Bras de fer entre Abidjan et Bamako: les artistes ivoiriens et maliens aujourd’hui les premières victimes

Aïcha Koné
La chanteuse ivoirienne, Aïcha Koné © Crédit Photo DR

Les artistes ivoiriens et maliens sont aujourd'hui les premières victimes du bras de fer entre Abidjan et Bamako. Sur les réseaux sociaux, la diva ivoirienne Aïcha Koné se fait pour sa part lyncher ces jours-ci

Face à l'hostilité de quelques personnes dans les deux pays, le concert de la chanteuse malienne Mariam Ba Lagaré a été annulé en août dernier à Abidjan. De la même façon, le spectacle du 24 septembre prochain à Bamako du rappeur ivoirien Didi B a été reporté à une date ultérieure.

Sur les réseaux sociaux, la diva ivoirienne Aïcha Koné se fait pour sa part lyncher ces jours-ci, pour avoir chanté les louanges du président malien de transition, le colonel Assimi Goïta.

La chanson d'Aïcha Koné s'inscrit dans la plus pure tradition griotique, qui a fait les grandes et petites heures de l'Afrique, tout au long de son extraordinaire Histoire.

Une tradition qui ne s'est d'ailleurs jamais embarrassée de nuances et encore moins de critiques, telles que nous journalistes pouvons en faire sur les dirigeants du continent, quels qu'ils soient.

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Les plus acharnés accusent aujourd'hui Aïcha Koné de frayer avec l'ennemi. Les plus modérés lui reprochent simplement d'avoir mal choisi son moment pour sortir son single.

Aïcha Koné se défend et dit avoir seulement cherché à rendre hommage à un « panafricain courageux » et à la posture d'un peuple qu'elle résume ainsi : « le ne veut plus être un esclave ».

Sa formule fait écho à une phrase que Sékou Touré avait prononcé devant le général de Gaulle, venu à Conakry en 1958 pour faire campagne en faveur de la Communauté franco-africaine.

Le jeune député guinéen avait dit NON en martelant ces mots mémorables : « Nous préférons la pauvreté dans la liberté à la richesse dans l'esclavage ». Sékou Touré avait été critiqué par ses pairs africains et n'avait pas été suivi.

J'ai dit ici le mois dernier que « personnellement je fais bloc derrière le gouvernement ivoirien dans sa recherche d'une solution pacifique avec l'exécutif malien ».

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Cela ne m'empêche pas pour autant d'écouter les explications d'Aïcha Koné. Dans un pays composite comme la Côte d'Ivoire, il faut prendre en compte nos différences régionales que l'exigence de faire nation ne peut gommer.

En août dernier, lorsque j'ai assisté au concert des 45 ans de carrière d'Aïcha Koné au Palais des Congrès à Abidjan, j'ai été frappé à nouveau par un détail que beaucoup d'entre vous ont sûrement déjà observé.

J'ai entendu une grande partie du public vibrer ou reprendre en chœur les chansons d'artistes venus du Mali, de la Guinée Conakry ou du Burkina-Faso, qu'une autre partie du public ignorait totalement.

Il y avait une communion de langues et de sensibilités qui supplantait la notion de frontières. Alors, si en plus de cette réalité, on prend en compte aussi les convictions panafricaines d'Aïcha Koné, on peut mieux appréhender sa démarche.

Le bras de fer entre Abidjan et Bamako nous renvoie donc finalement à l'histoire complexe de la Côte d'Ivoire et plus généralement de ce continent.

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Faut-il privilégier nos États et nos particularismes ou promouvoir la communauté africaine dans son ensemble, en appuyant les initiatives, d'où qu'elles viennent, en faveur d'une véritable indépendance ??

C'est la grande question qui n'en finit pas et n'en finira pas de revenir sur la table, hier, aujourd'hui, demain. La grande question que ni les menaces ni les insultes ne sauraient masquer.

Ah qu'il est loin le temps où l'artiste malien Salif Keita chantait les louanges du président ivoirien Alassane Ouattara. C'était en 2015. Vivement que ce temps-là revienne, le temps de la paix et de la sérénité

Written by Serge Bilé

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