Jean Bonin en colère : « vouloir museler l’opposition, intimider les artistes est inacceptable dans un État de droit »

« Le mal est profond » une analyse de Jean Bonin relative à la situation socio-politique en Côte d'Ivoire et l'affaire Yodé et Siro.

Une fois de plus, je vais devoir jeter un pavé dans la marre face aux velléités inquisitoriales dans mon pays. En convoquant des artistes, des éveilleurs de conscience, le pouvoir RDR et ses suppôts viennent allègrement de franchir le rubicon. Vouloir museler l'opposition, intimider les artistes est inacceptable dans un État de droit.

Le fameux taux de croissance à deux chiffres dont ils se repaissent est censé nous faire croire que la Côte d'Ivoire c'est Byzance ; il n'en est rien. La réalité est bien plus sombre. Il suffit de gratter le verni et d'oser déchirer le voile terni de mensonges pour s'apercevoir que le pays est loin de se porter comme le Pont-Neuf.

1 – AVONS-NOUS LES FORCES RÉPUBLICAINES DONT NOUS AVONS RÊVÉ ?
Il saute aux yeux que nos «corps habillés » se comportent davantage comme une milice tribale à la solde d'un clan qu'une force régulière et républicaine. C'est une vérité de La Palice. Des soudards trônent au sommet de ce qu'il faudrait désormais appeler « la grande bavarde ». Qui n'a pas vu sur les réseaux sociaux ces images de malfrats encadrés par des forces du « désordre » ou encore ce fameux Gbaka vert rempli de malveillants « microbes » convoyé par des « hommes en tenue » ! Le mal est profond.

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2 – AVONS-NOUS LE PARLEMENT DONT NOUS AVONS RÊVÉ ?
L'Assemblée Nationale, ce haut lieu du débat démocratique a été transformé en « grin ». Là où nous étions en droit d'espérer des débats de haut vol, soutenus par des envolées lyriques, il nous est servi des injures les plus indécentes. L'intolérance et l'insolence y règnent en maître absolu. Sont-ce raisonnablement encore des « honorables » et « vénérables » élus, à l'image de l'inénarrable député de Tengrela, la bien nommée Mariam Traoré dite Ibiêkisiè ? Le mal est profond.

3 – AVONS-NOUS L'ÉDUCATION DONT NOUS AVONS RÊVÉ ?
Comme à leurs habitudes, à l'instar de la Côte d'Ivoire émergente, ils ont promis monts et merveilles. Au final, ils ont complètement déstructuré l'école ivoirienne. L'université, ce haut lieu du savoir est devenu un endroit de perdition où les cours, lorsqu'ils sont prodigués, le sont à dose homéopathique. Dans les écoles, les congés se prennent selon les humeurs des élèves et non en fonction du calendrier scolaire. Les COGES, cette autre nébuleuse, grève le pouvoir d'achat des parents qui souffrent déjà de la cherté de la vie. Et pourtant, ils nous disent que l'école est gratuite. Le mal est profond.

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4 – AVONS-NOUS LE SYSTÈME DE SANTÉ DONT NOUS AVONS RÊVÉ ?
À quoi cela sert-il de construire des centres de santé alors qu'ils sont dépourvus de soignants ou de médicaments ? Si bien qu'y trouver une simple compresse ou le basique paracétamol devient un luxe, le St Graal. Ils vantent notre système de santé alors qu'eux-mêmes et leur famille se soignent exclusivement à l'étranger, aux frais du contribuable. Le mal est profond.

5 – AVONS-NOUS LA JUSTICE DONT NOUS AVONS RÊVÉ ?
3 000 morts en 2011, aucun du camp en face n'a été entendu par la justice. Une centaine de mort en 2020, bis repetita. Seuls des opposants sont poursuivis, arrêtés et emprisonnés. Les décapiteurs, notoirement connus et identifiés, jouissent eux d'une totale immunité judiciaire contrairement à des élus de la nation. L'impunité a encore de beaux jours à vivre dans notre pays. Le mal est profond.

6 – AVONS-NOUS LE POUVOIR EXÉCUTIF DONT NOUS AVONS RÊVÉ ?
Un exécutif qui nomme un tiers des parlementaires, qui nomme aux hautes fonctions judiciaires et qui dote tout un pays d'une constitution selon la seule inspiration d'un individu, que dis-je, d'un Seigneur. Nous sommes dans un royaume, avec un roi qui règne sur ses sujets. Sujets sur lesquels il a droit de vie et de mort. Le roi peut donc emprisonner des parlementaires, sans autre forme de procès. Le suzerain peut s'autoriser à nommer là où il aurait fallu des élections, tel qu'à la présidence des universités ou du Conseil Économique et Social. De ministres nous avons en réalité des officiers du Pont-Neuf qui s'enrichissent plus vite qu'une comète. Le mal est profond.

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Ils ont par la magie de la communication réussi à faire rêver certains ivoiriens. Il faut dire à leur décharge que nos compatriotes ne sont pas exigeants avec leurs « élus ». Un feu d'artifice suffit à les éblouir et les combler de bonheur. Un kilomètre d'asphalte est le symbole du développement inclusif là où de juteux marchés de gré à gré enrichissent sauvagement des dozos en col blanc.

Aucun rêve ne dure ad vitam aeternam. Il serait peut-être temps que nos compatriotes se réveillent et affrontent la dure réalité de la vie qui leur est offerte par les théoriciens de l'émergence. Une chose est certaine, tôt ou tard, les « émergeurs » iront à Canossa. C'est tout le mal que je leur souhaite.

Written by Jean Bonin

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