de proue de l'opposition, de la course à la présidentielle. Elle réclame également la réintégration sur les listes électorales de trois personnalités actuellement inéligibles : l'ancien président Laurent Gbagbo, l'ex-Premier ministre Guillaume Soro et l'ancien ministre Charles Blé Goudé.
La question Tidjane Thiam
L'éligibilité de Tidjane Thiam, ancien directeur général du Crédit Suisse revenu en Côte d'Ivoire pour prendre la présidence du PDCI-RDA en décembre 2023, constitue un point de crispation. La CAP-CI affirme s'opposer à « toute tentative de radiation de Monsieur Tidjane Thiam, Président du PDCI-RDA et Président de la conférence des Présidents de la CAP-Côte d'Ivoire, de la liste électorale ».
La question de la nationalité et de la résidence fiscale de l'ancien banquier alimente depuis plusieurs mois les débats politiques. Certains membres du parti au pouvoir ont émis des doutes sur son éligibilité, évoquant son long séjour à l'étranger et sa double nationalité supposée. Des arguments que l'opposition qualifie de manœuvres visant à écarter un candidat susceptible de rassembler un électorat important.
Trois personnalités déjà écartées
Au-delà du cas Thiam, la CAP-CI pointe la situation de trois autres figures de l'opposition actuellement empêchées de participer au scrutin présidentiel. L'ancien président Laurent Gbagbo, acquitté par la Cour pénale internationale (CPI) en 2021 mais condamné par contumace en Côte d'Ivoire à 20 ans de prison dans l'affaire du « braquage de la BCEAO », ne figure pas sur les listes électorales.
Guillaume Soro, ancien Premier ministre et président de l'Assemblée nationale, a été condamné par contumace à la prison à perpétuité pour « atteinte à la sûreté de l'État » en 2021. Charles Blé Goudé, acquitté par la CPI en même temps que Laurent Gbagbo, a quant à lui été condamné à 20 ans de prison par la justice ivoirienne pour des faits liés à la crise post-électorale de 2010-2011. Pour l'opposition, ces condamnations relèvent de « l'instrumentalisation de la justice » visant à écarter des adversaires politiques.
La question du quatrième mandat
La CAP-CI exprime également son opposition à ce qu'elle qualifie de « projet d'un quatrième mandat que le RHDP veut, contre vents et marées, offrir à Monsieur Alassane Ouattara, en violation flagrante des dispositions Constitutionnelles ». La coalition « recommande la stricte application des dispositions de la Constitution qui excluent les candidats ayant fait deux mandats dont Monsieur Alassane Ouattara ».
Cette question s'annonce comme l'un des principaux points de controverse de la prochaine élection présidentielle. Alassane Ouattara, élu en 2010, réélu en 2015, puis à nouveau en 2020 après le décès de son dauphin désigné Amadou Gon Coulibaly, n'a pas encore officiellement fait connaître ses intentions pour 2025. Le débat porte sur l'interprétation de la Constitution de 2016, qui limite à deux le nombre de mandats présidentiels, mais que certains considèrent comme ayant remis les compteurs à zéro.
Ces questions d'éligibilité s'inscrivent dans un contexte politique tendu, marqué par le souvenir des violences qui ont accompagné les précédentes élections présidentielles. La CAP-CI rappelle que « les élections présidentielles, parce que nous refusons de voir la vérité en face, occasionnent des morts en Côte D'Ivoire depuis plusieurs décennies ».
Les chiffres cités par Simone Ehivet Gbagbo sont éloquents : 30 morts en 1995, 300 en 2000, 3 000 en 2010 et 87 en 2020. « En 2025, nous ne devons pas, à nouveau, avoir des morts à l'issue des élections. On ne doit plus tuer ou se faire tuer pour son opinion ! On ne doit plus brutaliser ou se faire brutaliser pour son opinion ! », a-t-elle déclaré. Pour éviter ce scénario, la coalition appelle à l'ouverture d'un dialogue politique et à la réforme du système électoral, notamment de la Commission électorale indépendante (CEI) qu'elle juge actuellement « sous l'emprise du pouvoir RHDP ».
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