Pour Ange Olivier Grah, voir la Cour de Cassation s'agiter pour participer à l'affaire Guillaume Soro dans laquelle elle n'a rien à faire, est un honte.
Lorsque j'ai appris que la Cour de cassation avait été saisie dans le cadre de l'affaire Soro Guillaume par le Procureur de la République, je me suis demandé quelles étaient les motifs d'un telle saisine alors qu'en violation de toutes les protections dont bénéficiaient ce dernier, il avait fait ouvrir une information auprès d'un Juge d'Instruction, et surtout quels en étaient les fondements textuels.
La réponse à ces deux questions et la décision de la Cour de Cassation m'autorisent à réitérer ce que je ne cesse de dire depuis le début de cette affaire : que c'est une vaste comédie dont le seul lien avec la justice est la participation de certains Magistrats qui en violation de leur serment, ont accepté et quelques fois pris l'initiative, d'y jouer un rôle. Si le Procureur, dans les conditions dans lesquelles il a agis, n'avait pas le droit dinitier de poursuites, la Cour de Cassation a encore moins le droit de se substituer aux juridictions du fond, en l'absence de tout texte qui l'y autorise.
Et la porte par laquelle elle a la prétention de passer pour le faire, en violation de la Constitution et de la compétence exclusive de la Haute Cour de Justice pour connaître des infractions de détournement de deniers public et de blanchiment d'argent qu'aurait prétendument commis Monsieur Soro Guillaume alors qu'il était Premier Ministre, est risible et même surréaliste.
La Côte d'Ivoire n'est pas une gare routière où la Cour de Cassation, parce qu'elle est une Juridiction Suprême peut se substituer en l'absence de tout texte à une autre juridiction, même si elle lui est inférieure, à plus forte raison, lorsqu'il s'agit d'une jurdiction spéciale.
Je sais que Monsieur Soro Kigbafori Guillaume est un ancien Président d'Institution pour avoir été Premier Ministre et Président de l'Assemblée Nationale, qu'il a été membre du gouvernement et qu'il est actuellement député de la République, mais j'ignorais qu'il avait également la qualité de Magistrat. En effet le Procureur a exercé son recours devant la Cour de cassation sur la base des articles 684 et suivants du Code de Procédure Pénale qui sont les dispositions qui régissent le système de protection judiciaire spéciale des Magistrats ivoiriens.
N'eût été l'atmosphère d'abus d'autorité et d'illégalité totale dans lequel baigne cette procédure, je me serai étonné de ce qu'après n'avoir pas respecté les règles qui protègent les différentes qualités que possèdent réellement Monsieur Soro Guillaume, le Procureur de La république choisisse de mettre en œuvre celles protégeant une qualité qu'il n'a jamais eu. Curieusement, faisant fi d'une telle énormité, la Cour de Cassation saisi en sa qualité d'organe de protecteur des Magistrats, se considère comme compétente pour agir comme protectrice d'une personne qui ne l'est pas en prenant la décision ubuesque de désigner un de ses membre comme Magistrat instructeur.
Le caractère totalement inique de la saisine du Procureur de la République et de la réponse que lui a donné la Cour de Cassation est la preuve que c'est d'accord partie avec la seconde que le premier a initié sa curieuse saisine. On essaie, dans le cadre de ce concert frauduleux d'user du poids institutionnelle de la Cour de Cassation dans l'opinion publique aussi bien nationale qu'internationale pour donner un vernis de la légalité a une procédure qui est pourtant aux antipodes des standards judiciaires, car baignant totalement dans le politique.
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La décision de la Cour de Cassation viole les différents textes instituant les systèmes de protection dont bénéficient le mis en cause, la Compétence constitutionnelle d'attribution reconnu par les Constitutions de 2000 et 2016 à la Haute Cour de Justice, l'abrogation de l'ordonnance n° 2000-285 qui donnait provisoirement compétence aux juridictions de droit commun pour connaître des crimes et délits commis par les membre du Gouvernement dans l'exercice de leurs fonctions prévue à l'article 46 la loi de 2002 relative à la Haute Cour de Justice et bien d'autres textes.
Par cette décision la Cour de Cassation s'introduit également dans les attributions de la Cour des Comptes car elle s'autorise a procédé indirectement, par le biais d'une procédure pénale au contrôle des finances publiques, ce qui relève constitutionnellement des attributions de cette Juridiction Suprême. Cela est d'autant plus grave qu'il s'agit de Fonds de souveraineté que cette Cour considère comme échappant à tout contrôle.
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Enfin, on ne peut poursuivre une personne pour détournement de certaines sommes que si elles lui avaient été confié. En l'espèce les fonds de souveraineté que détiennent les Premiers Ministres, les Présidents d'Institution et les Ministres ne sont que des parties des fonds de souveraineté du Président de la République qu'il met gracieusement à leur disposition selon des montants et des modalités qu'il définit. Par conséquent, s'il y a des comptes à demander c'est au Président de la République qui est le seul bénéficiaire de fonds dit souveraineté selon la coutume juridique qui a cours en Côte d'ivoire.
Nous pouvons affirmer pour conclure que la Décision de La Cour de Cassation est constitutive d'un désordre, qui s'ajoute au désordre. Le Droit pénal est régis par le Principe de la légalité qui exige une interprétation et une application stricte des lois. La Cour de Cassation a des attributions bien définis et c'est une honte de la voir se démener pour participer à cette forfaiture juridique et judiciaire dans laquelle elle n'a rien à faire, sinon choisir de rabaisser d'avantage le peu d'estime que les populations ont pour la Justice. Que Dieu ait pitié de notre pays !