Affaire « un député gifle une policière » et toujours des questions sans réponses

Dans l'affaire « un député gifle une policière », les avis juridiques diffèrent. En dehors de tout consensus, la polémique enfle et les questions restent en suspens.

Le lundi 29 janvier 2018, Yah Touré, député issu du Parti démocratique de Côte d'Ivoire (PDCI d'Henri Konan Bédié), élu sous la bannière du Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (, mouvance présidentielle) est inculpé pour « violences et voie de faits, outrage à agent », par un tribunal correctionnel du (), statuant en matière de flagrant délit. Les faits remontaient au vendredi 26 janvier.

Selon Richard Adou, procureur de la République du tribunal du Plateau, « aux termes de l'article 92 de la constitution, le député ne peut être arrêté et poursuivi, sans l'autorisation du parlement qu'en cas de flagrant délit. Dans le cas d'espèce, il s'agit bien d'un délit flagrant. D'ailleurs l'honorable a failli être lynché par la clameur publique, lorsqu'il a commis l'acte, comme l'indique l'article 53 du code de procédure pénale ». Le premier alinéa de l'article 53 sur lequel s'appuie le procureur de la République dispose qu'« est qualifié crime ou délit flagrant le crime ou le délit qui se commet actuellement, ou qui vient de se commettre. Il y a aussi crime ou délit flagrant lorsque, dans un temps très voisin de l'action, la personne soupçonnée est poursuivie par la clameur publique, ou est trouvée en possession d'objets, ou présente des traces ou indices, laissant penser qu'elle a participé au crime ou au délit ».

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Me Abdoulaye Ben Méité, avocat du député, estime, pour sa part qu'il y « interprétation de la loi », d'autant que son client « est parti à la police, s'entretenir avec la policière et il n'y a rien eu. Il est rentré chez lui à la maison. Quelques jours après, on l'appelle pour lui dire qu'il doit se rendre à la préfecture de police pour se faire entendre. Il y arrive et on le défère devant le parquet ».

En définitive, sur le chapitre du « temps très voisin de l'action », en matière de flagrant délit, la définition reste à géométrie variable. Le procureur général Marie-Léonard Lébry le reconnaît. Pour lui, « il aurait fallu laisser les juridictions ivoiriennes faire œuvre de jurisprudence, en laissant juger le député, pour les faits qui lui sont reprochés. Ces juridictions auraient fixé  définitivement la notion de temps très voisin de l'action. Malheureusement, cela n'ayant pas été  possible à cause de la suspension des poursuites, chacun, accusation et défense, prêche pour sa chapelle, et en fonction des intérêts qu'il protège et défend ».

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La libération, quelques heures après la délivrance par le procureur, d'un mandat de dépôt, suscite encore des questions. Alors que déclare avoir ordonné, « la suspension des poursuites et de la détention » du député, sur demande de l'assemblée nationale, conformément « aux termes de l'article 92 in fine de la constitution ». Tout en se réjouissant de la mise en liberté de son client, Me Méité s'étonne de la procédure ayant abouti à celle-ci. « Il ne saurait revenir légalement au procureur de la République, sans violer la loi, de mettre mon client en liberté de façon aussi clandestine, explique-t-il. Parce que quand le procureur délivre un mandat de dépôt, il ne peut plus lever le mandat lui-même. Les seules qui le peuvent, ce sont les juridictions de fond ». Pour l'avocat, « il y a eu une méprise de la loi. Une telle attitude pour moi, est manifestement illégale ».

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Tandis que la polémique se poursuit dans la presse et enfle sur les réseaux sociaux, Jeune Afrique apprend que le commissaire du 30è arrondissement de police d', quartier où les évènements se sont produits, a reçu une demande d'explication de sa hiérarchie, pour avoir laissé le député rentrer chez lui, le jour de l'incident, sans s'en référer au procureur de la République.

Written by Prince Beganssou

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