Affi N’Guessan : « Il y a de nouveaux éléments qui vont faire plier le régime Ouattara »

Pascal Affi N'Guessan

Affi N'Guessan : « Il y a de nouveaux éléments qui vont faire plier le régime Ouattara ». Une interview accordée à Ledebat TV.

La fête de la liberté ne sera plus le 5 mais le 12 mai pourquoi ?

La fête de la liberté aura lieu à Yopougon, le 12 mai et non le 5 mai parce que, nous avons perdu l'un de nos grands talents en l'occurrence . Ses obsèques ont lieu dans la même commune de et sur la même place . Par respect pour sa mémoire et aussi permettre à nos militants de participer à la commémoration de ce grand artiste, nous avons décidé de reporter la fête au 12 mai.

Comment se fait-il qu'en 7 ans de pouvoir du président Ouattara, l'opposition n'est jamais arrivée à lui soutirer quoi que ce soit, du point de vue des revendications. Dernière preuve en date : la réforme de la que vous n'avez pas pu faire imposer à l'Etat.

C'est parce qu'il n'est pas démocrate. Dans les pays démocratiques, les dirigeants sont à l'écoute de l'opinion et en particulier de l'opposition. Pour analyser et décider des inflexions à apporter à leur politique, s'il s'avère que l'opposition dit des choses intéressantes. Dans une dictature, on fait ce qu'on veut, on n'écoute pas l'opposition, on fonce bille en tête, on impose toutes ses vues, et on crée des situations de conflits et de tensions.

Est-ce que ce n'est pas l'opposition elle-même qui manque de stratégie ?

Ce n'est pas une question de stratégie, c'est une question d'affirmer ses convictions, de faire ses analyses, c'est la responsabilité de l'opposition. La mission de l'opposition est d'être un contrepouvoir, ceux qui regardent la manière dont le pays est gouverné, qui décèle les insuffisances, qui exprime les aspirations des populations c'est-à-dire, au lieu de faire ceci, il faut faire cela. Il appartient aux dirigeants, s'ils considèrent qu'ils travaillent pour l'intérêt du peuple, de se rendre compte qu'il y a des changements à apporter et d'y apporter des réponses.

Comment pouvez-vous faire ce procès au président Ouattara quand l'opposition elle-même est très divisée ?

Ce n'est pas une question de division, mais plutôt de pertinence des idées qui sont émises, ça peut être une idée émise par un seul individu, un leader d'opinion qui n'est même pas dans la vie politique. Mais, si on se rend compte que ce qu'il dit est pertinent et mérite d'être pris en compte, il la prend en compte sans  savoir s'il y a un million de personnes derrière.

Parce que ce ne sont pas un million ou deux millions de personnes qui peuvent avoir une idée généreuse. Un universitaire, un homme politique, un écrivain peut faire une proposition et il faut en tenir compte. C'est comme ça que fonctionne une démocratie.

Aujourd'hui on a l'impression que quoique vous fassiez, en 2020 ce sera cette commission électorale indépendante qui devrait organiser les prochaines présidentielles ?

Nous ne sommes pas dans cette posture, nous considérons que nous menons un combat qui aboutira. Il nous appartient d'être persévérant, et étant donné que nous n'avons pas d'autre choix pour que la commission change, il y a une grande majorité qui prône le changement de la constitution. Au-delà des partis politiques, il y a la société civile, qui pour la première fois est mobilisée à travers un groupement pour le plaidoyer en faveur du changement, qui a eu l'audace de traîner le gouvernement ivoirien devant la Cour africaine des droits de l'homme et des peuples et qui a gagné son procès. Il y a un changement, il y a de nouveaux éléments qui vont faire plier le régime.

Le gouvernement n'est pas apparemment pressé d'appliquer cette décision du changement de a commission ?

La décision n'a pas été prise, mais cela ne veut pas dire que le processus n'est pas en marche. Le processus est en marche à l'intérieur du pouvoir. La semaine prochaine, il y a une grande réunion de la société civile en relation avec les partis politiques, pour harmoniser une position commune, pour adopter un projet commun entre l'opposition et la société civile. Le combat continue. Nous ne sommes pas pessimistes, nous allons obtenir gain de cause.

Confirmez-vous que le FPI a vraiment retiré ses représentants au sein de cette commission ?

Nous avons affirmé le principe que nous ne nous sentons plus concerné par ce qui se fait par la commission électorale indépendante, y compris par ceux que nous avons désigné, s'ils s'évertuent à siéger. S'ils le font, ils ne le font pas en notre nom mais en leur nom personnel. Nous continuons de leur demander de démissionner de cette commission parce qu'ils ne servent pas la cause nationale en accompagnant ce que la commission électorale indépendante fait à l'heure actuelle.

Et s'ils ne vous écoutent pas ?

De toutes les façons nous ne nous sentons pas concerné. Parce que nous n'allons pas prendre des armes pour aller les chercher à la CEI, nous les avons désavoués politiquement, ils ne nous représentent plus, ils n'ont plus notre confiance comme la CEI n'a pas notre confiance.

D'abord, cette institution est là pour instaurer confiance, disons faire en sorte que tous les acteurs politiques soient rassurés sur ce qui se fait. Si ce n'est plus le cas, c'est qu'elle n'a plus sa raison d'être. Et ceux qui y sont, ne travaillent pas pour l'intérêt du pays.

Il est quand même curieux que c'est l'institution de la République autour de laquelle il n'y a jamais eu de consensus. Pourquoi ?

Elle est cœur de l'enjeu politique, au cœur de la compétition pour la conquête du pouvoir. C'est véritablement le noyau de la bataille pour l'accession au pouvoir qu'effectivement il y a beaucoup de débat, beaucoup de confrontation autour de celle-ci. C'est pour cela aussi que les acteurs politiques se mettent autour de la même table pour adopter une commission électorale consensuelle, de manière à ce qu'elle ne soit plus la source de confrontations et de violences politiques comme on l'a observé en 2010-2011.

Mais comment peut-il en être autrement quand à l'intérieur de cette commission, il n y a que des représentants, il y a surtout des représentants des partis politiques ?

C'est pour cela que nous nous disons qu'elle doit être équilibrée. La présence des partis politiques peut s'avérer  nécessaire parce que certains acteurs peuvent ne pas compter sur une commission  exclusivement composée de la société civile.

Il faut que la répartition des postes soit équilibrée, de manière à ce qu'aucune entité ne soit dominante. C'est pourquoi nous proposons, une commission à trois pieds. Un pied représentant le parti au pouvoir, Un deuxième représentant l'ensemble de l'opposition et un troisième représentant la société civile.

Pourquoi ne pas en faire une commission purement technique  et non politique?

Cela pourrait advenir dans les années à venir.

Pourquoi pas maintenant ?

Parce que maintenant, cela pose beaucoup de risques, compte tenu de la culture politique en Côte d'Ivoire, compte tenu du fait que la société civile responsable est encore embryonnaire. C'est la première fois que cette société civile prend des risques pour jouer sa partition  dans le jeu politique en Côte d'Ivoire.

Il faut que cette société civile, progressivement donne confiance aux uns et aux autres. Si nous arrivons à une situation où nous savons que nos compatriotes sont suffisamment mûrs, responsables et audacieux pour travailler dans l'intérêt de tous, il n'y a pas de raison qu'on n'ait pas une commission électorale dans laquelle ne siège pas les partis politiques. Pour le moment, aucun élément ne nous permet de prendre ce risque.

Parlant de l'unité dans votre parti, on a l'impression que vous n'êtes pas entendu ou qu'avec les autres membres de votre famille politique d'origine, vous n'avez pas la même vision de cette unité. Est-ce que vous ne faites pas un triple tort aux militants, au Président Gbagbo et à la démocratie ivoirienne ?

Il faut d'abord dire que les choses évoluent dans le sens de l'unité. Quand on se focalise sur l'élite de la fronde, en particulier sur monsieur Sangaré, on ne voit pas le mouvement qu'il y a autour de lui. On ne voit pas de mouvement dans la base ou de plus en plus de militants nous rejoignent parce qu'ils se rendent bien compte que la fronde n'a aucun avenir.

Ils se rendent bien compte que la division est préjudiciable au parti et qu'à la limite, il faut faire l'unité parce que c'est dans l'unité que se trouve l'avenir du parti et même de la Côte d'Ivoire. Il y a même des jeunes qui étaient dans la fronde qui ont créé ce qu'on appelle les cybers activistes unis pour l'unité du FPI. Il y a beaucoup de mouvements.

Nous-mêmes qui sommes sur le terrain, nous voyons qu'il y a des appels de plus en plus fréquents émanant de certains militants qui étaient dans la fronde pour des rencontres, des meetings d'information pour voir comment ils peuvent s'impliquer dans la vie du parti. Il y a même des cadres qui souhaitent être candidats aux élections municipales et régionales à venir qui étaient hier dans la fronde et qui nous approchent pour voir comment ils peuvent l'être sous l'égide du FPI.

Il y a des mouvements et nous pensons que ceux-ci vont gagner le petit noyau de radicaux qui jusque-là ont refusé toute possibilité de rencontre et d'unité.

Vous dites  le petit noyau ?

Oui, nous nous connaissons. Nous connaissons ceux qui sont vraiment très réticents par rapport à l'unité parce qu'ils n'y voient pas leurs intérêts personnels, pas pour la cause du parti. Ils ne sont pas aussi nombreux. Ceux qui veulent faire la politique, qui veulent être utiles à la Côte d'Ivoire et qui se rendent compte qu'ils ne peuvent pas l'être s'ils restent dans cette posture, sont les plus nombreux.

Je pourrais même dire au moins 90% de ceux qui aujourd'hui dans la fronde. Maintenant c'est de voir comment nous faisons étant donné tout ce qui a été dit, comment faire pour créer cette unité, sans que personne n'ai le sentiment d'avoir perdu un combat. La question c'est la gestion des sentiments, la gestion des palabres qu'il y a eu, c'est cela que nous allons organiser.

C'est ce que nous allons faire dans les semaines à venir. Sinon tout le monde sait que si nous ne sommes pas unis, nous faisons du tort à nous-mêmes, en tant qu'acteurs politiques, nous faisons du tort à nos militants, je dirai à la Côte d'Ivoire entière et en particulier le président qui a besoin d'un parti unifié pour le soutenir dans ce combat pour la liberté et pour la dignité.

Que vous suggère aujourd'hui au ce qui se passe au  ?

Je l'ai déjà dit à un moment donné il faut que le RHDP finisse sa course. Une organisation quand on la met en place, elle parcourt en général trois étapes. La dernière étape est celle de la décadence.

C'est-à-dire que vous proclamez la mort du RHDP ?

Oui, le RHDP a fini sa mission historique si on peut l'appeler ainsi. Cette mission nous a été préjudiciable. Le mouvement a été créé pour vaincre le FPI et Laurent Gbagbo, ils y sont arrivés, cette plateforme n'a plus sa raison d'être. Ce qui se passe à l'heure actuelle est la manifestation de ce que cette plateforme n'a plus rien à apporter à la Côte d'Ivoire, ni même ceux qui l'ont fondé.

Pour l'opposition ç'aurait été une belle aubaine si elle était unie ?

De toute façon l'opposition est en train de s'unir pendant que le pouvoir est en train de dégringoler. C'est aussi cela la logique du jeu politique.

« Le PDCI ne veut pas faire cavalier seul, il souhaite être le candidat du RHDP, ça veut dire qu'il a une adversité, ils sont conscients qu'il faut rester ensemble si on veut gagner »

Est-ce que cette mort proclamée que vous annoncez, si elle arrivait, ce ne serait pas aussi du fait qu'on fasse du RHDP une véritable opposition parce que si l'opposition était très unie, c'est sûr qu'il se garderait d'avoir ce genre de crise interne. Qu'est-ce que vous en pensez ?

Je crois que la crise est liée au fait qu'un des camps veut rester. L'autre camp est persuadé que ceux qui ont dirigé la plateforme sont devenus largement impopulaires et que les Ivoiriens ne souhaitent plus avoir comme les dirigeants de la Côte d'Ivoire de demain. C'est cela qui aiguise leur appétit.

Ce n'est pas tellement la posture, la faiblesse ou la force de l'opposition. C'est la conviction que le PDCI a aujourd'hui que le RDR ne peut plus diriger une coalition, qu'il a échoué et que le PDCI peut aujourd'hui prendre la direction de cette coalition, que le PDCI est fondé à revendiquer cela, d'autant que c'est l'objet d'un accord qu'ils ont conclu. C'est cela qui les amène. Sinon le PDCI ne veut pas faire cavalier seul, il souhaite être le candidat du RHDP, ça veut dire qu'il a une adversité, ils sont conscients qu'il faut rester ensemble si on veut gagner.

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