Le rapport 2021 du CNDH sur l’état des droits de l’homme en Côte d’Ivoire présenté aux députés

Assemblée Nationale de Côte d'Ivoire
Assemblée Nationale de Côte d'Ivoire © Crédit Photo DR

CNDH. La situation des droits de l'homme en Côte d'Ivoire pour l'année 2021 a été présentée le lundi 19 décembre 2022 à l'Assemblée nationale.

C'était au cours d'une séance d'information parlementaire présidée par le Vice-président Diawara Mamadou. À cette occasion, la Présidente du Conseil National des Droits de l'Homme (), Madame était face aux députés. Cette démarche est conforme à l'article 3 de la loi numéro 2018-900 du 28 novembre 2018 qui stipule que : « Le CNDH élabore un rapport annuel sur l'état des droits de l'Homme et un rapport d'activités présentés au Président de la République, au Président de l'Assemblée nationale et au Président du Sénat. Les présentations à l'Assemblée nationale et au Sénat donnent lieu à débats. Ces rapports sont rendus publics ».

Le rapport 2021, présenté par Madame Namizata Sangaré, est axé sur l'analyse de certains droits relevant des Droits Civils et Politiques (DCP), des Droits Economiques, Sociaux et Culturels (DESC) et des droits catégoriels.

I- Des droits civils et politiques

L'analyse du CNDH a permis d'examiner la situation des droits civils et politiques sous l'angle des droits et libertés liés aux processus électoraux (législatives et sénatoriales partielles), à la justice, à la sécurité, à l'état-civil, à la gouvernance migratoire ainsi qu'au processus de réconciliation.

– Au titre des processus électoraux
Le CNDH a relevé que les élections législatives du 6 mars 2021 et des sénatoriales partielles du 31 juillet 2021, se sont déroulés dans des conditions démocratiques et inclusives. Aussi, avec une représentation nationale à l'Assemblée nationale regroupant désormais toutes les sensibilités politiques.

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– Au niveau de la justice
La Présidente Namizata Sangaré a noté que la problématique de la détention hors délai, la surpopulation carcérale et les conditions de détention des personnes en situation de handicap demeurent des préoccupations. Les infrastructures pénitentiaires, malgré les importants investissements faits par l'Etat, restent encore en deçà des normes internationales de la détention.
Le déficit du personnel judiciaire notamment des magistrats dont le ratio national de 01 magistrat pour 43 219 habitants selon l'annuaire statistique 2020-2021 du ministère de la Justice et des Droits de l'Homme, est encore en deçà de la norme recommandée au niveau international qui est de 10 000 habitants pour 01 magistrat, ayant pour conséquence un épuisement des ressources humaines disponibles et une lenteur dans le traitement des procédures judiciaires de plus en plus complexes sont autant de facteurs du non-respect strict des délais de détention préventive et du surpeuplement carcéral.

Malgré les pertinentes et judicieuses réformes faites par l'introduction de mesures alternatives à la détention dans la législation pénale comme réponse à la surpopulation carcérale, les mécanismes institutionnels de leur mise en œuvre et les réflexes professionnels des acteurs d'y recourir, restent encore des défis à relever. 

– Au niveau sécuritaire
À ce sujet, le rapport évoque plusieurs phénomènes sociaux liés à la sécurité des personnes et des biens. Il s'agit de la délinquance juvénile dont les auteurs présumés sont les enfants en rupture sociale et des attaques terroristes au nord-est du pays (Tougbo et Tehini) qui font l'objet de plusieurs actions des autorités en vue de contenir cette menace pour la paix sociale.
– Relativement à l'Etat civil 
Le CNDH observe que la décentralisation des sites d'enrôlement a favorisé le rapprochement de l'organe d'édition des CNI des populations.
A contrario, l'enregistrement des naissances demeure toujours une préoccupation. Cette situation est de nature à affecter l'exercice des droits de l'Enfant en ce qui concerne notamment le droit à l'éducation, à la santé, à la liberté de circulation, le droit au mariage.
– Relativement au processus de réconciliation nationale et de cohésion sociale
À ce titre, le CNDH note que la création du Ministère de la réconciliation et de la cohésion nationale et la reprise du dialogue politique avec les partis et groupements politiques de l'opposition et la société civile le 16 décembre 2021, ont permis de renforcer le climat de confiance entre ces entités.
Par ailleurs, le rapport note que la Côte d'Ivoire, pays d'immigration, ne dispose pas d'une législation moderne en matière de gouvernance migratoire marquée par une insuffisance de coordination entre les structures étatiques impliquées dans la gestion de la migration.

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II- Des droits économiques, sociaux et culturels

Le rapport planche sur la question de la satisfaction du droit à la santé, de l'accès à une éducation de qualité et à un logement décent.

– Au titre du droit à la santé
L'enquête réalisée sur la satisfaction du droit à la santé établit qu'en zone rurale, 80 % des personnes interrogées affirment parcourir en moyenne plus de 5 kilomètres pour se rendre dans un établissement sanitaire public. Le mauvais état des routes ne facilite pas l'accès des populations à ces structures.


– Concernant le droit à l'éducation
Le CNDH félicite la suppression du paiement de frais annexes et autres cotisations exigées des parents par les Comités de Gestion des Établissements scolaires (COGES), qui constituaient des obstacles réels à la politique nationale de l'école pour tous. Cependant, les établissements scolaires et universitaires sont toujours confrontés à des actes de violences causés par les élèves et étudiants et aux congés anticipés.

– Relativement à la question du droit à un logement décent
Cette question est également abordée par le rapport au regard de la récurrence des effondrements d'immeubles, du déguerpissement des populations de certaines zones à risque et pour cause d'utilité publique.
Si les motifs évoqués par les autorités locales et nationales sont justifiés, ces déguerpissements ne prennent pas en compte le respect de la dignité humaine et ne proposent pas d'alternatives durables pour le relogement des populations.

III- Des droits catégoriels
Au terme de l'étude comparative des données de 2020 et 2021, le rapport met en lumière la recrudescence des Violences Basées sur le Genre (VBG) documentées et suivies par le CNDH. Elles sont passées de 325 cas en 2020 à 462 en 2021, avec une progression nette de 42 % et une concentration du phénomène à Abidjan (64 cas), Soubré (39 cas) et Bouaké (38 cas), malgré l'existence de lois répressives et des mécanismes de protection des victimes, ainsi que des actions de sensibilisation.

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Dans le but de promouvoir l'égalité homme-femme, le CNDH porte chaque année une attention particulière sur les femmes dans l'administration, celles occupant des postes électifs et exerçant dans différents corps de métiers. Pour cette année, le Conseil s'est intéressé aux femmes présentes dans la magistrature.

Le rapport souligne une sous-représentation de la femme dans ce corps. Selon l'annuaire des statistiques judiciaires et pénitentiaires (2020-2021), sur 680 Magistrats, il y a seulement 188 femmes soit près de 28 % et 492 hommes soit 72 %.

En outre, le rapport relève une sous-représentation de la femme dans les assemblées élues malgré l'existence de la loi n° 2019-870 du 14 octobre 2019 qui impose un quota minimum de 30% de femmes sur le nombre total de candidats présentés lors des scrutins relatifs aux élections des députés en 2021.

Cette sous-représentation trouve sa justification dans la contrariété entre la loi suscitée et les dispositions de l'article 78 du code électoral.

Parlant d'activité du CNDH, le rapport retrace la mise en œuvre des missions de promotion et de protection du CNDH. Celles-ci ont consisté d'une part à la célébration de journées thématiques, à l'exécution du programme de formation de l'Université des Droits de l'Homme (UDDH), de la mise en œuvre du mandat par les Commissions Régionales des Droits de l'Homme (CRDH), et d'autre part à l'organisation de la Quinzaine des Droits de l'Homme, des ateliers, des séminaires ainsi que la participation aux fora des Droits de l'Homme à Genève, New York et Banjul.
Enfin, le rapport évoque les acquis, les perspectives et difficultés.

Au titre des acquis, l'on peut citer entre autres :
– la reprise du partenariat avec la fondation René Cassin dans le cadre de l'organisation des sessions de formation délocalisées ;
– l'assistance technique du CNDH aux INDH du et du Benin dans le cadre de leur accréditation au Statut A sollicité auprès de la GANHRI ;
729 auditrices et auditeurs ont été formés en 2021 aux sessions ordinaires et intensives de l'UDDH, avec 861 candidatures pour la première session ordinaire de l'année 2023 qui démarre en janvier ;
– la forte interaction des partenaires nationaux et internationaux avec le CNDH ;
– la forte sollicitation du CNDH par les populations.

Concernant les perspectives, le CNDH envisage entre autres de :
– Poursuivre le monitoring des processus électoraux ;
– Poursuivre les études et enquêtes thématiques (resocialisation des femmes détenues, droit à la santé dans les établissements pénitentiaires, cartographie des sites d'orpaillage en Côte d'Ivoire, responsabilité sociétale dans les entreprises de sécurité privée, …)
– Renforcer son programme phare de formation et de renforcement des capacités des acteurs des droits de l'Homme à travers l'Université des Droits de l'Homme ;
– Créer le Centre International pour les Droits de l'Homme et la démocratie (construction du siège).
– Poursuivre les visites dans les lieux privatifs de liberté assortis de recommandations aux autorités compétentes ;
– Proposer un avant-projet de loi sur les droits, devoirs et qualité des soins des malades ;
– Renforcer la sensibilisation des femmes et des jeunes sur les modes de règlement pacifique des conflits, l'exercice de leur droit de vote dans la paix et le respect des droits de l'homme.

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En termes de difficultés, le CNDH a été confronté à l'Insuffisance des ressources matérielles et financières pour la réalisation de son mandat.

Au terme de la présentation du rapport sur l'état des droits de l'homme en Côte d'Ivoire, les députés se sont appesantis notamment sur le phénomène des doublons dans le processus de dédommagement des victimes de déguerpissement des sites à risque, la situation détaillée de l'orpaillage clandestin et la problématique des effondrements d'immeubles.

Pour le phénomène des doublons dans le processus de dédommagement des victimes de déguerpissement des sites à risque, la Présidente du CNDH a affirmé qu'une saisine des autorités compétentes a été effectuée afin de clarifier la situation. Concernant la situation détaillée de l'orpaillage clandestin, madame Namizata a indiqué qu'un point détaillé est prévu dans le rapport d'activité 2022 du CNDH, et qu'un rapport thématique a été publié à cet effet sur le site dudit Conseil. Relativement à la problématique des effondrements d'immeubles, le Conseil a procédé à la saisine des propriétaires de ces immeubles et produit un rapport également disponible sur le site du CNDH.

Written by Mohammed Ouattara

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