Le Général de Division Apalo Touré s'est adressé aux populations de Dabou les appelant à l'unité et à la cohésion sociale.
« …J'ai souhaité qu'on aille vite au contact des populations pour la simple raison que j'ai essayé de tirer profit des expériences passées. Alors, je vais vous citer quelques exemples. Quand il y'a eu la situation à Béoumi, le temps qu'on arrive, il y'avait déjà assez de morts.
A Daoukro, quand c'est arrivé, je me suis dit qu'il fallait vite y aller et là il y'avait déjà 3 morts je crois et ça c'est arrêté là. Pendant que j'étais à Daoukro, il y'avait le cas de Gagnoa et on avait déjà annoncé un mort. Et, chaque fois qu'on passait, ça s'arrêtait. On en parlait plus. Il n'y avait plus de mort.
Après Gagnoa, il y'a eu le cas de Bonoua où il y avait été annoncé deux morts. Nous y sommes vite allés.
Le lendemain, un dimanche, pendant que j'étais à la maison, le Sous-préfet m'a appelé pour me dire que ça ne va pas, parce qu'il y'a un adjoint au maire qui a dit certaines choses qui ont énervé les jeunes et que ça allait recommencer.
Je suis parti parlé aux jeunes et ils se sont calmés. Il n'y a pas eu de mort sauf que, comme le temps a fait son œuvre, ces jours-ci, il y'a eu un petit rebondissement. Mais, pendant que j'étais à Bonoua, la chose c'est déclenché à Divo. Mais là, on n'est pas vite intervenu. Il y'a eu dix ou douze morts.
Alors, tirant profit de tout ça, chaque fois qu'il y a quelque chose, il faut qu'on y aille très vite. Et là encore à Bongouanou, il y'avait encore des morts. Dès que nous sommes arrivés, on a parlé avec les jeunes qui se sont calmés.
La nuit on n'a pas dormi. On nous a appelés pour nous dire qu'il y avait des rumeurs d'attaque. J'ai dû appeler les gens avec lesquels on avait parlé pour leur dire que la Gendarmerie vous accompagne.
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Vous mettez deux Agnis et deux Malinkés dans un véhicule, vous faites le tour avec le mégaphone en parlant alternativement. Ils l'ont fait et les choses se sont calmées.
Jusqu'à présent, on n'a pas encore entendu parler de quoique ce soit. Donc, ici, je dis la même chose. Les chiffres que j'ai, s'ils sont vrais, c'est déjà trop. Donc, je souhaite qu'on y aille vite.
Hier, à Debrimou, j'ai parlé avec les jeunes et ils sont réceptifs. Ils m'ont même appelé. Certains m'ont même envoyé des messages. De là-bas, je suis allé parler aux Malinkés. Mais beaucoup étaient déjà partis à la maison à cause du couvre-feu. Mais, j'ai trouvé les responsables là.
Mon souhait est qu'on parle à la communauté malinké et aux autres parce qu'il y a un piège derrière. Le piège est que des personnes viennent d'ailleurs, vont attaquer les malinkés et ces mêmes individus vont attaquer les Adioukrous. Quand on attaque les malinkés, ces derniers pensent que ce sont les Adioukrous et vice versa.
Et c'est comme ça qu'on allume le feu. Quand le feu est allumé, ces personnes se mettent en retrait et étant sur les réseaux sociaux, ils disent qu'il y'a des microbes de part et d'autre.
Or, ce sont ces personnes qui sont les microbes. Il faut que nous, en tant que homme de loi, on se pose la question de savoir à qui profite le crime quand ces deux communautés se battent et s'entretuent ? Mais, dans tous les cas, c'est la jeunesse de Dabou qui est perdante. Et, je dis que si tu aimes vraiment chez toi, tu ne peux pas faire de sorte que ça soit une zone de combat.
Aujourd'hui, nous, Gendarmes, avons privilégié dans notre technique d'approche, ce qu'on appelle la Gendarmerie de proximité ou police de proximité car nous sommes aussi des policiers, des militaires.
Et donc, cette approche qu'on appelait avant « visite de secteur », ce sont eux qui avaient pour mission d'aller dans les campagnes pour discuter avec les chefs de villages, revenir avec les renseignements, et quand les sous-préfets et les préfets avaient des mots d'ordre, ils pouvaient les donner aux CB pour aller dire aux gendarmes. Cette technique d'approche monte jusqu'à la hiérarchie.
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Et quand il y a quelque chose de grave, il est bien autorisé que la hiérarchie, en fonction de la proportion du danger pour parler aux populations, prennent les dispositions idoines.
Et, c'est ce que j'essaie de faire. Police de proximité ou gendarmerie de proximité plutôt que d'attendre que quelque chose se passe pour sortir nos documents, les PV de prisons. Il faut plutôt prévenir. Et quand ça a déjà commencé. Il faut limiter les dégâts.
Donc je souhaite que nous puissions aller pour une bonne médiation. Qu'on nous voit ensemble avec des imams, des chefs de communauté, avec mes patrons les Ministres, le Sous-préfet et le Préfet. Qu'on aille vers les populations. Il peut arriver que dans certaines zones, les gens soient échauffés. C'est pour cette raison qu'on est sécurisé par mes collaborateurs. Et puis on crée les conditions d'apaisement pour leur parler et leur expliquer ce qui est derrière tout cela.
Nous savons, de par la position que nous occupons, que les gens veulent faire de Dabou une arrière base, mais ce serait dangereux. Nous militaires, nous avons des armes et on peut rester à Akouédo, tirer là et ça va tomber à Dabou.
On a les avions. Et si ça devient une arrière base, disons une rébellion par exemple ou bien de combattants qui attaquent Abidjan ? Vous avez vu ce qui s'est passé sur Bouaké qui a été bombardé. Est-ce que ce sera intéressant qu'on attende que tout soit gâté avant de venir bombarder.
Dabou, c'est une localité ivoirienne. Ce sont nos parents. Que ce soit Adjoukrou ou Malinké, ils sont nos parents. C'est la Côte d'Ivoire. Donc, il faut éviter ça. Parce que quand l'Etat a trop le dos au mur et qu'il ne sait pas comment faire, il peut dire mais pourquoi ne pas bombarder comme en 2004.
Les officiers n'ont pas le choix. Ils font comment ? Si tu n'as pas une possibilité sur comment sécuriser chez toi, tu fais quoi à un moment donné ?
Donc quand ça descend du ciel, que ce soit des armes qu'on tire depuis là-bas où on ne voit pas l'ennemi, mais on sait qu'il est là. Mais, ce sont des plans qu'on fait sur papier et on peut se tromper. Tu peux viser un point A et ça va tomber sur un point B. L'air joue son rôle. Tu peux vouloir taper ici, ça va tomber là-bas.
Tout ça ne doit pas se jouer à Dabou. Celui qui a envie de faire des choses, de détruire ou de faire la guerre, qu'il aille chez lui. Donc je veux dire à mes enfants, la jeunesse, qu'elle ne doit pas accepter que Dabou soit un centre de guerre ou de combat.
Et qu'ensemble, que ce soit Malinké ou Adjoukrou, ils doivent se tenir main dans la main à travers le contact qu'ils auront avec le service de renseignement ou nos forces, pour dénoncer tout ce qu'ils voient comme mouvements contraires et laisser les forces rapidement jouer leur rôle.
Si on s'accorde sur le principe, on va faire de sorte à pré-positionner les forces pour sécuriser les villages. De sorte que les jeunes gens se retirent de part et d'autre pour protéger déjà Dabou. Dans les autres villages exposés, on va positionner certains de nos éléments, qui auront la responsabilité de la sécurisation jusqu'à ce que les choses reviennent dans les normes.
Mais quand des jeunes gens qui ne sont pas habitués à la guerre, aux fusils ou à assurer et à assumer ces rôles là, pensent ou sont obligés d'assurer la sécurité de leurs villages avec des machettes et des calibres 12 ça devient trop dangereux ».