Laurent Gbagbo, les 5 leçons de son retour

Omar Sanson fait une analyse de l'ex-président ivoirien Laurent Gbagbo, depuis le 17 juin 2021, en Côte d'Ivoire.

Voilà, après l'acquittement, le retour, et il est revenu auprès des siens. Qui est finalement responsable des 3000 morts de la crise post-électorale ? En tout cas pas Gbagbo. Même si nous avons entendu Me Méité affirmer sur le plateau de NCI que le manque de preuves et l'acquittement pouvaient signifier faiblesse de la justice dans la reformulation des charges, BenSouda a eu tout le temps, tous les moyens et tous les documents pour confondre les avocats de Gbagbo au finish « les preuves n'étaient pas que faibles, mais elles étaient d'une extrême faiblesse et d'un manque de clarté ».

Il n'y avait donc aucune raison juridique de retenir Gbagbo à La Haye, c'est donc logiquement qu'il est rentré en Côte d'Ivoire. A moins donc de vouloir reléguer au calandre grecque la vie de 3000 personnes, il incombe aux autorités judiciaires locales et internationales de reprendre la procédure pour soulager les parents de victimes. Nous insistons sur ce point parce que si la situation reste en l'état, on pourrait penser à un montage, un gros maquillage de plus de 3000 morts pour justifier certains faits.

LIRE AUSSI : Gbagbo présent à l'anniversaire de son épouse Simone ce 20 juin ?

La seconde leçon de ce retour, c'est la réconciliation qui devrait être la résultante de ce transfèrement. Que n'a-t-on pas entendu ? Si une justice autre se charge de Gbagbo loin du pays, cela facilitera la réconciliation des ivoiriens. Nous sommes en juin 2021. Le retour de Gbagbo, ce n'est pas celui du président du FPI, c'est celui de l'ex-président de la république. A ce titre, c'était à l'Etat ivoirien de faire le programme, de définir le parcours, de designer les responsables étatiques, les membres de la cellule des rois et chefs traditionnels, les religieux devant prendre part à l'organisation de cette cérémonie. Hélas, même KKB qui parait-il a été nommé pour nous réconcilier n'y était pas.

Ce matin, une amie me disait que le FPI n'a voulu associer personne. Nous avons répondu que c'était effectivement le signe que la réconciliation qui devait être le résultat du transfèrement a été un leurre. La réconciliation a échoué, parce que eux-mêmes qui devait creuser les sillons en 2011, ont passé le temps à tenir des propos guerriers, pour devenir lucides à l'avant dernier arrêt avant le terminus. C'est maintenant on se rend compte brusquement qu'il nous fallait un ministre de la réconciliation. KKB, où a-t-il déjà fait ses preuves en terme de conciliation ? au Kossovo, au Sahara Occidental, dans la région des grands Lacs, dans le Guébié ? on joue avec le feu.

La troisième leçon, c'est à nous qu'elle s'adresse, nous qui ne sommes pas avec eux au cœur, au sommet, mais nous qui sommes « utilisés », piétinés pour l'ascension de ceux qui ont fait de la politique leur travail. C'est d'ailleurs le seul point sur lequel je suis d'accord avec M. Diaby Issiaka qui défend les victimes de guerre : Gbagbo, Blé Goudé, Katinan, Picass, KB, Alcide Djéjé tous sont en liberté. Mieux, la plupart auront leur rappel des 10 ans (2011-2021), mais où sont les Seka Yapo, Abehi, Dogbo Blé, les bâtisseurs de clôture de Bonoua et ceux qui abattaient les tronc d'arbre sur l'autoroute ?

LIRE AUSSI : Côte d'Ivoire : voici le Top 10 des entreprises avec un chiffre d'affaires de près de 2 000 milliards FCFA en 2019

Il y'a quelques semaines, l'Etat ivoirien avait eu le courage de libérer Soro Kanigui…et maintenu Pulcherie Gballé en prison. Conclusion, comme pour paraphraser Hambak à Bonoua, « lorsqu'il s'agit de gâter c'est là les politiciens vous font appel. Après ils vont s'asseoir pour s'entendre ». Vers la fin, les politiciens s'entendront toujours. Sachons alors ce que nous voulons dans nos relations avec eux.

La quatrième leçon du retour de Gbagbo, C'est que le produit Gbagbo garde son prix et sa valeur intact dans le supermarché que constitue le cœur de ses sympathisants. De Paris à La Haye, en passant par Abidjan et Gagnoa, les pro-Gbagbo sont restés purs, fidèles, scotchés, dignes, tenant ferme le pacte de fidélité scellé avec leur mentor. Comment pouvait-il en être autrement ? Tout est dans la conviction. Lorsqu'on croit en un combat, le problème n'est plus la justesse dudit combat, mais la foi qu'on place en ses convictions. Ils ont été « formés » pendant 10 ans et ils ont cru en un homme et ses idées. Quelle constance.

Cependant, cette confusion entre d'une part un homme et d'autre part un parti et son idéologie constitue le problème le plus sérieux de la société ivoirienne. Il n'existe plus de partis, plus d'idéologies, mais trois vieux auxquels nous-nous identifions tous. Il nous a semblé même entendre hier, « balle au centre pour le retour de 2010 », c'est-à-dire que si en 2025 les trois sont encore candidats nous nous reconnaitrons en des hommes et non en l'avenir de la Côte d'Ivoire. Nous l'avons déjà dit pour Bédié, et Ouattara et revenons sur le cas Gbagbo aujourd'hui : Au plus profond de vous-même, l'homme qu'on portait hier a-t-il encore un avenir politique en tant qu'acteur actif ? Katinan, Aké N'Gbo, Damana, Blé Goudé… sont là, capable de former un noyau solide pour la postérité. Hélas, C'est Bédié, Ouattara et Gbagbo qu'on connait. Ne nous fatiguez pas avec vos gros français…

LIRE AUSSI: BAC 2021 : les convocations disponibles, voici le lien

Enfin, la dernière, ce sera la reprise du gros cirque auquel nous sommes soumis chaque fois que les membres de coalition sont en état de disgrâce avec le chef de la coalition. En 2010, Gbagbo était l'homme à abattre, traité de tous les noms. Certains ont même dit que sa place était à la Haye… 2021, nouvelle configuration politique : Amon Tanoh, Guillaume Soro, tous le PDCI et Bédié, Gnamien Konan, Anaky, Mabri… tous ont quitté le navire RHDP.

Dans les heures qui suivent, on les verra (pour les disponibles) au pèlerinage de Mama, affichant un sourire historique en serrant la main à Gbagbo. Ils parleront de coalition pas pour mutualiser leurs idées (si idée il y'a) en vue de penser à l'avenir du pays. Mais comment en arriver à bout du RHDP. Ainsi va la politique sous les tropiques.

Au moins pour 2025, il se pourrait qu'on ait enfin la dernière combinaison qui restait à former entre les trois vieux. Nous avons eu ADO-GBAGBO dans le front républicain contre BEDIE, ensuite BEDIE-ADO dans le RHDP contre GBAGBO il se pourrait qu'on ait enfin GBAGBO-BEDIE avec quel nom ? vivement 2025.

Written by Omar Sanson

Symbole de paix : Biden offre des lunettes de soleil aviateur à Poutine

Affaire BB Carla : La sœur de DJ Arafat s’est enfuie info ou intox ?