Intégration des 10 300 enseignants contractuels: un véritable chemin de croix

(Photo by Wilfred Kajese/Anadolu Agency via Getty Images)

Nazaire Kadia décrypte le programme social de recrutement d’enseignants contractuels dénommé PS.GOUV lancé en 2019 par la Côte d’Ivoire.

En 2019, pour combler le déficit d’enseignants qui sévit dans les écoles primaires, les collèges et les lycées, l’Etat de Côte d’Ivoire lance un vaste programme social de recrutement d’ enseignants contractuels dénommé PS.GOUV.

Ainsi 10 300 enseignants ont intégré le programme avec la répartition suivante :

– 5 300 instituteurs

– 3 000 professeurs de collège

– 2 000 professeurs de lycée.

Le contrat signé courait sur une période de deux années, à l’issue desquelles, l’Etat devait aviser. La rémunération proposée aux enseignants contractuels est la suivante : – 100 000 FCFA/mois pour les instituteurs – 125 000 FCFA/mois pour les professeurs de collège – 150 000 FCFA pour les professeurs de lycée. Au terme des années effectuées par les contractuels, une note du ministère de tutelle, les enjoint de demeurer à leurs postes en attendant leur intégration à la Fonction Publique.

Mais là où le bât blesse, c’est que les jeunes affectés à travers tout le pays percevaient difficilement leur pécule, et depuis le mois de décembre 2021, plus rien ne leur est versé. Cependant ceux-ci continuent d’assurer leurs charges et de répondre aux sollicitations de la tutelle, telles que la surveillance des examens, la participation aux secrétariats desdits examens, etc.

Mais contre toute attente, le ministère de l’Education Nationale s’est enfermé dans un silence et un mutisme qui inquiètent les enseignants contractuels. Ni leurs arriérés de pécule, ni leur statut, encore moins la suite à donner à leurs carrières ne font l’objet d’aucune communication de la tutelle. La vie de ces jeunes enseignants est un véritable chemin de croix.

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Six mois sans rémunération les obligent à une vie dégradante de mendicité, d’endettement et à la merci des usuriers. Comment peuvent-ils survivre dans de telles conditions à des centaines de km de chez eux pour certains, sans le moindre sou vaillant ? Quelle image de l’enseignant peuvent-ils laisser, dans un pays où les apparences comptent énormément ?

En outre, à la signature de leur contrat, ces enseignants ont été contraints à prendre l’engagement de ne faire aucune revendication. Ce qu’ils respectent scrupuleusement mais qui rend inaudible et invisible le calvaire qu’ils vivent. Comment en est-on arrivé à un recrutement massif d’enseignants contractuels ? Le déficit d’enseignants a toujours existé dans notre système.

Mais sous l’effet conjugué de la croissance de la démographie scolaire et la multiplication des collèges et surtout des collèges de proximité, le phénomène s’est amplifié. En amont, la planification du recrutement et de la formation des enseignants n’a pas suivi cette évolution. Il s’agit de la détermination des postes budgétaires à la Fonction publique, et la formation à l’Ens et dans les Cafop. Le recours aux contractuels est la solution palliative trouvée mais qui montre ses limites.

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C’est le résultat d’une politique d’improvisation, une politique non planifiée qui met des jeunes gens dans la déprime et dans la détresse dans une indifférence choquante. Leurs murmures (puisqu’ils ne peuvent pas faire de revendications) ne dépassent guère le seuil de leurs maisons. Mais l’espoir d’intégrer un jour la Fonction Publique leur donne la force de résister dans un pays où le nombre de chômeurs et de sans-emplois va crescendo.

Cette solution palliative ne doit plus prospérer.

Par ailleurs, si l’on déplore un manque criard d’enseignants dans de nombreux lycées et collèges des villes de l’intérieur, il est ahurissant de découvrir que des enseignants sont en sur effectif à Abidjan et dans les établissements des villes aux alentours, avec des heures de cours en dessous de la moyenne.

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Nombre de ces enseignants bénéficient de solides soutiens à la tutelle et choisissent eux-mêmes leurs lieux d’affectation. Le ministère de l’Education Nationale gagnerait à être plus rigoureux dans la gestion de son personnel enseignant et en finir avec cette sordide politique de copinage.

Mais arrive le jour où l’ivraie sera séparée du vrai.

Written by Nazaire Kadi

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