« Si Bédié et ADO ne sont pas candidats en 2025, Affi sera le prochain Président de la Côte d’Ivoire » – Jean Bonin

Jean Bonin décrypte la récente sortie médiatique de Pascal Affi N'Guessan, président du FPI, relative à la présidentielle de 2025.

J'ai une nette avance sur beaucoup d'hommes politiques ivoiriens. Si Ouattara et Bédié ne sont pas là, qui au RHDP et au PDCI peut me battre ? Il y a longtemps que je me prépare et je me suis préparé. Après avoir occupé les fonctions de maire, député, ministre et premier ministre, il ne me reste plus qu'à être Président de la République. En 2025, donnez moi le pouvoir pour la renaissance de la Côte d'Ivoire”.

Le président Affi a complètement raison. Analysons ?

1 – EN CE QUI CONCERNE ADO ET HKB

En 2025 Ado aura 84 ans. Il a annoncé son intention de se retirer. Je le crois sur parole car si AGC n'était pas brutalement décidé en 2020, il ne serait plus dans la course à la présidentielle en étant un candidat de substitution, par défaut.
Bedié, lui aura 90 ans. Waouuu ! Commencer un 1er mandat présidentiel à cet âge serait inédit dans l'histoire politique internationale et mériterait une inscription au Guiness Book des records. Nonobstant cela, il n'en démord pas. Il tient à sa revanche contre Ado. C'est sa principale motivation politique aujourd'hui.

Affi aura du mal à battre ces deux là parce que leur statut d'ancien Chef d'Etat, leur fortune personnelle, la bonne implantation de leur parti et leurs hommes sur le terrain, leur aura auprès de certaines populations et leur très forte emprise communautaire plaident largement en leur faveur. Gardons à l'esprit que, malheureusement, nous sommes dans un pays où la qualité d'un programme de gouvernement et du projet de société apparaît secondaire dans le choix des candidats. Hélas !

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2 – EN CE QUI CONCERNE LAURENT GBAGBO ET LE PPA-CI

Contrairement à Simone Gbagbo et d'autres cadres du FPI, il n'a pas bénéficié de la loi d'amnistie de 2018. Il n'est donc pas actuellement sur la liste électorale. C'est cala qui l'a éliminé de la présidentielle de 2020. Cela reste valable pour 2025, sauf s'il arrive à négocier une amnistie auprès du Pdt Ouattara. Ce n'est pas gagné d'avance vu les propos ethnicistes et insurrectionnels qu'il ne cesse de proférer à chacune de ses sorties. Tous attendaient de lui des messages de rassemblement de sa famille politique et d'unité nationale. Hélas, on ne se refait pas à cet âge là. Les vielles habitudes ont la vie dure et c'est ce qui explique aussi qu'à cet âge il n'adresse plus la parole à son (ex) épouse, à son ex codétenu et son ex président de parti.

À juste 3 ans de 2025, le PPA-CI, contrairement au PDCI, RHDP et FPI, est au stade où il doit sillonner le pays pour se faire connaître et présenter ses hommes aux populations. Lui qui n'a toujours pas d'existence légale, n'a eu des élus EDS à l'élection législative de 2021 que parce qu'il s'est accroché, telle une sangsue, au PDCI. Lequel en retour a investi sous sa bannière nombre de ses candidats qui, sinon, auraient mordu goulûment la poussière face aux candidats du PDCI, du FPI ou du RHDP.
Ce ne sont pas les Odette Lorougnon, Lida Kouassi ou Agnès Monnet qui, tous, ont été lamentablement étalés dans ce qu'ils considéraient comme leurs imprenables bastions qui me contrediront. Le réveil a été douloureux.

3 – EN CE QUI CONCERNE LA RELÈVE AU RHDP, PDCI ET PPA-CI

Tous, ils sont pris entre le marteau et l'enclume. Si, à l'image d'un Billon ou d'une Yasmine Ouegnin au PDCI, ils essaient de s'affirmer politiquement ou de s'émanciper, très vite seront rappelés à l'ordre ou, pire, risqueraient la suspension ou l'exclusion du parti. KKB l'a après a ses dépens. Dans ces partis après le Gourou c'est le Gourou. Le PPA-CI illustre bien cette posture par son “Gbagbo ou rien”. Au PDCI comme au PPA-CI, pas question d'envisager un plan B. Suicidaire.

L'affirmation de soi est nécessaire pour quiconque a des ambitions présidentielles. On ne le devient pas par délégation. Affi l'a très vite compris et c'est cela qui lui vaut d'être combattu par ses ex amis. Don Mello, Anaki et Koulibaly sont eux aussi passés par là. Gbagbo déteste qu'on puisse lui faire de l'ombre. Il veut rester seul maître à bord. Don Mello a fini par rentrer dans les rangs. Contrairement à Affi qui lui a su résister, Anaki et Mamadou Koulibaly ont été poussés à la sortie pour aller créer un autre parti.
Au PPA-CI, comme au PDCI, la jeune génération attend d'être adoubée pour se lancer. Ils sont nombreux à attendre dans l'anti chambre d'être le candidat « nommé » par le leader. Aucun n'est capable de réussir ce que le stratège Affi a réussi avec Gbagbo ; le pousser lui-même à la sortie. Là-bas, les cadres n'ont pas encore compris que la présidentielle c'est, comme le disait François Bayrou, “la rencontre d'un homme et d'un peuple” et non d'un parti et d'un peuple. Elle est d'abord une équation personnelle avant d'être collective.

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4 – EN CE QUI CONCERNE LE PDT AFFI

C'est homme brillant, ouvert et rompu à la chose politique depuis plus d'une trentaine d'année. On ne s'impose pas à toutes les élections dans une région qui vote traditionnellement PDCI sans avoir de sérieuses compétences politiques.
Lorsqu'il a quitté la primature en 2003, suite aux accords de Marcousis, alors que ses autres camarades de parti luttaient pour être maintenus au gouvernement ou avoir de juteux postes de responsabilité auprès de Gbagbo, Affi, lui, est resté concentré sur le contrôle du parti.

Lorsque fleurissaient de multiples mouvements de soutien à Gbagbo, dont le CNRD de la vice-présidente du FPI Simone Gbagbo, du MJG de l'inénarrable Al Moustapha ou encore de la Nacip de la girouette Sam l'Africain, le président Affi est, lui, resté droit dans ses bottes à la barre du FPI car il avait déjà conscience que cet instrument qui a permis à LG d'accéder à la présidence pourrait le lui permettre aussi.

Mais, au delà de tout cela, le président Affi a un programme de gouvernement et un projet de société révolutionnaires et modernes qui devraient propulser la Côte d'Ivoire au firmament du développement. Ils séduiront la classe moyenne et supérieure. Ce n'est pas suffisant pour gagner. Il le sait.

Il parcours le pays depuis 1995, lorsqu'il était directeur de cabinet puis campagne de Gbagbo en 2000. Depuis, il n'a pas arrêté. Il connaît toutes les régions, départements et communes et presque tous les villages du pays. Il privilégie les petits rassemblements plutôt que les grands meetings. Il avance pas à pas, discute avec les populations et est à leur écoute.

Pendant ce temps, au PDCI, PPA-CI ou RHDP, chacun attend d'être imposé aux autres potentiels candidats internes. La relève s'illustre essentiellement dans les journaux et sur les réseaux sociaux, assurée que l'adoubement fera leur élection. Erreur de Gawa !
Par dessus tout, Affi est quelqu'un qui, en tout temps, cherche le compromis. J'en suis certain, après la trahison du PDCI et de EDS, suite au CNC et lors des dernières législatives, il doit regretter de s'être engagé corps et âme, de bonne foi, dans cette aventure. Nous en avions parlé. Il m'a dit ceci « en politique, on ne regrette pas. On apprend de ses erreurs ». Alea jacta est.

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Affi a également une botte sécrète que beaucoup d'ivoiriens ignorent. Ma relative proximité d'avec lui m'a permis de savoir que le président Bédié, qui le reçoit très souvent en tête à tête à dîner à Daoukro et le président Ouattara (et son entourage), avec lesquels il entretient de bonnes relations politiques ont beaucoup de considération pour lui… Je n'en dirai pas plus. Même Gbagbo qui le combat aujourd'hui doit être intimement fier de lui. Il sait que contrairement à ses suiveurs Affi a des C… On peut confier un pays à un tel homme et dormir sur ses deux oreilles.

Parce qu'il aime profondément l'Homme et la Côte d'Ivoire. Parce qu'il n'a de problèmes personnels avec personne et prône constamment la réconciliation vraie et sincère entre ivoiriens. Parce qu'il ne surfe jamais sur le clanisme, le régionalisme et la religion et qu'il a un vrai projet de développement du pays, il a toutes ses chances en 2025.

Si Bédié et ADO ne sont pas candidats en 2025 et que Affi reste ce qu'il est et réussit à nouer de bonnes alliances politiques et communautaires, il sera le prochain président de la Côte d'Ivoire car un pays qui sort d'une crise ne remet rarement le pouvoir à un homme ou un parti qui pourrait le replonger dans une autre crise. Notez le quelque part.

Written by Jean Bonin

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