« D’Houphouët à Gbagbo, l’Eglise Catholique a toujours eu un message pour les hommes politiques dès qu’elle sent un danger poindre à l’horizon »

Nazaire Kadia revient sur l'actualité ivoirienne et l'acte du porte-parole du RHDP, Adjoumani suite à sa profanation de la Cathédrale Saint Paul.

Au terme de leur dernière assemblée en plénière, la 114ème du genre, la hiérarchie de l' de Côte d'Ivoire, a produit une déclaration interpellant le gouvernement et les hommes politiques à mettre tout en œuvre pour arriver à des élections apaisées et justes pour tout le monde.

Ce message a provoqué un véritable dans le microcosme politique ivoirien, sur les , et les journaux n'étaient pas en reste. Diversement apprécié, ce message n'a laissé aucun ivoirien indifférent.

Si l'opposition l'applaudit des deux mains parce que reprenant la quasi-totalité de ses revendications, le parti au pouvoir et le gouvernement le fustigent, et les militants du accusent l' de faire de la politique au lieu de s'occuper de . Un journal proche du pouvoir a même titré que les Evêques de Côte d'Ivoire sont devenus le porte-parole de l'opposition.

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La réaction du gouvernement est venue du porte parole-parole du gouvernement, le Touré qui critique la position du Clergé catholique, l'invitant à la retenue.Ces différentes réactions, nous confortent à l'idée que le message est passé et bien passé.

C'est aussi le lieu de signaler que ce n'est pas la première fois que l'Eglise Catholique intervient d'une façon ou d'une autre dans le débat politique du . Toutefois qu'elle estime qu'une situation peut mener à la déchirure du tissu social ou conduire le pays droit au mur, elle n'hésite pas à tirer la sonnette d'alarme.

Elle a toujours été dans une constante à des variations près, dans ses prises de position.Au début des indépendances et précisément en 1963, alors que battait le plein des faux complots qui ont permis d'embastiller ceux qu'on pensait être des opposants, et que la peur régnait sur le pays, Mgr Bernard Yago n'a pas hésité à s'illustrer.

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Il a prié sur le corps de M. Ernest Boka ministre puis président de la Cour Suprême qui se serait suicidé dans sa cellule. Malgré l'interdiction, Mgr Yago n'a pas hésité à dire la prière sur le corps du défunt, envoyant un message subliminal pas difficile à décrypter : il ne croyait pas à la thèse du suicide et c'était sa façon de protester. Cela lui a valu d'être traité de « fétichiste en tiare » par Houphouët-Boigny.

Sous la gouvernance de M. Henri Konan Bédié, au plus fort de l'antagonisme entre M. Bédié et M. Ouattara, toute la hiérarchie du fut embastillée et un mandat d'arrêt international fut lancé à l'encontre de M. Ouattara.

Le clergé catholique ivoirien ne fut pas aphone. Il a dans un message demandé la libération des , et partant de toute la hiérarchie du RDR emprisonnée. Il a prôné un climat d'apaisement pour préparer les élections de 2000, en exhortant le pouvoir d'alors d'écouter son opposition et de discuter en toute sincérité avec celle-ci.

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En 2010, au sortir de l'élection contestée, le , seul organe habilité à donner les résultats définitifs des votes chez nous et dont la décision ne peut faire l'objet de recours, a proclamé M. Gbagbo vainqueur de ladite élection. Si nombre de membres du clergé catholique avait pris acte de cette décision, des voix discordantes se firent entendre. Qui ne se souvient pas des homélies de l'Abbé Wadjas ? Qui ne se souvient pas de ses sorties dans les journaux.

Mgr Lézoutier, Evêque de n'était pas en reste et était très prolixe. Il a même qualifié la victoire de M. Gbagbo de « triste » lui demandant de quitter le pouvoir. Il a en outre ajouté que la défaite de M. Gbagbo en 1990 devant le président Houphouët-Boigny était plus honorable que cette « obscure victoire » de 2010.

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Tous ces rappels pour montrer que d'une façon ou d'une autre, l'Eglise Catholique a toujours eu un message pour les hommes politiques dès lors qu'elle sent un danger poindre à l'horizon. Et l'appréciation qu'on en fait dépend de l'angle dans lequel on se situe.

Le clergé a le droit de parler, le clergé doit parler, et le clergé ne se trouve pas en dehors de la société.

Written by Nazaire Kadi

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