Présidentielle ivoirienne d’octobre 2020 : comment le RHDP prépare son hold-up électoral

En plein Covid-19, le RHDP n'a qu'une seule idée : comment préparer son hold-up pour la présidentielle 2020 ? Une analyse du pro-Soro, Drissa Ouattara.

Les qui en doutaient encore, finiront par découvrir le visage hideux du Rassemblement des Houphouëtistes pour la démocratie et la Paix (). En pleine crise sanitaire liée au et alors même qu'une partie de l'opinion nationale lui reproche sa gestion approximative qui a fait le lit de la propagation à une grande vitesse du , le pouvoir d' n'a qu'une seule idée en tête : comment organiser le scrutin présidentiel d'octobre 2020 pour faire gagner son candidat, .

C'est tout le sens de la plupart des actes juridiques pris ces derniers temps à l'initiative du président de la République. Alors que la pandémie a déjà fait plusieurs morts à travers le monde entier, le chef de l'État ne trouve rien de mieux à faire, que de convoquer le congrès à , le 5 mars dernier, pour lancer son projet de révision de la Constitution. C'est dans cette ambiance qu'est survenu le 11 mars, le premier cas de coronavirus en Côte d'Ivoire. Le président du RHDP, face à la broncha suscitée par son inaction, réunit enfin le Conseil National de Sécurité (CNS) qui décide entre autres la fermeture des écoles, des frontières et d'interdire les rassemblements de plus de 50 personnes. Ce qui n'empêche pas le président de la République de laisser faire une réunion à Yamoussoukro des députés et sénateurs le 17 mars en vue de l'adoption de la révision constitutionnelle voulue par M. Ouattara.

« Ce régime donne l'image d'un pouvoir qui ne respecte pas les règles qu'il fixe, les règles qu'il se donne pour le fonctionnement de l'État. Voyez-vous, s'agissant de l'épidémie de coronavirus, le gouvernement a pris un certain nombre de mesures que nous avons saluées. Au nombre de ces mesures, il était interdit les rassemblements au-delà de 50 personnes. Une telle mesure visait à ne pas alimenter la chaîne de contamination. Mais voilà qu'au lendemain de cette mesure les gens vont se regrouper, en catimini, en secret, à Yamoussoukro, au-delà de 200 personnes, pour prendre une décision aussi importante. Il faudra que le gouvernement nous donne l'occasion de voir autre chose que de violer chaque fois les règles établies ou qu'il se donne. On ne pouvait pas imaginer qu'il puisse y avoir ce congrès après qu'on a pris ces décisions. C'est inadmissible. On a donc voulu jouer sur le fait que les Ivoiriens en majorité et nous de l'opposition en particulier allions respecter les mesures arrêter et, ils sont allés en catimini adopter cette révision. Ce n'est pas sérieux », a dénoncé chez un confrère ivoirien Dr Daniel Aka Ahizi, ancien ministre de l'Environnement et des eaux et forêts.

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Qu'à cela ne tienne, le camp Ouattara poursuit son passage en force. Et comme pour donner sa bénédiction à cette violation des mesures prises par le CNS pour freiner la propagation du coronavirus, l'ancien gouverneur de la BCEAO, promulgue deux jours plus tard cette révision constitutionnelle. « Le Président de la République, Son Excellence Monsieur Alassane Ouattara, a procédé, ce jeudi 19 mars 2020, à la signature de l'acte de promulgation de la loi constitutionnelle n°2020-348 du 19 mars 2020 modifiant la loi n°2016-886 du 08 novembre 2016 portant Constitution de la République de Côte d'Ivoire.  La promulgation de cette loi, qui parachève la procédure de révision constitutionnelle initiée par le Président de la République, conformément aux dispositions de l'article 177 de la Constitution, fait suite à son adoption par le Parlement réuni en Congrès et à la décision de conformité rendue par le Conseil Constitutionnel », apprennent les ivoiriens ce jeudi 19 mars.

Mais ceux qui se persuadaient que le chef de l'État et son camp mettraient un coup d'arrêt à leur projet de hold-up électoral, se sont à nouveau mordu les doigts ce mercredi 8 avril. Alors que le conseil des ministres ne s'était plus réuni depuis le 11 mars, Alassane Ouattara qui a pris ses quartiers dans la cité balnéaire d'Assinie pour un , convoque son équipe pour une réunion gouvernementale au cours de laquelle il prend une ordonnance pour modifier le code électoral. « Le Conseil a adopté une ordonnance portant révision du Code électoral ainsi que son projet de loi de ratification. Compte tenu de la situation exceptionnelle liée à la pandémie du Covid-19 et des mesures contraignantes nécessitées par l'impératif de riposte nationale qui rendent difficile la tenue des réunions parlementaires, le Conseil a adopté l'ordonnance portant révision du Code électoral.

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Ce nouveau dispositif met en cohérence le Code électoral avec la nouvelle Constitution, notamment dans ses dispositions précisant les dates du 1er et du second tour de l'élection présidentielle ainsi que celles relatives à l'élection des Sénateurs. Il apporte, en outre, sur la base des délibérations de la concertation entre le Gouvernement, l'ensemble des partis et groupements politiques et la société civile, des innovations majeures qui se résument pour l'essentiel aux points ci-après : l'institution du parrainage citoyen pour l'élection présidentielle ; le relèvement du niveau de cautionnement à 50 millions pour l'élection présidentielle ; l'abaissement à 5% du taux de suffrage requis pour le remboursement du cautionnement ; la suppression de la référence aux « intérêts économiques et sociaux » comme condition d'inscription sur la liste électorale, et son remplacement par des critères plus objectifs se référant au « domicile », à la « résidence », au « lieu d'inscription au rôle des contributions » et au « lieu d'immatriculation des Ivoiriens à l'étranger », à l'effet de lutter contre la transhumance des électeurs », apprend-t-on du communiqué du conseil des ministres. 

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« C'est un déni de démocratie, l'urgence devrait de s'appesantir sur la lutte contre le covid-19 où le gouvernement tâtonne à trouver des mesures idoines pour ne pas que ce virus fasse un carnage au sein des populations », a critiqué un internaute. « Du point de vue de la morale, est-ce que vous voyez les conditions dans lesquelles cette révision s'est passée ? C'est au moment où les gens sont dans la peur, dans l'angoisse, où il n'y a pas d'urgence à régler ce genre de questions, on a fait traîner toutes les mesures (de lutte contre le coronavirus, ndlr) pour pouvoir adopter cette révision, au risque de voir la maladie prendre de l'ampleur. On a fait traîner volontairement la prise de mesure contre la pandémie, pour pouvoir faire cette modification.

Pour moi, c'est totalement immoral. En outre, c'est une révision qui est contraire à l'éthique parce que c'est une révision qui a été organisée et qui s'est faite dans le dos du peuple. Voyez-vous, le président du République est un mandataire du pouvoir qui appartient au peuple. La Constitution, c'est quelque chose qui appartient au peuple. C'est dans la Constitution que le peuple définit le contrat social. C'est comme la maison du peuple. Mais, lorsque vous êtes mandataire de quelqu'un, que fais-vous, lorsque par exemple vous gérez la maison de quelqu'un et que vous devez apporter des modifications à cette maison ? A mon sens, vous prenez d'abord le soin d'en informer le propriétaire », avait relevé des jours auparavant le magistrat dans une contribution. Puis de prononcer son réquisitoire : « Une Constitution, elle vaut pour ce qui est écrit là-dedans mais, elle vaut aussi par ce qui n'y est pas écrit.

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Une Constitution a une si grande vision de la fonction de président de la République, qu'on ne peut pas imaginer que le chef de l'État puisse faire ce qui est en train de se passer sans en informer le peuple. C'est une question de logique, de morale. Le président de la République, ce n'est pas n'importe qui. Il a beaucoup de pouvoirs mais dans certains domaines, dans l'usage de ces pouvoirs, il doit pouvoir s'autocensurer, il doit s'autolimiter, parce que la grandeur de sa fonction l'exige. Malgré que la Constitution lui reconnaît la possibilité d'initier des projets de loi, le président de la République peut-il initier une loi pour légaliser le vol par exemple ? Peut-il initier une loi pour légaliser le mariage pour tous en Côte d'Ivoire ? Je ne crois pas qu'il puisse faire cela parce que s'il le fait, les gens pourraient se révolter. Il y a donc une forme de limitation des prérogatives du chef de l'État. (…) Tout est une question de conception de ses fonctions.

Malheureusement, notre président de la République n'a pas une conception de ces fonctions-là. Mais en plus, il s'est même organisé pour ne pas qu'on puisse tenir informé le peuple. Non seulement, de façon initiale, il s'est adressé directement à l'Assemblée nationale et il a continué par la suite toujours sans informer le peuple, sans s'adresser au peuple pour s'expliquer. Par la suite, il s'est encore organisé pour que les députés qui sont les représentants du peuple, c'est-à-dire qu'ils sont eux aussi des mandataires du peuple, ne puissent pas aller vers le peuple, pour prendre son avis (…) Ajouté à tout ça, le fait qu'un texte de la CEDEAO prescrit qu'on ne peut modifier les lois qui ont un lien avec les élections que 6 mois avant le scrutin ».

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Mais dans son projet de hold-up électoral, il n'y a pas que les leviers juridiques qui intéressent le régime RHDP. Cela fait plus d'un mois que le régime d'Alassane Ouattara a relancé l'identification des populations. Cette opération vise à attribuer aux citoyens ivoiriens de nouvelles cartes nationales d'identité. En dépit de la protestation de l'opposition dans son ensemble qui suspecte notamment le pouvoir d' de faire enrôler des personnes qui n'ont pas forcément le statut de citoyens ivoiriens cette opération poursuit son bonhomme de chemin, en cette période de crise sanitaire. « Les Ivoiriens n'ont pas besoin de ça, ils ont besoin qu'on soit sérieux. Donc, cet enrôlement, c'est comme si le gouvernement envoie les gens à l'abattoir pour les contaminer. Nous, on a demandé qu'on arrête, d'autant plus que ce n'est pas efficace (…) On a 11 millions de personnes. Dans combien de temps, on va finir ? Ça veut dire que ce n'est plus efficace, mais les risques de contamination sont là », a critiqué l'ancien ministre de la Santé, Kakou Guikahué, secrétaire exécutif en chef du parti d'.

Written by Drissa Ouattara

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