Cherté de la vie, péage de Bassam… : quand les réseaux sociaux deviennent pour les Ivoiriens « le Mur des Lamentations »

« Faisons attention à un peuple qui ne parle plus » (Siro et Yodé). Une analyse de Nazaire Kadia sur le quotidien des Ivoiriens qui rime toujours avec la cherté de la vie.

Depuis 2011, le peuple ivoirien est devenu extraordinaire. Quel que soit le problème qui se pose à lui, il trouve toujours des ressorts, soit pour le tourner en dérision et avancer, soit il s’enferme dans un mutisme et rumine en son for intérieur, soit il se crée une autre affaire pour y déverser sa frustration et se défouler autant que faire se peut.

Ainsi, l’actualité aujourd’hui, du moins la préoccupation de nombreux ivoiriens, est de donner des leçons au footballeur international Serey Dié et à la chanteuse, Josey, pour leur idylle, au détriment de l’épouse légitime du footballeur. L’acharnement des uns à s’ériger en procureur pour condamner les deux tourtereaux, le dispute à celui des autres, avocats défenseurs qui trouvent des explications et des circonstances atténuantes à l’idylle entre l’artiste et le footballeur.

C’est à croire que cette affaire est une affaire d’Etat, et ne pas trouver de solution, conduirait la société ivoirienne à sa perte !

Pendant ce temps, le quotidien de ces ivoiriens, préoccupés à faire le bonheur du footballeur, de son épouse et de l’artiste à leur place, rime toujours avec la cherté de la vie inhérente à l’augmentation des produits de première nécessité.

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Il y a peu, le prix des produits pétroliers a pris l’ascenseur avec des effets d’entrainement évidents, mais cela ne semble pas être un problème pour les ivoiriens. La non-réaction des populations, des associations de consommateurs et des syndicats, du moins leurs réactions timorées, laissent penser que ceux-ci ont été convaincus par les explications du gouvernement qui met en exergue, le conflit en Ukraine et le renchérissement du cours du pétrole.

Ils seraient également convaincus par les explications du Directeur Général du Commerce intérieur, qui nous apprenait que l’envolée des prix est due à la faiblesse de la pluviométrie en Côte d’Ivoire.

Maintenant que nous baignons en pleine saison des pluies, et que le mois de Juin est le mois le plus pluvieux dans notre pays, attendons la fin de ce mois, pour voir une baisse drastique des prix.

Aujourd’hui, face à ce mal-vivre des ivoiriens, ni les syndicats, ni les partis politiques connus pour être les porte-voix d’un peuple en souffrance, ne semblent être déterminés à mener un quelconque combat.

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Dans la foulée, le Fonds d’Entretien routier (FER) a mis en service le péage sur l’autoroute de Grand-Bassam. Les prix affichés varient entre 1000 FCFA et 3500 FCFA selon le type de véhicule. Comme par extraordinaire, ce ne sont que des murmures et des soupirs qui ont été entendus.

Pour faire taire ces murmures et ces soupirs, le ministre des l’Equipement et de l’Entretien routier, s’est lancé dans des explications qui n’ont convaincu personne.

Le peuple semble être aujourd’hui tétanisé. Il y a quelques années en arrière, de telles décisions auraient donné lieu à des grèves et à des manifestations violentes qui auraient paralysé le pays.

Sans support et sans porte-voix, les ivoiriens ont choisi un créneau pour s’exprimer : les réseaux sociaux. Ils y ont érigé un « mur des lamentations » devant lequel, ils pleurent, ils soupirent, ils se confessent et ils traduisent toute leur impuissance.

Les réseaux sociaux sont donc devenus pour ces ivoiriens, ce qu’est le Mur des Lamentations pour les Israélites et de nombreux pèlerins.

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Ils y vont pour invectiver, pleurnicher, se plaindre et prédire l’apocalypse, afin que leur situation sociale et économique s’améliore. Cela, à l’image des pèlerins qu’on voit devant le Mur des Lamentations, se frapper la poitrine, se flageller et donner des coups de tête au mur, pour faire leur mea-culpa et implorer l’Incréé de trouver des solutions à leurs préoccupations existentielles.

Mais ces actions et ces complaintes n’iront pas au-delà des claviers de leurs ordinateurs, encore moins ne franchiront le seuil de leurs salons feutrés ou…délabrés. C’est cela l’ivoirien. Pour se consoler, ils trouveront un sujet des plus anodin sur les réseaux sociaux pour se défouler, pour montrer leur détermination, leur sagesse et refaire le monde.

Ainsi va le pays.

Mais ne tirons pas trop sur la corde, car elle peut se casser et surtout, faisons attention à un peuple qui ne parle plus (Siro et Yodé). Arrive, le jour où l’ivraie sera séparée du vrai.

Written by Nazaire Kadi

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