Côte d’Ivoire: Retour des escadrons de la mort?

Des escadrons de la mort sévissent en Côte d'Ivoire? Selon Médiapart, les conflits communautaires pré-électoraux à Dabou, Bongouanou, Daoukro, ont fait reprendre du service aux démons.

Des violences ont provoqué la d'au moins seize personnes à , dans le sud du . Alors que la
campagne pour l'élection du 31 octobre a réveillé les conflits communautaires, politiques sont
suspectés de souffler sur les braises de ces divisions.

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Kpass est une petite ville située dans la commune de Dabou à 45 kilomètres à l'ouest d'. Elle possède une jolie église perchée sur une colline qui surplombe la lagune Ebrié. Dans la matinée du 19 octobre, des habitants sortaient de l'édifice quand ils ont vu arriver au loin une tache noire qui évoluait étrangement à travers brousse dans leur direction.

Des rumeurs d'attaques circulaient depuis plusieurs jours. Alors, ils ont saisi leur téléphone et appelé les instituteurs. « Ils arrivent vers vous, partez ! »
En quelques minutes, Hervé* et ses collègues ont rassemblé les quelques enfants présents dans l'établissement et quitté les lieux pour aller se cacher.
Comme un essaim d'abeilles, un groupe d'hommes a pris d'assaut l'école, pillé les salles, brisé les conduits d'eau et mis le feu après leur mise à sac.

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Dans les classes, les portes en bois ont été défoncées, les petits cahiers rouges des CE2 déchirés. Témoin du temps qui s'est arrêté : sur un tableau noir, la date est restée figée au vendredi précédant ce funeste matin.

Dans sa fureur, l'escouade a aussi saccagé la dizaine de maisonnettes de fonction bâties sur le site pour les professeurs. Hervé entre dans ce qui fut chez lui, ému. Les éclats de vitres brisées craquent sous ses pieds, les murs sont noirs. Sur le sol, un épais liquide rouge fait une flaque au milieu du salon, près de la multiprise arrachée et du récipient é dans lequel on mettait les œufs frais. Les livres sont retournés et la télévision a été éventrée. « J'avais mis des années pour me la payer. Ici, il y avait à coudre de mon épouse… Tout a été saccagé, regardez ce chaos… Ça me fait très mal », dit-il en ravalant un sanglot.

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La maison turquoise juste à côté a connu un drame plus effroyable encore. Les professeurs ont réussi à sauver leurs familles et les enfants dont ils avaient la charge mais très vite, on s'est rendu compte que Benoît, le grand fils d'une collègue manquait à l'appel. « Ici, on a des classes du CP jusqu'au lycée. Dans la panique, on s'est occupé des plus petits, on a laissé les grands s'enfuir par eux-mêmes, ils étaient assez autonomes », explique Hervé bouleversé.
L'adolescent a été retrouvé, agonisant dans son sang à une centaine de mètres de l'établissement, les intestins ravagés de balles de calibre 12 et la boîte crânienne ouverte en deux à la machette. Il respirait encore mais est décédé avant d'arriver à l'hôpital.

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Ce déchaînement de violence a touché plusieurs villages à majorité Adioukrou, les 19 et 20 octobre derniers. Les habitants disent ne pas savoir l'expliquer.
Mais le est confus. Quelques-uns avouent finalement à l'écart du groupe : « On avait fait barrage contre troisième mandat […] Mais on ne veut pas le dire, on a peur que ça recommence. Les Adioukrous ont été attaqués mais les , les Nigériens et les Burkinabè, ils ne les ont pas touchés. Ce sont les représailles des Dioulas qui soutiennent Ouattara. Ce sont eux ! », dénonce-t-on.

Depuis qu', deux mandats consécutifs au compteur, a annoncé son intention d'en briguer un troisième, des rassemblements sporadiques
de mécontentement se tiennent dans plusieurs localités du pays. À chez l'ancien président Henri Konan Bedié (PDCI), à , fief de l'ancienne
députée et ex-Première , à , ville natale de l'ancien chef d'État , à , d'où est originaire Pascal Affi N'Guessan () mais aussi à , Akoupé, … Ces marches censées être pacifiques ont été émaillées d'incidents dont chaque camp se renvoie la
responsabilité. Elles ont été rapidement interdites par décret gouvernemental.

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En réponse, les partisans de l'opposition ont érigé des barricades sur les routes pour répondre à l'appel de plusieurs partis à un « boycott actif » du processus électoral pour « empêcher la tenue de toute opération liée au scrutin ».

Dans plusieurs endroits, ces « palabres » politiques ont accouché d'un monstre essentialiste que les ne connaissent que trop bien : les équipées meurtrières aux relents communautaires et ethniques. Dix ans après la crise post-électorale de 2010-2011, une nouvelle explosion de violences se fait jour.
Les jours qui ont suivi à Dabou et dans les environs, ce sont les Dioulas qui ont essuyé les tirs de balles et les coups de machette. Des représailles de la part de la communauté Adioukrou ? Elle jure que non. Pourtant à Mangrotou, la mosquée a été saccagée, les maisons calcinées et vidées de leurs occupants, un « vieux père » égorgé.

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« Ils sont arrivés tôt avec des fusils et des machettes, raconte Hamed, un habitant encore secoué. Ils ont brûlé ma maison avec mes enfants dedans. On s'est dit que c'était les jeunes Adioukrous… Mais ils étaient beaucoup armés. On a été chercher la , ils n'ont pas voulu nous aider. Ils nous ont dit “C'est juste les palabres avec les partisans du [parti d'Alassane Ouattara – ndlr] et ceux de l'opposition ».


Mais l'homme en djellaba rayée doute : tenté de faire porter la responsabilité aux Adioukrous, il admet toutefois que « ces gars-là sont bien entraînés ».
« Tout ça, c'est de la manipulation, les gens qui nous attaquent ne sont pas des gens d'ici, ce ne sont pas nos frères. J'ai jamais vu des gars comme ça. C'était pas blagué. On essaye de nous monter les uns contre les autres pour qu'on s'affronte entre communautés […]
Il faut qu'on garde la tête froide. »

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Tous sont bien conscients qu'en pleine campagne électorale, ces soudains affrontements visant une communauté puis l'autre ont quelque chose de suspect
et pourraient être pilotés par une main plus puissante que celles de modestes pêcheurs, agriculteurs et commerçants qui vivent paisiblement ensemble toute l'année. Mais il suffit que quelqu'un connaisse quelqu'un qui connaisse quelqu'un… qui a dit avoir reconnu, un visage familier parmi les assaillants ; qu'on brûle une ou qu'on épargne une famille qui sait parler le même dialecte que les agresseurs ; pour que l'étincelle, même artificielle, fasse tout flamber et que les voisins autrefois courtois se regardent méfiants.


« Notre tissu politique est très lié au tissu communautaire. Prenez un groupe ethnique, vous en aurez 70 % vers la même et vers le
même parti politique. Du coup, quand il y a un problème politique, ça débouche tout de suite sur des conflits graves », constate Arthur Banga, chercheur en relations internationales, spécialiste des questions de sécurité en Côte d'Ivoire.
Ainsi, les Baoulés, historiquement présents au centre et à l'est du pays sont traditionnellement proches du PDCI, le parti dirigé par Henri Konan Bédié. À l'ouest, le pays à forte population Bété penche plutôt pour la figure de Laurent Gbagbo du FPI historique devenu dissident.

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Written by Sariah Alma

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