Destructions des maisons à Abidjan: un prêtre catholique réclame des « sanctions et démission des coupables »

Le père Marius Hervé Djadji, prêtre catholique ivoirien, revient sur l’affaire des destructions des maisons à Abidjan.

Depuis quelques jours, Abidjan notre capitale joyeuse est secoué par des bruits funéraires de machines qui passent et repassent. Oui Atila passe, Atila ravage. On sait que là où Atila passe l’herbe ne repousse jamais. Voilà pourquoi quelques Ivoiriens debout ont dit non face à ce désastre. Oui quelques uns parce que les autres sont dans les débats de salaires de tel ou tel entraîneur ou dans les palabres entre tchèp et riz gras. Les réactions de ces hommes et femmes de bonne volonté ont poussé les autorités gouvernementales, Maires, Ministres et plusieurs personnalités étatiques à revoir leur position.

Aujourd’hui beaucoup d’entre elles ont commencé à faire profil bas. Même le conseil des ministres au nom du président de la République demande de l’humanisme dans cette opération pour ne pas agir comme Atila. A travers les réactions des autorités on comprend qu’il y a eu des erreurs, des dysfonctionnements entre les ministères et entre les autorités communales.

Avec attention, quand on lit minutieusement les écrits du journaliste d’investigations et député de Tiassalé, l’honorable Assalé Tiemoko que je félicite pour son audace et sa méthodologie, on déduit clairement qu’il y a eu un manque de sérieux et de professionnalisme dans la gestion de ce dossier de déguerpissement et de projet de destruction de 176 quartiers dits à risque.

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En fait quand dans un quartier il y a un grand frère paraclet qui fait héé, on dit non ce n’est pas le quartier on veut raser, et quand de l’autre côté un défenseur vient dire hooooo, on nous dit que c’est pour mesurer les maisons. Pour finir, nous sommes dans une confusion totale. C’est celui qui a quelqu’un, qui est sauvé. Toi tu n’as pas de grand frère, tu es mort dans le film.

Quand on regarde tout cela, on comprend qu’il y a eu un manque de collaboration entre ministères et entre mairies concernés. Mais dans cette confusion le mal est déjà fait, Atila est déjà passé. Ce mal est profond car ce sont des milliers de familles dans les rues, ce sont des élèves traumatisés, ce sont des populations déshumanisées.

Dans un pays de droit et nous sommes dans un pays de droit puisque chaque jour on nous le chante, il faut établir les responsabilités, sanctionner les coupables et il faut qu’il y ait des démissions. On ne va pas partager quelques billets à des victimes et venir nous parler de dédommagements.

A l’instar des décisions prises pour les stades à la veille de la CAN où des autorités ont été démises de leurs charges, il faut aussi que des décisions soient prises au plus haut niveau concernant ce désastre volontaire. Et ici ce sont des familles, des hommes, des enfants qu’on a blessé, qui sont devenus des mendiants. Pour des stades on sanctionne, pour des pelouses on a sanctionné, pour des murs on a tiré des oreilles, ce qui est tout à fait normal. Alors que des milliers de familles valent mille fois aux yeux de Dieu et de la Côte d’Ivoire que des stades qui ne sont que du matériel qui sera mal utilisé.

Voilà pourquoi il faut des sanctions et des démissions pour que les pauvres soient respectés dans notre pays. Parce qu’au nom d’un certain pouvoir, des autorités avec toute la science, toute l’administration et tous les services ne peuvent pas atteindre à la dignité des hommes et des femmes créés par Dieu qui ont pour seul péché, le fait d’être pauvres et puis l’on parlera d’erreurs. Je refuse cela.

Il est facile aux yeux de plusieurs autorités de détruire les biens des pauvres, de détruire des plantations des pauvres, des biens des citoyens, sans être menacées. Dans les forêts, les plantations de nos parents sont détruites sans explications et sans sensibilisations préalables, sans humanisme. C’est le cas dans la forêt de Mafé avec les pauvres paysans de Yaobou et dans plusieurs forêts de la Côte d’Ivoire (Nous y reviendrons avec un article sur cet enfer des paysans).

L’Etat peut avoir raison dans tout, l’Etat peut vouloir mettre de l’ordre mais l’Etat doit parler, parlementer, sensibiliser, mettre de l’humanisme pour ne pas que l’Etat devienne un cimetière comme dit Bakhounine.

« A Rama, on entend une voix plaintive, des pleurs amers: Rachel pleure sur ses enfants. Elle refuse tout réconfort, car ses enfants ont disparu >> Jr 31,15.

Et le Fils des lianes de Yaobou passa son chemin.

Père Marius Hervé Djadji

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